NAPOLEON Ier.
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nement. Ce fut en partie pour donner des conseils å la France, comme il le dit lui-méme, qu’il adressa au nouveau gouvernement de Genes cette lettre remarquable qui fit un si grand effet å Paris : « Exclure les nobles de toute fonetion publique, disait-il, serait une injustice ré-voltante; vous feriez ce qu’ils ont fait. » Dans une conversation qu’il ■eut avec Miot de Mélito, le 18 novembre 1797, å son passage å Turin, il fit encore mieux comprenclre le fond de sa pensée. Aprfes avoir justifié la résolution qu’il avait prise de seconder le Directoire au 18 fructidor, il ajoutait : <( Mais n’allez pas croire que ce soit par con-formité de vues avec ceux que j’ai appuyés que je m’ysuis déterminé. Jene voulais pas le retour des Bourbons; définitivement je ne veux pas du röle de Monk; je ne veux pas le jouer, je ne veux pas que d’autres le jouent. »
Pendant que le Directoire se montrait si faible et si violent, Bonaparte négociait, dans les conférences d’Udine, le traité qui devait con-firmer les préliminaires de Léoben. Il semblait que la paix allait devenir générale; car Pitt lui-méme, cédant å l’opinion publique, avait fait des propositions sérieuses et sincéres. Il se serait contenté de conserver la Trinité, le Cap et Ceylan; le Directoire refusa. Quant å Bonaparte, souhaitant la paix, il était décidé å abandonner au besoin å l’Autriche la Vcnétie tout entiére, possession qui valait mieux pour elle que la Lombardie qu’on lui enlevait. C’était déjå beaueoup trop. Le plénipo-tentiaire autrichien, Cobentzel, Gallo représentant du roi de Naples, et deux autres diplomates, faisaient cependant encore des difficultés.
Bonaparte, qui avait jusque-lå charme les négociateurs par une cour-toisie qu’on ne s’attendait pas å trouver dans un général républicain, résolut de les effrayer pour en finir. Une de ces sefenes de colére plus ou moins simulées, mais motivées par un sentiment vrai, dans lesquelles il devait plus d’une fois se montrer, pour rappeler un mot célébre, « un admirable tragedien, » lui servit admirablement. Dans une en-trevue que Cobentzel avait dit devoir étre la derniére, Bonaparte se trouvant seul avec les quatre négociateurs, Cobentzel osa le menacer de l’intervention de la Russie. Bonaparte s etait montre jusque-lå sombre etréservé, pour mieux engager Cobentzel å étre arrogant. Mais,