292
NAPOLEON I«
loton; j’en veux former un seconcl. A peine avais-je commencé que le premier avait déguerpi. Nous abandonnons (entreprise et courons rejoindre le général en chef. » Il était environ deux heures. Le vieux Melas, épuisé de fatigue, et ayant eu deux chevaux tués sous lui, voyant la victoire assurée, rentre å Alexandrie, laisse le com-mandement å son chef d’état-major, Zach, et expédie des courriers å toute l’Europe pour annoncer la défaite de Bonaparte a Marengo. Zach forme l’armée autrichienne en colonne de marche sur la grande route de Marengo å San Giuliano.
Mais Desaix n’avait pas attendu l’arrivée des aides de camp du Premier Consul pour retourner sur ses pas. Entendant le canon qui ne cessait de tonner du coté de la Bonnida, il avait arrété son mou-vement et s’était contenté d’envoyer du coté de Novi une forte reconnaissance de cavalerie qui n’avait rien trouvé. Ne doutant plus que les Autrichiens ne fussent å Marengo, il venait d’envoyer demander de nouveaux ordres au Premier Consul, lorsqu’au méme moment il vit arriver un aide de camp de Bonaparte, Bruyére, qui lui portait Fordre d’accourir au plus vite. Vers trois heures ses tetes de colonne débou-chaient dans la plaine (1). Desaix les précéde au galop et accourt auprés de Bonaparte. « La présence de Desaix va changer la face des choses.. On l’entoure, on lui raconte la journée. Les généraux se forment en cercle autour de lui et du Premier Consul et discutent vivement sur cette grave situation. La plupart sont d’avis de la retraite. Le Premier Consul n’est pas de cette opinion, et il presse vivement Desaix de dire la sienne. Desaix, promenant ses regards sur ce champ de bataille dé-vasté, puis tirant sa montre et regardant l’heure, répond au général Bonaparte ces simples et nobles paroles : Oui, la bataille est perdue, raais il n’est que trois heures; il reste encore le temps d’en gagner une. »
Une troisiéme bataille commence. Bonaparte, aprés avoir pris ses derniéres dispositions, parcourt les rangs : « Mes amis, c’est assez
(1) Le récit de Ségur (Mémoires, t. II, p. 56 et suiv.) différe en quélques points du récit consacré. La division Desaix ne serait entrée en ligne qu’å six heures du soir. Cependant Coignet et Maurice Dupin, témoins oculaires, disent qu’il était environ deux heures. C’est aussi l’opinion de M. de Colbert-Chabanais. (Traditions et Souvenirs sur le général Auguste Colbert.)