ASSASSINAT DE PAUL I".
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Cette mort arrivait å propos pour eile, et Bonaparte savait å ses dépens que le cabinet britanique ne reculait pas devant de pareils moyens. Cette supposition n’avait rien que de vraiseniblable, mais les soupgons du Premier Consul n’ont pas été con-firmés. liest probable cependant que l’ambassade anglaiseconnaissait le complot, la sæur d’un des conjurés étant rejue familiérement å l’ambassade. Ce fut une de ces révolutions de palais qui ont ensanglanté tant de fois l’histoire de la Russie. Paul I", esprit bizarre et caractére mal équilibré, avait, des son avénement, vivement irrité la noblesse russe par les caprices de sa fa veur, la violence de ses paroles et de ses actes et le despotisme tracassier qui s’était fait surtout sentir dans les réformes militaires. La rupture avec l’Angleterre acheva de l’exaspérer. En arrétant, en effet, l’exportation des blés, des chanvres, des bois et autres matiéres destinées soit å l’alimentation soit å la construction et å, l’équipement des vaisseaux, cette rupture ruinait la noblesse russe. On. avait entendu le czar prononcer contre sa femme et contre son fils ainé des paroles nienac/intcs. On lui prétait l’intention d’exclure du trone le czarevitch Alexandre. Celui-ci laissa se former, sans y prendre part, une conspiration qui devait settlement provoqtær la déposition de son pére. Un noble livonien, Pahlen, fut l’åme du complot. Il s’adjoignit entre autres le Hanovrien Benningsen et deux Russes, les fréres Zubow, et plusieurs autres mécontents. Le czar fut étranglé dans la nuit du 2 i mårs.
Alexandre témoigna de la plus grande douleur; il n’en profitait pas meins du crime et n’en punissait pas les auteurs.
Le nouveau souverain de la Russie, jeune, noble d’aspect, gracieux de maniéres, spirituel, enthousiaste, mobile, artificieux, diffleile ä saisir, était doué d’un charme per-sonnel infini et destiné å exercer sur ses contemporains la plus grande séduction ; « il était méme appelé å exercer cette séduction sur l’homme extraordinaire, si difficile å tromper, qui dominait alors la France et avec lequel il devait avoir un jour de si grands et de si terribles démélés. »
Quoi qu’il en soit, l’avénement d’Alexandre changeait la position de l’Angleterre et les affaires du monde. Des le 20 avril, Pahlen, qui était resté le principal ministre du nouveau czar, faisait connaitre aux amiraux anglais que la Russie accéclait aux demandes du cabinet anglais. Le 19mai, la Suécle ouvrait ses ports aux vaisseaux britanni-ques. Au mois de juin, la Russie signait å Pétersbourg un traité qui niettait fin aux différends maritimes entre les puissances du Nord et l’Angleterre. Dés le 16, le comte de Bernstorf s’était rendu å Lon-clres et, le 17, le Danemark levait l’embargo sur les navires anglais. Ainsi, trois mois aprés la mort de Paul Ier, la confédération du Nord fut dissoute et le triomphe de l’Angleterre assuré.
Napoléon ne pouvait plus l’atteindre sur le continent que dans son