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NAPOLEON Ier.
son temps entre les choses qu’il avait å faire. Jamais esprit plus inflexible ä refuser l’occupation, la pensée, qui ne venait ni au jour ni å l’heure, ni plus ardent å la cher-cher, plus agile å la poursuivre, plus habile ä la fixer, quand le moment de s’en occuper est venu. »
C’est ainsi qu’on vit Napoléon, ]a veille de la bataille d.’Austerlitz, réunir å six heures du soir ses généraux, leur donner ses instructions pour le lendemain, clicter ensuite le décret d’organisation de la maison de Saint-Denis et revenir aux préparatifs de la bataille. II comparait lui-méme sa tete å une armoire oii chaque affaire était casée å sa place. « Quand je veux interrompre une affaire, disait-il, je ferme mon tiroir et j’ouvre celui d’une autre; elles ne se melent point l’une avec l’autre et jamais ne nie gcnent ni ne me fatiguent. Veux-je dor-mir, je ferme tous les tiroirs et me voilå au somineil. » En effet, Napoléon dormait ou et quand il voulait.
Napoléon connait mieux l’état de chaque département ministériel que le ministre lui-méme et, dans chaque bureau, le détail des affaires aussi bien que le commis.
C’est surbout par sa correspondance qu’on peut juger de cette activité, qui ne fut jamais plus merveilleuse que sous le Consulat. Le méme jour, par exemple (le 8 aoüt 1802), il écrit au ministre de l’intérieur, Chaptal, pour s’assurer de la mise ä exécution d’arrétés relatifs å des bustes d’hommes célébres ct ä des tableaux représentant des batailles les plus mémorables des derniéres guerres, et demander des projets d’arrétés sur le transport de la Bibliothéque nationale au. Louvre et de l’Imprimerie nationale au payslatin; sur la nomination d’une commission qui doit choisir des tableaux et des statues pour diverses villes deprovince. — Il deman.de au ministredes finances, Gaudin, des projets d’arrétés dont il fait connaitre les dispositions principales (il n’y a plus qu’å les rådiger) sur les propriétés d’émigrés; — au directeurdu Tresor, Barbé Marbois, de nombreux bordereaux pour le reglement des comptes spécialement indiqués; — au général Berthier, ministre de la guerre, des rapports sur les mesures prises pour completer la carte de Cassini et y comprendre les départements nouveaux ainsi que le pays entre 1’Adige et l’Ådda. Enfin, on trouve ä la méme date une lettre de blåme å Fouché, qui a laissé publier dans le Journal des Défenseurs une circulaire relative aux affaires religieuses « écrite dans un style de haine et.de passion tout ä fait contraire å la marche et å la dignité da gouvernement ».
Ainsi Napoléon pouvait avec raison dire ä Roederer : « Moi, je travaille toujours. Je médite beaucoup. Si je parais toujours prét ä répondre å tout, å faire face å tout, c’est qu’avant de rien entreprendre, j’ai longtemps médité, j’ai prévu ce qui pouvait