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NAPOLEON I«
leur donnant un caractére public, il a sur eux une autorité immédiate et plus réelle, et qu’il peut par lå les paralyser plus facilement (1). » Fouché, quifut bientot rétabli dans le poste du ministére de la police, était doublement utile å l’Empereur, en ce que sa présence seule dans une charge si importante rassurait les jacobins sur la marche du gouvernement, et que, d’autre part, aucun ministre n’était plus au courant des tendances, des intrigues et des manæuvres cl’un parti qui l’avait compté parmi ses chefs les plus actifs.
Cependant les jacobins restaient en grand nombre dans les sociétés secrétes. Des le début de son gouvernement, Napoléon se préoccupa tres sérieusement de ces associations, et il eut avec elles, si l’on en croit M. Eapetti, des relations fréquentes et méme continues, non de sa personne, mais par sa police et quelques-uns de ses grands dignitaires. Cependant il ne faudrait pas s’exagérer leur puissance. « Napoléon s’en est parf ois servi, clit-il, mais il les a le plus souvent poursuivies et troublées dans leurs voies souterraines, et jamais il n’a été pour elles un auxiliaire. »
Quoi qu’il en soit, les jacobins, comme les émigrés, clierchaient a se rattaclier au gouvernement du Premier Consul. Parmi les grandes families de la noblesse, beaucoup n’attendirent pas la proclamation cle (Empire pour se rallier å Napoléon, et sur la premiére liste des séna-teurs, se trouvait un Choiseul-Praslin.
« On n’avait pas encore inventé la légitimité, dit Paul de Rémusat dans la préface des Mémoires de sa grand’mére, et ceux qui déploraient le plus souvent la chute de l’ancien régime, ou plutot de l’ancienne dynastie, ne se sentaient nulle obligation de penser que ce qui se faisait en France sous les Bourbons füt nul de soi. Tous avaient conservé cette opinion, qu’un fonctionnairen’estresponsable que de ce qu’ilfait,et non point de l’origine des actes du gouvernement. »
Bonaparte ne s’attachait pas seulement å mettre fin aux discordes présentes, il voulait réconcilier le présent avec le passé de la France; il voulait que la société nouvelle acloptåt sans arriére-pensée les gloires cle l’ancienne. Il félicita par une note le conseil municipal d’Orléans d’avoir pris la belle decision d’élever un monument å Jeanne d’Arc. « Cette délibération m’est tres agréable, disait-il; l’illustre Jeanne
(1) Extrait d’un rapport envoyé å Louis XVIII, cité par Fauche-Borel.