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NAPOLEON Ier.
prévoir, ä la perte de nos libertés politiques et peut-étre méme individuelles, achetées si chérement!... Déjå de funestes révélations de caractére nous ont été faites; vous les avez déplorées comme moi. Vous connaissez les flatteurs, Lucien;
« Hélas! ils ont des rois égaré le plus sage. »
« L’empereur Napoléon surpassera-t-il en sagesse le roi Salomon ? Pourra-t-il sortir victorieux des assauts jonmaliers que lui livrera la courtisanerie de ses valets impro-visés, qui remplissent déjå les antichambres de l’ancien palais des rois, cl’oii nous les avions expulsés ? L’expérience de tous les temps ne nous a-t-elle pas prouvé que les désirs d’un Empereur sont des volontés, que ces volontés deviennent des lois de fait ? C’en est done fait; nous n’avons plus, au lien de chamarrer nos uniformes, qu’å porter le deuil de nos libertés. »
Était-ce lå le pronostic d’un esprit naturellement chagrin? Mais Cambacérés, a la suite d’un entretien ou Bonaparte avait exposé ses vues å ses deux collbgues, Cambacérés disait å Lebrun ces paroles dont l’avenir n’allait pas tarder å montrer la justesse : « J’ai le pres-sentiment que ce qu’on édifie ne sera pas durable. Nous avons fait la guerre å l’Europe pour lui donner des républiques, filles de la Répu-blique frangaise. Nous la ferons maintenant pour lui donner des monarques, fils ou fréres du nötre, et la France épuisée finira par succomber dans ces folies entreprises. »