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NAPOLEON Ior.
pas lä un succes comme ceux dont Napoleon avait 1’habitu.de, et la victoire avait failli lui échapper jusqu’au dernier moment. « La fortune, dit M. Rambaud, prenait soin de l’avertir qu’elle ne serait pas toujours exacte ä ses rendez-vous. » Le champ de bataille était horrible. Napoléon en fut lui-méme épouvanté. Des milliers de cadavres était entassés les uns sur les autres et recouverts de neige tachée de sang. Le général Pelleport fut arraché par un de ses soldats d’un amas de morts sous lequel il était en-seveli. L’Empereur fit recueillir les blessés et déblayer le champ de bataille. Une cii-constance curieuse put lui montrer å quel point 011 avait exploité la crédulité des Russes pour exciter leur fanatisme. Des prisonniers amenés au général Colbert 1 avaient sup-plié de ne pas les donner å dévorer a ses soldats. On leur avait croire que les Fran-§ais étaient des anthropophages (1)!
Pendant que Benningsen se retirait sur Kænigsberg, Napoléon restait huit jours å Eylau pour bien faire constater sa victoire. Il reprit de nouveau ses quartiers d’hiver. Bernadotte et Soult s’établi-rent sur la Passarge, å la gauche de la Grande Armée; Ney, au centre, de Guttstadt å Allenstein; Davout, å la droite, sur l’Omulew. Le quartier général fut fixé a Finkenstein. Napoléon essaya vainement d’ouvrir des négociations soit avec la Russie soit avec la Prusse. Les deux nations renouvelérent leur alliance Bartenstein. La Russie et la Prusse formérent méme å Bartenstein une convention, dont les clauses sont fort remarquables, en ce que ce furent å peu prfes les mémes que le congrés de Prague voulut imposer å Napoléon en 1813.
La Prusse et la Russie cherchérent å faire entrer les autres puis-sances européennes dans la coalition. Mais l’empereur Francis se contenta d’offrir sa médiation. Le roi de Suéde; battu a Anklam et chassé de la Poméranie par le maréchal Mortier, avait été obligé de signer un arrnistice. Enfin le miiiistcre anglais refusa meine de gu rantir un emprunt ds 150 millions que faisait la Russis cs moment.
Pendant que les puissances continentales étaient aux prises, l’Angle-terre poursuivait cle tous cotés ses accroissements maritimes; elle en-voyait une flotte dans la Méditerranée et intervenait aussi dans les hosti-lités qui avaient éclaté l’année précédente entre la Porte et la Russie.
Le sultan Sélim IH et son vizir Barayctar, aprés s’étre rapprochés de la France
(1) Dans le tableau de Gros, on voit un blessé russe essayant d’échapper & un Fransais qui s’efforce en vain de le rassurer.