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NAPOLEON Ier.
Les grandes puissances pouvaient encore faire quelque résistance, mais les petites clevaient se soumettre. Le Portugal avait été envahi en l’année 1807, parce qu’il refusait de rompre ses relations com-merciales avec l’Angleterre. Pour l’Espagne, notre alliée depuis longtemps, Napoléon lui reprochait, non ce qu’elle faisait ou laissait faire, mais ce qu’elle ne faisait pas, c’est-å-dire l’incurie avec laquelle eile laissait perdre des ressources maritimes dont le concours nous eüt été si précieux contre les Anglais. Selon les fortes expressions de Mollien, « le Pape allait cesser de régner å Rome parce que quelques barques anglaises avaient relåché å Civita-Veccliia (1) ».
La qualité de pfere commun de tous les fidéles, invoquée par le Pape, n’avait pu le garantir des rigueurs de Napoléon; le titre de frére, rappelé par le roi de Hollande, ne le sauva pas clavantage.
C’est en grande partie la préoccupation d’étendre ou de maintenir le blocus Continental qui va entrainer Napoléon dans les fautes qui améneront sa ruine.
« Quand il dépossédait, en 1808, la dynastie espagnole, creusant ainsi de ses propres mains l’abime oü devaient s’engloutir ses vieilles bandes jusque-lå invincibles; quand il affrontait, en 1812, les immenses périls de la gigantesque Campagne de Russie; quand il refusait äl’Autriche, en 1813, d’abandonner les villes hanséatiques, n’est-ce pas le commerce anglais qu’il avait surtout en vue (2) ? »
Telles furent les conséquences politiques du blocus Continental; ses conséquences économiques out été également considérables.
L’industrie frangaise, malgré de grands perfectionnements, avait encore besoin de l’industrie des autres nations; elle avait besoin des produits dont les peuples civilisés ne peuvent se passer, et que toute leur civilisation est impuissante å faire rendre å leur sol; elle avait besoin enfin d’exporter certains de ses produits. Aussi Napoléon per-mit de naviguer aux vaisseaux qui porteraient en Angleterre le bois, le chanvre, le blé, a condition qu’une partie de la cargaison se compo-serait de soieries, de draps, de vins, d’eaux-de-vie, de fromages, et qu’ils ne rapporteraient en retour que des choses dont nous manquions,
(2) Mollien, Mémoires d’un ministre du Tresor public.
(3) Amé. Tarifs des douanes et traités de commerce.