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NAPOLEON Ier.
pressés et les plus désintéressés s’offrirent alors å Napoléon : des marins de tous grades voulaient risquer le passage å travers les Anglais; le commandant de la Méduse meine, parlant au nom de son equipage, était pret å attaquer le Bellérophon, navire anglais de 74, au risque d’étre désemparé, puisque la Méduse était de moindre force, mais seu-lement pour paralyser les mouvements des Auglais et laisser la mer libre å la Saale, qui, profitant de la lutte, conduirait sans grand péril l’Empereur å sa destination. Le plan était praticable, mais le capitaine de la Saale, qui avait le commandement de la station frangaise, s’y re-fusa, obéissantåun ordre secretémané de Paris, de Fouché, disait-on. Joseph, venu å l’ile d’Aix pour embrasser son frére, voulut aussi profiter de sa ressemblance avec l’Empereur pour qu’il passat å sa place par Bordeaux sur un navire prét å le transporter en Amérique; Napoléon ne voulut pas profiter de ce dévouement. Un temps inappréciable était perdu, Louis XVIII rentrait en ce moment å Paris; Napoléon se décida å écrire la lettre suivante :
Au Prince régent dAngletcre.
Rochefort, 13 juillet 1815.
« Altesse Royale, en butte aux factions qui divisent mon pays et å l’inimitié des grandes puissances de l’Europe, j’ai consommé ma carriére politique, et je viens, comme Thémistocle, m’asseoir au foyer du peuple britannique; je me mets sous la protection de ses lois, que je réolame deVotre Altesse Royale, comme du plus puissant, du plus constant et du plus généreux de mes ennemis.
« Napoléon. »
Le général Gourgaud fut chargé de porter cette lettre en Angltterre, et le comte de Las Cases, d’en remettre copie au capitaine Maitland du Bellérophon, qui prit sur lui de recevoir Napoléon å son bord. Le 15 juillet, au milieu des sanglots d’une foule accourue sur son passage, l’Empereur quittait File d’Aix sur le brick l’Epervier, le seul navire frangais qui eut conservé le drapeau aux trois couleurs, et mon-tait sur le Bellérophon, qui faisait voile pour l’Angleterre.
Au re?u de la lettre au prince régent, le gouvernement anglais avait convoqué le conseil privé, dont les membres, seréférant å la déclaration de Vienne (1815), qui