Ornementation Usuelle
De Toutes Les Époques Dans Les Arts Industriels Et En Architecture
Forfatter: Rodolphe Pfnor
År: 1866-1867
Forlag: La Librarie Artistique de e. Devienne et Cie
Sted: Paris
Sider: 418
UDK: 745.04 Pfn
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Les anciens huchiers travaillaient mieux que la plupart des
nôtres, il faut bien le reconnaître. Quand nous retrouvons des
restes de.leurs œuvres, ces restes sont brisés quelquefois, mais
déjetés jamais. On nous objectera qu’ils étaient les meilleurs,
puisqu’ils ont duré le plus longtemps : d’accord. Souvenez-vous
cependant que jadis on ne mettait pas moins d’un an à faire un
grand meuble. Trouvez aujourd’hui qui tant s’y attarde, si ce n’est
peut-être Sauvrezy ou Grohé. Les bois qu’on employait étaient
abattus en bon temps, séchés à l’air pendant dix ans peut-être,
et remplacés toujours afin que toujours il y en eût de même âge.
Et pour plus de sécurité dans les ouvrages de choix, ces hu-
ehiers consciencieux et naïfs exposaient encore leurs panneaux
à la fumée aigre de leur foyer. Il y avait une amende pour celui
qui eût employé l’aubier du bois. On assemblait les pièces à te-
nons et mortaises, on les chevillait en bois ou en 1er. Jamais de
colle, sinon pour les raccommodages, et encore! Les moulures et
les sculptures étaient faites en plein bois par les imagiers, dans la
masse, pour qu’en disant massif on dît vrai rigoureusement. Les
règlements veillaient à toutes choses : tant de barres et des mem-
brures de telle sorte pour un banc de telle longueur. Pour empê-
cher le dol on entravait la liberté : faudrait-il donc le faire en-
core ? faudra-t-il donc le faire toujours? Défense de mettre en
couleur une armoire ou un coffre avant de les avoir vendus,
toute peinture pouvant cacher une imposture. Et c’est si vrai!
Et de même pour le reste. Dans les métaux comme dans le
bois. Pour reproduire exactement le modèle, candélabres et lam-
pes étaient fondus à cire perdue. Et l’on aimait mieux marteler
que fondre : l’artisan était plus fier, se sentant plus fort. Ainsi
lo passé nous a laissé des serrures et ferrures incompré-
hensibles : voyez les pentures des portes de Notre-Dame de
Paris. La tradition veut qu’elles aient été forgées par le diable;
à ce compte, le diable eût donc travaillé à fermer toutes les ca-
thédrales. Il reste quelque part un pied de cierge pascal, en six
pièces de fer, haut comme un homme, dessiné probablement,
celui-là, et fleuronné par les anges : ce morceau a dû passer au
feu plus de mille fois. L’histoire du travail à l'Exposition de 1867,
et mieux encore le Musée rétrospectif de l’Union centrale de
1865, nous ont montré des landiers à saisir et confondre Baudrit
lui-même, qui pourtant est un homme valeureux.
Et pas seulement dans les métaux ni le bois. Lisez les précieux
livres de M. Viollet-Leduc, vous y verrez la description d’un
simple écrin de maître-queux, indestructible étui en cuir bouilli
à serrer les condiments, couteaux, lardoires, cuillers et four-
chettes, avec arabesques et figures dessinées au fer chaud. C’est
à faire jeter au ruisseau notre papier mâché des Anglais, mensonge
frère du carton-pâte et du carton-pierre, deux sculptuEes propres
aux vendeurs de tourteau-moutarde et de chicorée-café.
Quoique cependant madame Germain sache faire de ceci des
merveilles en laque à croire que le Japon s’en est mêlé.
On comprend qu’ainsi la durée devait être longue et la répa-
ration rare. Aussi beaucoup cherchaient-ils déjà le procédé.
L’artiste véritable vivait mal, faisant peu et trop lentement. Cou-
vents et châteaux marchandaient son génie voyageur. On l’y
gardait parfois pendant une année de travail, lui et son fils ou
son apprenti, pour leur nourriture et leur gîte. L’économie, cette
avarice en domino, gouvernait prieurs et majordomes ; et sans
les corps de métiers, notre industrie mobilière se fût probable-
ment gâtée dès le comrnencement. Les estimateurs de sculpture
au mètre ne sont pas de découverte si moderne. Il est parfaite-
ment singulier aujourd’hui, en pleine marche vers le vingtième
siècle de l’Eglise, de paraître regretter les maîtrises et les juran-
des. A qui la faute pourtant, si ce regret absurde est possible?
Certes, et on l’a dit avant nous, ces corps avaient l’inconvé-
nient de restreindre la liberté de faire, mais au moins ils conser-
vaient les traditions du bien faire, et repoussaient les ignorants,
les malhonnêtes et les malhabiles. Ils imposaient la marque de
fabrique et poursuivaient la garantie ; le tonnelier qui avait signé
son tonneau répondait d’un cercle mal posé. Par eux les ache-
teurs jouissaient de sûretés qui n’existent plus. Au premier soup-
çon, les syndics d’un métier se transportaient chez leurs confrères,
examinaient les matières servant à la fabrication, appréciaient
le mérite des choses mises en vente, et confisquaient selon leur
droit les produits mauvais ou mal faits. C’était rude , mais
c'était beau. Aujourd’hui la liberté est ouverte toute grande et lo
premier venu travaille, et l’on travaille à tout prix : tant mieux
mille fois, si ceux que l’on paye bien étaient obligés de bien
faire. J’ai mes yeux pour la forme, pauvre acheteur que ceux-ci
dupent, je ne les ai pas pour le fond ; c’est affaire à ceux qui s’y
connaissent. Un ancien tapissier, M. Compagnon, qui a été juge
au tribunal de commerce de la Seine, proposait il y a quelques
années d’établir un conseil devant lequel la pratique qui se croi-
rait trompée pourrait sans frais citer le fournisseur et faire exa-
miner la fourniture. Pourquoi pas? Il y a bien, nous dira-t-on, la
chambre syndicale des ébénistes : mais les chambres syndicales
sont des corps assis, lesquels volontiers s’ankylosent et ne se dé-
rangent pas au commandement.
Reste le règlement des mémoires par architecte, c’est-à-dire la
mise au pain sec du travail. Une ressource triste. Revenons.
Auguste Luchet.
(La suite prochainement.')
ESSAI
SUR
L’HISTOIRE DE LÀ POTERIE FRANÇAISE
(suite )
III
Les Symboles (fin) : — La Gourde. — Commencement, dans la poterie
gallo-romaine, du caractère français.
Quand on parcourt l'histoire d’un peuple, il y a des moments
où l’on croit ne lire que la légende d’une simple famille. Le dé-
veloppement des races suit pour ainsi dire la même voie que le
développement de l’homme.
Dans l’enfance d’un peuple, ce qui vous frappe, c’est le manque
complet de personnalité. Il se rattache par ses traditions, par ses
usages, par ses coutumes, par son art, à autre chose, à je ne sais
quoi, qui lui est commun avec un grand nombre d’individus.
La nature est venue les séparer violemment, les désunir. En-
nemis maintenant, ils semblent ne se rencontrer que pour se dé-'
truire; jadis ils ont dû être frères, boire à la même coupe et
s’abreuver au même sein.
Dans notre étude sur la poterie gauloise, ce que nous avons
d’abord cherché;, ce sont ces analogies.
Quelques traditions sont venues nous aider à les indiquer.
Rattacher la race celtique à l’Inde, à l’Egypte, à la Grèce pélasgi-