Ornementation Usuelle
De Toutes Les Époques Dans Les Arts Industriels Et En Architecture
Forfatter: Rodolphe Pfnor
År: 1866-1867
Forlag: La Librarie Artistique de e. Devienne et Cie
Sted: Paris
Sider: 418
UDK: 745.04 Pfn
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rendre les légendes chrétiennes et à en traduire la grandeur, la
naïveté et le sentiment; mais ils étaient restés étrangers à cette
poésie de la forme matérielle dont les Grecs avaient fait une re-
ligion. Cette nouvelle manière d’envisager les arts fut une révé-
lation pour ces artistes français dont l’habileté était rompue à
toutes les difficultés, et ils ne tardèrent point à se mettre à la tête
de cette imposante manifestation de l’esprit humain, qu’on ap-
pelle la Renaissance.
Pendant longtemps on a voulu attribuer tout l’honneur de la
Renaissance française aux Italiens que François Ier introduisait
à sa cour. Il appartenait à notre temps de venger de ce mensonge
historique ces vaillants artistes, ces hommes de génie qui con-
struisirent Chambord, Blois, Anet, le Louvre et les Tuileries, qui
firent sortir du bronze et taillèrent dans le marbre ou la pierre
ces sveltes figures de nymphes et de déesses, personnifications
délicates de la grâce féminine française, q-ui couvrirent les
meubles, les armes, les étoffes, l’orfèvrerie et la céramique de
charmantes fantaisies, d'emblèmes, de devises, de mascarons, de
grotesques, d’attributs et d’ornements pleins de style, d’élégance
et d’esprit; notre siècle devait enfin rendre justice à cette école
du seizième siècle, dont les maîtres furent : Philibert Delorme,
Androüet Ducerceau, Pierre Lescot, Chambiche, Jean Goujon,
Germain Pilon, Jean Cousin, Pinaigrier, Jean Penicaud, Léo-
nard Limosin et Bernard de Palissy.
Ces grands hommes se pénétrèrent de l’harmonie des propor-
tions, de la pureté des formes, du style, de la grandeur et de la
majesté de l’art antique, sans cependant répudier les qualités
d’expression et de sentiment qu’ils tenaient de leurs prédéces-
seurs. En sculpture, loin do ne s’attacher qu’à reproduire les
types antiques, ils continuèrent à étudier scrupuleusement la
nature, à /observer consciencieusement, et ils la revêtirent des
• caractères lesplus élevés de la statuaire grecque. En architecture,
ils surent soumettre leurs compositions aux règles sévères des
cinq ordres, tout en conservant cette entente des masses et des
silhouettes, cette sûreté d’effet et ce respect des nécessités in-
flexibles de la construction, auxquelles ils durent les motifs les*
plus gracieux, les plus variés et les plus élégants de leurs
créations.
Deux panneaux, placés aux côtés de la porte d’entrée, attirent
tout d’abord l’attention et montrent quelle transformation com-
plète le seizième siècle inaugura dans les arts. Ces deux
écussons, en forme de cœurs, sont soutenus par des figures d'anges,
demi-nature, dans le genre de Germain Pilon. Ces quatre figures
n’ont plus l’attitude recueillie, l’expression naïve et touchante des
anges du treizième siècle ; ce sont des êtres supérieurs, des gé-
nies, dont les têtes possèdent l’expression calme etfière des divi-
nités antiques. La tunique dont ils sont enveloppés découvre
leurs membres, qui, comme ceux des hermaphrodites, allient la
délicatesse féminine à la force virile. Ils ne sont plus prosternés
comme dans les sculptures du moyen âge, ils se tiennent debout,
prêts à déployer les grandes ailes que le sculpteur a attachées à
leurs épaules avec une vérité pleine de style et de grandeur. On
sent devant cette nouvelle statuaire que l’artiste, rompant avec
le passé, no s’adresse plus au sentiment, mais à l’intelligence et
qu’il cherche avant tout à propager autour de lui ce culte de
la beauté plastique et cet amour de la forme auquel il s’est voué
tout entier.
Nous nous occuperons longuement des meubles dans l’étude de
cette partie de 1 Exposition; car ils se relient intimement à l’ar-
chiteclure, et nous retrouverons, en les analysant, les phases
successives qui amenèrent l’art des charmantes fantaisies, dites
de transition, aux chefs-d’œuvre classiques du règne de Henri II
et de là aux compositions sévères de la seconde moitié du sei-
zième siècle.
L’époque de transition nous offre un retable rectangulaire dont
le panneau supérieur représente l’annonce aux bergers et l’ado-
ration des Mages; au-dessus règne une série de panneaux enca-
drant chacun une figure de saint debout sous un dais. Ces pan-
neaux sont séparés par des pilastres portant aussi des statuettes,
et cet ensemble forme une petite galerie d’un grand effet et d’un
goût charmant,
Au milieu de la salle se trouve une œuvre capitale : lo cou-
vercle des fonts baptismaux de l’église Saint-Romain de Rouen.
C est un dôme à huit pans, couronné par une petite lanterne à
quatre colonnes en fuseau, terminé par un pélican, et sous la-
quelle s’abrite une résurrection. Cette ravissante composition
rappelle les belles silhouettes du château de Chambord, elle est
merveilleuse de proportions et d’effet. Lorsqu’on s’en approche,
les détails dont elle est couverte vous saisissent d'admiration.
Chaque pan du dôme forme un triangle curviligne, bordé sur ses
côtés, par des nerfs d’un profil délicat et robuste à la fois. Dans
chaque compartiment est sculptée une scène de la Passion enca-
drée par un motif d’architecture légère terminé par des pi-
nacles réellement aériens, dans lo genre des compositions ar-
chitecturales des fresques de Pompeï. Derrière cette architec-
ture se groupent de véritables tableaux en relief, supérieurement
composés, et exécutés avec tant de savoir, de style et d’adresse,
que l’on ne peut s’en détacher et que l’on revient toujours, mal-
gré soi, devant ce petit chef-d’œuvre.
Parmi les sièges, peu nombreux du reste, remarquons cette
chaire à siège plein, à accotoirs en consoles supportés par des
balustres, se rattachant à deux pilastres qui, avec leur entable-
ment, forment le bâtis du dossier dans lequel est sculpté un
combat.
Un des plus beaux spécimens du règne de Henri II, et l'un des
plus curieux, est sans contredit cette crédence clans le genre de
Ducerceau, portée antérieurement sur quatre colonnes accou-
plées deux à deux, et que surmonte un entablement orné de fi-
gures et d’oiseaux. Derrière cette ordonnance, se relie au dossier
une petite table supportée par quatre fuseaux, sur laquelle se
fixe un coffret dont la porte est décorée d’un bas relief de Mars et
Vénus, d’une exécution hors ligne. Au-devant du coffret s'ouvre
un tiroir sculpté de grotesques et d’une tête de lion retenant dans
sa gueule l’anneau de tirage. Cette tête de lion forme cul-de-lampe
sur le devant du coffret, pour soutenir au besoin une statuette
ou quelque coupe émaillée. Dans le dossier, des niches et des in-
crustations de bois et de marbre. Cette crédence était évidem-
ment destinée au même usage que nos modernes étagères, c’est-
à-dire à exposeï’ des objets précieux et des œuvres d’art de pe-
tite dimension ; elle est remarquable par la beauté de son exé-
cution et l’originalité de sa conception.
A. DeLaRoque,
A-iMlecte.
R. PFNOR, Propriétaire-Directeur.
Paris. — Typ. Rouge frères, Dunon et Fresné, rue du Four-St-Germain 43.