Ornementation Usuelle
De Toutes Les Époques Dans Les Arts Industriels Et En Architecture
Forfatter: Rodolphe Pfnor
År: 1866-1867
Forlag: La Librarie Artistique de e. Devienne et Cie
Sted: Paris
Sider: 418
UDK: 745.04 Pfn
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Je connais à Paris un tapissier qui sait meubler; je n’en con-
nais pas deux. Ce tapissier a une femme qui l’inspire.
Le seizième siècle fit enfin naître le meuble français propre-
ment dit, et c’est à ses chefs-d’œuvre que revient, par imitation,
déduction et conclusion, tout l’honneur, à peu près, du bel ameu-
blement moderne. Nous n’avions véritablement rien encore qui
fût nôtre et bien raisonnable ; nous vivions d’emprunts gigantes-
ques. Or, on ne pouvait pas toujours rester dans le lit basilique et
la cheminée cathédrale" ; les hommes commençaient à se trouver
moins dieux. Jean Goujon et sa pléiade ouvrirent sur cette
renaissance leurs fortes mains pleines de merveilles, et ce qu’ils
ont fait en ameublement personne ne l’a surpassé. Il reste quel-
ques meubles du château d’Anet, dessinés par Jean Goujon pour
Diane de Poitiers; c’est à se mettre à genoux.
On suivit ce grand art, d’un peu loin pourtant, jusqu’à la Ligue.
Sous les guerres fratricides qu’elle alluma, il y eut un temps d’ar-
rêt. On se bardait et se barricadait plus qu’on ne se meublait ; on
achetait non des statues ni des bahuts, mais des barres, des ver-
rous et des armes. L’Italie restée paisible continua doucement
d’avancer : voilà pourquoi tant de palais y sont remplis de meu-
bles bâtis et sculptés dans le genre créé par Goujon. C’est, je
pense, la première fois que l’art français, tout jeune qu’il était,
aura prêté quelque chose à l’Italie, cette grand’mère. L’Angle-
terre, qui, à force de chercher, finira par avoir le sien, en était
encore au gothique remplacé par nous d’une façon si brillante.
Nous ne la voyons guère en sortir qu’au dix-septième siècle,
par des Hollandais engagés à prix d’or, lesquels lui firent ces
belles salles de châteaux plafonnées en bois, dont la maison
Goupil a publié un excellent album. Aujourd’hui même, M. Crace,
un très-grand ébéniste de Londres, a toutes ses préférences pour
le gothique et s’en trouve bien.
Le meuble français, vaillamment repris à l’abjuration de
Henri IV, atteignit toute sa splendeur sous Louis XIII. Les lignes
torses, ces amoureux serpentemenis de la lumière et de l’ombre
étaient trouvés ; et c’est, à coup sûr, le cas d’admirer que l’in-
dustrie aujourd’hui régnante ait eu la bonne foi de réinventer et
de faire breveter, sous Louis-Philippe, deux, procédés que con-
naissaient déjà les bahutiers de 1620, à savoir le tour tors et la
machine à guillocher. On faisait, il est vrai, et je crois même que
l’on fait encore du pied tors à la main ; mais il était laid en ce
temps comme au nôtre. C’est Punique raison pourquoi les faux
amateurs le recherchent, n’aimant des vieilleries que leurs im-
perfections.
Comme une belle chambre était alors une belle chose ! Aux
murs de bonne hauteur et d’épaisseur discrète s’appliquaient les
cuirs dorés et repoussés, les boiseries élevées, les tableaux, les
miroirs de Venise, les faïences, les émaux, les portraits. Vou-
lait-on faire un salon de cette pièce, ou deux en une, on déployait
les tentures de haute lisse glissant sur des tringles cachées au
sommet de la grande gorge de la corniche, à l’angle de la pre-
mière moulure du plafond en caissons, et l’on avait d’immenses
murailles de laine sans portes, coiffées d’un ciel à reliefs vigou-
reux se détachant sur des fonds rouges ou bleus à filets d’or. Les
fenêtres s’ouvrant sur des jardins continuaient dans la nature les
merveilles peintes de la tapisserie. Trois lustres, ou cinq, descen-
daient du plafond par des chaînes de cuivre entourées de corde-
lières, beautés de l’art hollandais, dont Gérard Dow a mis un type
si charmant dans son tableau de la Femme hydropique. Ces dinan-
deries de grand style, aux boules précieuses comme de l’or,
avec leurs agréments maniés en plein cuivre, leurs nœuds et
leurs houppes aux couleurs de la pièce, étaient adorables à voir
éteintes, magiques avoir allumées. Les sièges à pieds tors avaient
le dossier comme le coussin en travail plein à l’aiguille, sans
sommet sculpté, afin de ne pas lutter d’effet ni de lignes avec les
tapisseries. De gros clous de cuivré dans le ton des lustres les
garnissaient ; des tables couvertes de richesses grandes et
petites ornaient les trumeaux, qui sont les espaces entre deux
fenêtres, au-dessous des miroirs aux joints garnis de même par
de beaux cuivres emboutés.
Les splendides ensembles que cela devait faire surtout, si on
se les figure peuplés des costumes du temps, les plus élégants et
les plus nobles que la France ait jamais connus !
Auguste Luchet.
(La suite prochainement.)
ESSAI
SUR
L’HISTOIRE DE IA POTERIE FRANÇAISE
I
Coup d’œil général. — La fleur de lotus, la coupe.
(suite)
L’homme des déluges n’avait-il fait que retrouver dans son sou-
venir une tradition de ses pères remontant à une autre révolution
primitive, ou le culte du Lotus naquit-il simultanément, pour
des causes identiques, sur les points différents du globe, c’est
ce que nous n’avons pas le loisir d’examiner ici.
Des savants le prétendent (1). Nous préférons voir, avec Mi-
chelet, dans ce symbole un immense concert d’àmes, une grande
harmonie retrouvée à travers l’espace et le temps.
Fig. 10.— Vase Gaulois celtique. —Trouvé entre Ploudaniel et Plouneventer. A. Bron-
gniart. — Traité des arts céramiques.
Fig. il. —Vase romain. — Musée du Louvre.
(Fig. 10. (Hauteur 27 cent.). Fig. il. (Hauteur 28 cent.).
La coupe, ce lotus épanoui, fut l’un des premiers objets façon-
nés par la main de l'homme.
Pourquoi s’étonner après cela de la voir paraître sur les bas-
reiiefs du palais de Khorsabad, aux ruines de Ninive, au milieu
des sculptures du temple de Denderah, dans les dolmens des
Gaules et parmi les poteries américaines du Musée du Louvre.
(1) M. Jacquemart entre autres : « Les mêmes besoins, les mêmes idées
ont engendré des manifestations analogues. » {Merveilles de la Céramique,
p. 336.)