ForsideBøgerOrnementation Usuelle : D…riels Et En Architecture

Ornementation Usuelle
De Toutes Les Époques Dans Les Arts Industriels Et En Architecture

Forfatter: Rodolphe Pfnor

År: 1866-1867

Forlag: La Librarie Artistique de e. Devienne et Cie

Sted: Paris

Sider: 418

UDK: 745.04 Pfn

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Side af 427 Forrige Næste
 39 fabrication limitée, l’artisan et l’artiste, solitaires murés et éna- mourés dans leur tâche, savaient presque toujours unir la solidité de la façon à la recherche de la forme. A présent, ils ne le savent ou ne le veulent plus. Sauf exceptions rares et précieuses, les deux conditions se disjoignent : vous avez, en foule, l’apparent mal fait ou le solide sous pauvre mine. Pourquoi? C’est la vitesse qui le veut, répondant au peu d’argent qu’on y met. Devenus riches du soir au matin, il nous a fallu l’opulence du matin au soir. A bon marché et mauvaise durée : soit! Qui s’en est plaint? les connaisseurs : combien sont-ils? Par bonheur, l’excès porte la mort en ses flancs; et de celui-ci porté à l’extrême nous pouvons, je crois, conclure à la renais- sance prochaine des belles choses. M. Popelin lo croit aussi. Tout y pousse, et déjà de grandes tentatives sont faites. La mau- vaise marchandise s’avilit ; les instincts honnêtes s’en détour- nent. D où ce mouvement? On ne le sait guère.La reconstruction de Paris y est peut-être pour quelque chose. A demeure nouvelle mobilier nouveau. Au buffet-étagère il faut de la vaisselle visi- ble. D’argent? non pas encore,mais de terre. Aussi la céramique est-elle de tous les moyens décoratifs celui qui, à cette heure, affecte le plus de progrès. Est-ce parce qu’il y entre du métal, en notre époque métallique? Est-ce parce que le feu la produit, en ce temps de forges et de fournaises ? Tou- jours est-il que la faïence revient. Or la faïence ne saurait se passer de l’art. Du vase des rois jusqu’à l’humble écueils, il y faut la forme et la couleur. Opaque ou transparente, terre ou verre, la céramique est métier noble. L’Italie, l’une de ses patries, lui a donné pour éleveurs Luca della Robbia, Giorgio Andreoli, Cenzio, Xantho da Rovigo, et les verriers de Murano. Leurs œuvres sont chères aujourd’hui, et disputées comme des antiques. Les seigneurs d’alors s’en mê- laient, y dépensaient, s’y mettaient ; ils venaient curieusement voir chauffer et défourner. Le duc de Ferrare imposait les dessins de Raphaël aux potiers de sa ville. Les majoliques servaient aux cadeaux souverains. Venise offrait à l’empereur Frédéric III une coupe en verre du Beroviero. Le Tudesque, il est vrai, répondit qu’il aimait mieux de l’argent : affaire de nationalité peut-être ; les Allemands, volontiers, nieraient la faïence italienne. La France, selon Popelin, n’aurait eu qu’un homme dans la faïence; c’est Palissy. Rouen ni Marseille, Nevers ni Strasbourg, Moustiers ni Bordeaux, n’ont, dit-il, fait de l’art en leurs indus- tries charmantes. C’est trop absolu pour être entièrement vrai : j’en prends à témoin le livre de M. Lebroc de Segange sur les faïenciers de Nevers. Au moins, dans la résurrection qui s’opère, le maître difficile et grand nous accordera-t-il Pull, Pinart, Bou- quet et Collinot. Cette renaissance française de la faïence promet d’être cruelle à la porcelaine décorée. Pauvres petites couleurs hasardeuses et fugitives, que le f&u dénature, mais ne fixe pas ! Quel goût pour- tant de peindre là-dessus des tableaux, et des portraits, où les chairs sortent jaunes, où les méplats deviennent des fosses et des bosses ! Le talent s’y perd en déceptions désolantes ; pourquoi donc y persisterait-il ? A la faïence désormais, ces pinceaux inuti- lement braves ! Voilà qui les vaut, j’espère. Le fier émail cru les défie, lui qui n’attend personne et ne souffre pas de retouches ; lui qu’on n’aborde qu’à main levée. A la faïence, et sa gamme étroite de couleurs indestructibles, qui font si gaiement les mers violettes et les arbres bleus ! Toute fantaisie, du moins, peut se risquer dans cet impossible : tout caprice trouve à s’y régaler. C’est l’amusement du dressoir et l’éclat de rire du couvert. Re- tournez, pâtes dures et pâtes tendres, à votre blancheur imma- culée. Perdez-vous, neiges solides, dans le cristal, la serviette et la nappe. L’émail sur métal veut renaître aussi, sublime appli- cation de la peinture vitrifiée, dans laquelle non plus rien d’il- lustre ne s’était fait depuis les Pénicaud, les Courteis, les Léo- nard, les Jean Fouquet, les Clouet. Après ceux-ci, que nul ne surpassa, les Nouailher sont venus, et les Laudin ; mais que fu- rent-ils en comparaison? Puis des faiseurs de pastiches indi- gestes, indignes brocanteurs, fraudeurs, manufactureurs et con- trefacteurs des choses saintes, fabriquant à l’envi du faux vieux qu’on vendait très-bien cependant, à cause ou malgré que ce fût horrible. Aujourd’hui, le métier se remplit de gens honnêtes et habiles qui copient à merveille, mais qui copient. O le beau temps des copistes en toutes choses ! Le livre de M. Popelin voudrait ar- demment que l’on copiât moins. Hélas! l’auteur y prêche avec amour et vigueur la reprise laborieuse des traditions de ce grand émail royal, venu au monde en France, à ce qu’il assure, et non pas à Cologne, comme les Allemands se complaisent à s’y tromper; et nous avec eux. Vieil art qui eut Limoges pour ville natale, opus Lemovici; que saint Éloi, apprenti limousin, apprit sans doute de l’orfévre Obbon, son maître, et probablement trans- mis à Théau, son disciple, baptisé Oculi dans la complainte bouf- fonne... Les autres émaux sont industriels et de tous pays : de l’Orient surtout et de la Chine ; émaux cloisonnés, émaux champlevés ; mais l’émail dit des peintres, directement appliqué sur une feuille de métal, ainsi qu’on fait des couleurs à l’huile sur une toile bitu- mée, cet émail excellent, et immarcessible, comme l’appelle Théophile Gautier, celui-là, répétons-le avec orgueil, est fran- çais et de Limoges. Et de même qu’il prêche, le beau donneur d’exemples ensei- gne, en une langue pleine de 'science, de forme, de charme et d’originalité. Son traité de l’émail amuse et saisit comme une rabelaisienne légende. Tout y est : les cinq métaux, or, platine, argent, cuivre et fer; leur choix, leur préparation ; l’emboutis- sage des plaques, le repoussé, la ciselure (on n’est pas bon émail- leur si l’on n’est un peu orfèvre) ; le décapage ou dérochage, qui est de la chimie ; la fabrication des supports ; la composition des émaux et leur coloration, nouvelles et anciennes : car, de même que le vrai peintre devrait savoir faire ses dessous, et ses pin- ceaux, et ses couleurs, il convient que l’émailleur complet soit son propre ouvrier, du commencement à la fin : puis la construc- tion des fours, leur aération, leur orientation ; la connaissance et le choix des combustibles ; les difficiles manœuvres de l’en- fournement et du défournement. Tout enfin, je vous le dis, moins le talent et surtout le génie, qu’on peut posséder un jour quand on est M. Popelin, mais qu’il n’est donné d’enseigner à personne. Oh ! ce ne sont pas les méthodes qui manquent. Il manque le désir, l'ardeur et la volonté... Quø fais-tu donc de tes belles an- nées, jeunesse ? Auguste Luchet. —— 5= — R. PFNOR, Propriétaire-Directeur. Paris. — Typ. de Rouge frères, Danon et Fresné, rue du Four-St-Germain, 43