L'exposition De Paris 1889
Premier & deuxième volumes réunis
År: 1889
Forlag: A La Librarie Illustree
Sted: Paris
Sider: 324
UDK: St.f. 061.4(100)Paris
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L’EXPOSITION DE PARIS
L'EXPOSITION UNIVERSELLE
DE 1889
On s’est demandé si l’Exposition do
1889 est d’une opportunité bien démon-
trée au milieu de la crise économique
que traverse le monde industriel. Je de-
manderai, par contre, si le moyen d’at-
ténuer et de vaincre une crise consiste
bien à s’abstenir, à cause d’elle, de toutes
les entreprises des temps prospères, et si
l’on ose vraiment soutenir qu’il n’est pas
toujours opportun d’instruire, d’intéres-
ser et d’enthousiasmer lo public par
quelque révélation grandiose et attrayante
de l’état inventif du monde.
Dans un autre ordre d’idées, on a
objecté que les expositions universelles
ont lo grand inconvénient de révéler trop
largement et do livrer les secrets de la
fabrication nationale. Ce reproche est
puéril. Les négociants et los industriels
sérieux du monde entier n’ont-ils pas
des .correspondants, des voyageurs, des
agents qui les tiennent journellement,
heure par heure, au courant des mo-
dèles et des nouveautés qui se produi-
sent en tous lieux?
On a dit encore que les périodes
d’expositions font hausser, sans espoir
d’abaissement ultérieur, les prix de toutes
choses dans les villes où ont lieu les
expositions. Cela est loin d’êtro abso-
lument vrai. Une hausse de prix exagé-
rée se produit certainement dans les
magasins d’articles de fantaisie, clans les
hôtels dits aristocratiques, dans les res-
taurants de luxe, et ces prix se main-
tiennent quelquefois, mais cela par la
faute de gens qui veulent bien continuer
de les payer au lieu d’aller achalander
d’autres établissements où le confortable
est aussi grand, tout en étant moins bril-
lant, et dos magasins où des marchan-
dises de qualités égales se débitent sur
des comptoirs moins dorés. Vous allez
peut-être me trouver paradoxal; mais je
prétends que renchérissement des den-
rées, des objets qui constituent le luxe
et le superflu de l’existence, n’est pas
une chose aussi mauvaise qu’on le sup-
pose. Du moment que des consomma-
teurs prodigues ou riches à l’excès
tolèrent que certains de leurs fournis-
seurs réalisent des bénéfices do 150, de
200, de 500 pour 100, cos fournisseurs
ne deviennent riches que plus rapide-
ment, et font place à d’autres qui arrivent
non moins vite à l’aisance et à la fortune :
tous deviennent des consommateurs sé-
rieux, et, comme ils n’ont généralement
pas la naïveté de s’adresser à des mai-
sons du genre de celles qu’ils ont tenues,
leurs dépenses profitent à la classe vrai-
' mfint intéressante des industriels et des
commerçants. C’est ainsi que la richesse
publique s’augmente et multiplie le nom-
bre do scs détenteurs.
Cela est parfait dans ce sons, grâce
aux expositions universelles, d’autant
plus que, dans le sens contraire, celles-
ci aident à l’ouverture d’établissements,
à la création de sociétés qui facilitent
la vio à bon marché pour les classes
moyennes et ouvrières : les établissements
de consommation dits « bouillons Duval »
sont nés de l’Exposition de 18G7, ainsi
que les bateaux de la Seine, qui ont
inauguré une nouvelle voie de transport
des voyageurs rapide et à prix modiques.
Et je ne sache pas qu’aucune exposition
ait arrêté l’abaissement de prix dans la
confection des vêtements usuels et des
articles courants de mobiliers, en un
mot, des objets de première nécessité.
Ce sont les Expositions aussi qui ont
donné l’essor aux voyages à prix réduits,
avec billets d’aller et retour, ou billets
circulaires.
Il faut reconnaître enfin que les expo-
sitions sont des aubaines excellentes
pour les classes laborieuses auxquelles
elles fournissent pondant quelques années
un travail extraordinaire dans tous les
genres. Au cours de la discussion qui a
eu lieu au Parlement sur le projet de loi
do l’Exposition de 1889, un honorable
député s’est alarmé en présence du nom-
bre des ouvriers que les travaux de l’Ex-
position attireraient à Paris et y laisse-
raient sur le pavé après sa clôture.
J’aurais voulu qu’on demandât au député
en question de penser au présent avant
do redouter tant l’avenir, et de dire ce
qu’on pourrait bien faire, à défaut des
travaux de l’Exposition, des ouvriers qui
sont actuellement sans ouvrage dans nos
murs, aussi nombreux peut-être qu’ils le
seront en 1890.
Si vous me demandiez de vous indi-
quer quels seront le rôle et le sort des
expositions universelles dans l’avenir, je
serais embarrassé pour vous répondre.
Je vous demanderais tout d’abord de vou-
loir bien réfléchir à ce que pourra être la
situation industrielle de l’ancien monde,
et de la France en particulier, à la fin du
xixe siècle. L’an 1789 a daté le commen-
cement d’une transformation sociale qui
semble n’avoir pas encore achevé son
cycle; il pourrait se faire que 1889 datât
le commencement d’une transformation
économique dont tout signale l’approche,
dont les bruits précurseurs sont trop
Aolontiers pris pour les indices d’un
bouleversement révolutionnaire.
Je laisse aux économistes tout le souci
de considérer la question générale de
l’avilissement du prix de l’argent, de j
dire comment l’équilibre nécessaire à la
bonne marche du monde cconomrque et
social pourra so rétablir entre le capital,
de moins en moins rémunéré, elle salaire.,
qui demande de plus en plus à s’augmen-
ter. Je voudrais seulement considérer
l’avenir en face de deux faits brutaux qui
doivent ou qui peuvent se produire.
Quelles sont aujourd’hui les deux
assises fondamentales de la fortune pu-
blique, en dehors de l’agriculture qui
sera toujours la ressource première et la
ressource extrême parce qu’elle procure
directement l’aliment, en dehors du com-
merce proprement dit qui est un moyen
relatif et intermédiaire? Ce sont l’indus-
trie manufacturière et l’industrie des
transports. La seconde apporte à la pre-
mière les substances que celle-ci déna-
ture ; elle la fournit de matériaux de
fabrication qui viennent souvent de loin
parce que notre sol et notre climat ne
les produisent pas. Ces deux industries
sont naturellement d’intérêts opposés
sous certains rapports : l’industrie manu-
facturière se plaint du prix élevé des
transports ; l’industrie du transport ferme
l'oreille à ces plaintes et défend ses tarifs.
L’accord ne s’établira jamais à l’état par-
fait. Mais que va-t-il arriver? Il est évi-
dent qu’on se dira un jour qu’il est bien
inutile de transporter à prix coûteux les
gangues et les parties stériles qui grèvent
le poids de la matière première, utilisable.
On s’ingéniera pour traiter ou du moins
élaborer la matière première sur le lieu
de sa production : cela sera d’autant plus
facile que le charbon est presque partout
à portée on apportable sans dépenses
excessives et que la mécanique indus-
trielle est perfectionnée suffisamment
pour que lo premier manœuvre venu
accomplisse, on tournant une manivelle
ou en déclanchant un métier, la besogne
pour laquelle il fallait autrefois le con-
cours de plusieurs ouvriers experts et
intelligents. Avec cotto simplicité du
travail on trouvera en tout pays une
main-d’œuvre plus abondante et moins
avide de gros salaires que dans notre
vieille Europe. L’ancien monde serait
donc menacé de ne plus fabriquer que
de seconde main, c’est-à-dire de recevoir
une matière première légère, moins en-
combrante et déjà élaborée à différents
degrés ; il ne lui resterait que la ressource
de façonner industriellement et artistc-
ment cette matière suivant les goûts des
différents peuples, suivant les instincts
naturels, les capacités professionnelles et
les besoins nationaux de ceux-ci. La
France est un pays éminemment consom-
mateur; il lui faut travailler beaucoup
poür suffire à scs besoins réels ou factices
et pour réaliser, en outre, la richesse et