L'exposition De Paris 1889
Premier & deuxième volumes réunis
År: 1889
Forlag: A La Librarie Illustree
Sted: Paris
Sider: 324
UDK: St.f. 061.4(100)Paris
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78
L’EXPOSITION DE PARIS
LES EXPOSITIONS UNIVERSELLES
D’AUTREFOIS
(Suite.')
11
LA FOIRE SAINT-GERMAIN
La foire Saint-Germain qui, avec la
foire Saint-Laurent et la Foire Saint-
Ovide, joua un si grand rôle dans l’exis-
tence de nos pères, fut, après les Halles,
le premier embryon de nos Expositions
universelles
1. La foire Saint-Germain, on )e sait, se tenait à la
place où est maintenant le marché Saint-Germain.
A cette place s’était élevéjadis, au milieu des vignes,
un palais habité par Philippe le Bon et par Charles le
Mauvais.
Dès 1486, les religieux de l’abbaye Saint-Germain,
auxquels le terrain avait été cédé, avaient fait cons-
truire cent quarante loges, qu’on remplaça en 1511 par
une construction couverte très hardie que tous les
contemporains s’accordent à citer comme une mer-
veille. C’était un vaste bâtiment divisé eu deux halles
qui ne constituaient qu’une seule et même enceinte.
Ges halles avaient cent trente pas de longueur sur cent
de largeur. Les loges qui bordaient les rues se compo-
saient. d'une boutique au rez-de-chaussée et d’une
chambre au-dessus.
Les bâtiments, détruits par un incendie en 1762, fu-
rent rebâtis la même année.
La foire Saint-Laurent se tenait, comme la foire
Saint-Germain, sur un territoire religieux. L’autorisa-
tion avait été accordée par Louis le Gros aux religieux
<le Saint-Lazare. L’aspect de la foire au siècle dernier
était à peu près le même que l’aspect do la foire Saint-
Germain, sauf que l’une était couverte et que l’autre
ne l’était plus depuis le commencement du xvni' siècle,
où l’on avait trouvé plus gai delà diviser par des allées
plantées de marronniers. Ôn y rencontrait des bateleurs,
des jeux divers, des salles de bal et la même foule
bigarrée et diverse, réunie par le désir de s’amuser.
Dés 1664, le gazetier Loret avait tracé de cette foire
un tableau qui fut ressemblant jusqu'à la fin.
Quatre assez spacieuses halles
Où les marchandes, les.marchands,
Tant de la ville que des champs,
Contre le soleil et l’orage.
Avaient le couvert et l’ombrage.
Outre les animaux sauvages,
Outre cent et cent balelages,
Les fagotins et les guenons,
Les mignonnes et les mignons,
On voit un certain habile homme,
Je ne sais comment il se nomma,
Dont le travail industrieux
Fait voir à tous les curieux,
Non pas la figure d’Hérode,
Mais le grand colosse de Rhodes,
Qu'à faire on a bien du temps mis :
Les hauts murs de Sémiramis,
Oû celle reine fait la ronde :
Bref, les sept merveilles du monde,
Dont, très bien, les yeux sont surpris.
Le tout se voit à justa prix.
Le Voyageur fidèle ou « le guide des étrangers dans
la ville de Paris, qui enseigne tout ce qu'il y a de plus
curieux à voir et dont le prix est de quarante-cinq
sols », nous donne également une description enthou-
siaste de la foire Saint-Laurent.
« C'était au commencement du mois d’août, que les
jours sont fort, longs et que la foire Saint-Laurent est
ouverte : nous n’y avions pas encore été, c’est ce qui
nous détermina d’en faire la partie. Nous primes le
boulevard pour y aller et passâmes sous la porte Saint-
Martin.
« Cette foire est fort ancienne, puisqu’elle doit son
établissement à Philippe-Auguste, qui en gratifia les
religieux de Saint-Lazare. C’est aujourd'hui les Pères do
la Mission qui en jouissent.
« Ces Pères ont fait beaucoup de dépenses pour la
construction des loges qu’on y voit distribuées par rues
ornées de marrons d’Inde plantés en allées. Ces loges
sont autant de boutiques occupées par des marchands
qui vendent diverses sortes de marchandises. Les caffés
y sont magnifiques, tant par les illuminations qui les
éçlairent que par la propreté des meubles dont ils
sont ornés.
« Rien ne manque à cette place pour y goûter le
plaisir qu on souhaite : spectacles agréables, bons
cabarets, liqueurs excellentes, riches ameublements et
belles femmes ; tout cela y attire une grande affluence
de peuple de tout état. »
La foire Saint-Laurent mourut de consomption à la
fin du xviif siècle, ruinée par le voisinage du boule-
vard qui lui soutirait tous ses clients. Voyez pour
Nous sommes un pou portés à ne regar-
der exclusivement de celle foire que
l’aspect superficiel, folâtre, pittoresque.
Ce côté, à coup sûr, est du plus haut
intérêt pour étudier la physionomie de
l'ancien Paris. On aime à se figurer cette
éblouissante cohue où les grands sei-
gneurs, les grandes dames, les bour-
geoises, les courtisanes, les gens du
peuple se coudoyaient, se pressaient, se
heurtaient attirés par les curiosités do
toutes sortes. 11 semble revoir ces maga-
sins innombrables, ces cafés éclatants, ce
monde de danseurs de corde, de faiseurs
de tours sollicitant de toutes parts l’atten-
tion de la foule qui se donnait rendez-
vous en cette kermesse joyeuse. On suit
avec intérêt les luttes perpétuelles que cos
théâtres forains, qui portèrent des noms
célèbres depuis : théâtre des Varié-
tés, de l'Ambigu-Comique, théâtre des
Grands- Danseurs et des Associés, eurent
à soutenir contre leurs puissants rivaux,
la Comédie-Française et l’Académie de
Musique. L'une leur interdisait de par-
ler, l’aulre leur défendait de chanter. Et
c’étaient, pour éluder des prohibitions for-
melles, les artifices les plus ingénieux et
les subterfuges les plus amusants qui
rappellent un peu les biais imaginés na-
guère par les cafés-concerts. Tantôt un
acteur, seul en scène, dialoguait avec
un acteur resté dans la coulisse, tantôt
on mettait bien deux acteurs en scène,
mais un seul ouvrait la bouche, l’autre se
contentait de s’exprimer par gestes. Une
autre fois, des écriteaux qu'on montrait
au public expliquaient ce qu’on ne pou-
vait dire et faisaient comprendre aux
spectateurs l’enchaînement de l’intrigue
cl les péripéties de la pièce.
Evidemment ces éléments contribuè-
rent puissamment à la vogue qu’eut la
foire Saint-Germain pendant tic longues
années, mais ils ne constituaient que
l’accessoire, le décor, l’attrait du plaisir
se greffant sur une institution essentiel-
lement sérieuse.
Entourée de murailles, divisée d’après
un ordre méthodique, minutieusement
surveillée, la foire Saint-Germain fut une
véritable exposition, le lieu unique où
I on était sûr de trouver les derniers per-
fectionnements apportés par chaque corps
d’état dans son industrie spéciale, le
rendez-vous annuel où les pays étrangers
l’histoire de cette foire le charmant et très intéressant
volume publié par M. Arthur Heulhard.
La gare du chemin de fer de l’Est ne donne guère
l’idée de l’ancienne foire Saint Laurent dont elle occupe
la place ; Ja foire Sainte-Ovide étonnerait davantage
sur la place Vendôme si les échoppes et les baraques
d’autrefois reparaissaient tout à coup dans ce cadre
d’hôtels superbes et de maisons magnifiques.
En 1771, la foire Saint-Ovide fut transportée place
Louis XV, où elle ne retrouva pas la vogue qu’elle
avait place Vendôme, tant la place Louis XV. ce lieu
si passager aujourd’hui, était en ce temps-là éloignée
du mouvement parisien.
envoyaient ce qu’ils avaient de plus par-
fait et de plus recherché. Une ancienne
gravure populaire, d'une extrême rareté,
mais reproduite en réduction dans le
volume dos publications de la Ville
consacré au faubourg Saint-Germain,
nous montre, dans sa physionomie sé-
rieuse, cette foire que nous sommes
habitués à considérer surtout au point de
vue fantaisiste et mondain. C’est une page
de l’histoire du travail qui vient s’ajouter
à une chronique galante.
Cette distribution intérieure, en effet,
est le pendant ou plutôt le modèle de la
division par groupes, adoptée par la
commission de l’Exposition de 1878 et de
1889. Elle place, en quelque sorte sous
nos yeux, un résumé de l’industrie d'au-
trefois, et surtout elle en indique bien les
classifications diverses. L’estampe, sans
date, est de la première moitié du
xvii° siècle. Voici l’ordre dans lequel se
présentent les pavillons, en remontant
successivement chaque galerie do gauche
à droite :
lre Galerie.
Pavillon 1. Chapeliers. — Parcbeminiers. —
Chiens de Bologne — Papetiers. — Car-
tonniers.
Pavillon 2. Perruquiers. — Chaudronniers. —
Mlls de Calottes. — Mds de Marroquins.
Pavillon 3. Corroyeurs etCuratiers. — Coffre,
tiers. — Boettiers. — Instruments de musi-
que.
Pavillon 4. Fourbisseurs. — Arquebusiers.
— Serruriers. — Armuriers.
PavillonS. Graveurs en cachet. — Lanterniers.
— Esperonniers. —Mlls de Saint-Claude.
2e Galerie.
Pavillon 1. llebenistes et Affiquets. — Mar-
chandises de la Chine. —Mds de Miroirs et de
Lunettes. — Mds Gantiers et Parfumeurs.
Pavillon 2. Mds de Dentelles de filet. — Fustai-
niers. — Lingers. — Toiliers.
Pavillon 3. Mds d’Angleterre. — Mdsde Flandre.
— M‘ls d'Hollande. — Mlls d’Allemagne.
Pavillon 4. Mds de bas de laine. — Plumassiers.
— Espingliers. — Drapiers.
Pavillon 5. Chirurgiens. — Barbiers. — Clou-
tiers. — Fondeurs.
3e Galerie.
Pavillon 1. M'ls Potiers et vaisselle d’estain. —
Chandeliers. — Mds Ciergiers et Vannetiers.
— Ferratiers.
Pavillon 2. Change pour leRoy. — Ilorlogeurs.
— Joailliers. — Orphevrie.
Pavillon 3. Mds3e Dentelles d’or et d’argent. —
M,is de Rubans. — Mds Merciers. — Ml,s de
soye.
Pavillon 4. Tableaux à la détrempe. — Mds de
tailles douces. — Tableaux à l’huile. —
Mds libraires.
Pavillon 5. Passementiers. — Bimbelotiers. —
Botonniers. — Indiennes.
1. Les chiens de Bologne étaient alors les chiens à
la mode, les chiens que les petites maîtresses gâtaient
à l’envi. Ils avaient dans le monde l’importance qu’ont
eue tour à tour, selon les caprices changeants, les
King-Charles, les carlins et les havanais.