L'exposition De Paris 1889
Premier & deuxième volumes réunis
År: 1889
Forlag: A La Librarie Illustree
Sted: Paris
Sider: 324
UDK: St.f. 061.4(100)Paris
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S
O
L’EXPOSITION DE PARIS
L’EXPOSITION ALGÉRIENNE
A L’ESPLANADE DES INVALIDES
Un des mérites de l’Exposition univer-
selle — qûi en a tant ! — sera de présen-
ter sous leur jour réel des manifestations
artistiques dont les gravures, les aqua-
relles, les tableaux, les photographies ne
peuvent donner qu’une impression indé-
cise et souvent même inexacte.
Le public, en somme, n’a pas de parti
pris pour ou contre telle ou telle école.
Sa vision a été faussée, son éducation so-
phistiquée, mais il y a heureusement en
lui un gros bon sons qui réagit contre
les théories mesquines dont il a été sa-
turé et qui le pousse d’instinct vers ce
qui est beau, sans qu’il cherche d’ailleurs
à analyser ses sentiments et ses préfé-
rences.
Les constructions élevées à l’Esplanade
des Invalides, sur la partie réservée aux
Colonies, l’ont ravi; le fait n’est pas
niable. Il n’ergote pas, il ne se lance pas
dans d’interminables discussions sur l’es-
thétique ; il se contente d’admirer bouche
béante, un peu étonné seulement de ne
pas connaître un style — tel que le mau-
resque, par exemple — dont l’ensemble
lui parait autrement joli et amusant que
l’IIôtel des Postes, la gare Saint-Lazare,
l’Ecole de Médecine, le Muséum du Jar-
din des Plantes, et autres casernes offi-
cielles dont les murailles sinistres dis-
tillent le pédantisme, la morgue, l’ennui
et l’impuissance.
Les organisateurs de cette partie de
l’Exposition ont donc coopéré — sans
s’en douter, peut-être — à une excellente
besogne, en mettant sous les yeux de la
foule des œuvres pleines de charme,
de grâce et d’originalité qui attestent la
fécondité et la diversité de l’esprit hu-
main, et qui prouvent jusqu’à l’évidence
qu'uno époque ni un peuple ne possèdent
seuls le monopole do la beauté. En réa-
lité — en agrandissant et en vivifiant le
cadre — c’est l’idée de Viollet-le-Duc,
qui avait essayé de réagir contre l’en-
vahissement toujours croissant du néo-
grec, en créant ce remarquable musée
du Trocadéro, où l'on trouve, moulés sur
les originaux, des fragments entiers des
chefs-d’œuvre dont la France regorge.
Le mépris que l’on professe à l’Ècolo
des Beaux-Arts, non seulement pour
noire architecture nationale, niais — en
bloc — pour lotit ce qui n’est ni grec, ni
romain, tout au moins du temps de la
renaissance italienne, limite à un cercle
extrêmement étroit l’éducation des archi-
tectes. Aussi, lorsqu’on décida l’instal-
lation à l’Exposition universelle d’un
pavillon algérien, le gouvernement fut-il
forcé, bon. gré, malgré, d’aller chercher
des artistes possédant à fond ce merveil-
leux stylo arabe que les grands prix de
Rome n’ont pu étudier à la Villa Médicis,
en restaurant les nombreuses et sempi-
ternelles ruines antiques de la Grèce et
de l’Italie.
Ces merles blancs n’étaient pas faciles
à dénicher, car il est fort restreint le
nombre des architectes qui ont l’indé-
pendance d’admirer un chef-d’œuvre
quelle que soit son origine et le courage
de reconstituer un monument conçu
autrefois par un do ces Maures que « nos
maîtres » traitent familièrement de sau-
vages. En s’adressant à MM. Albert Ballu
et Marquette, le ministre des Colonies ne
pouvait faire un meilleur choix, car le
premier a passé cinq ans de sa vie en
Afrique à relever les principaux spéci-
mens de l’architecture arabe, et le second
est, depuis longtemps, inspecteur au
diocèse d’Alger.
Le Palais est situé près de la porte du
Ministère des Affaires Étrangères, à
l’entrée de l’Esplanade des Invalides,
à gauche, on tournant le dos à la Seine.
Presque contre l’avenue centrale, se
trouvent les bazars qui précèdent le Palais
proprement dit et où sont installés, sous
un charmant portique flanqué de deux
coupoles, les industriels indigènes vêtus
du pittoresque costume national. L’exubé-
rante végétation africaine encadre à ravir
les constructions et accentue l’impla-
cabilité violente du crépi blanc des
murs.
Entrons dans le pavillon.
Du vestibule qui s’ouvre, au nord, sur
le quai et, à l’ouest, sur l’avenue centrale,
on pénètre dans une galerie conduisant à
un salon d’honneur décoré avec les raffi-
nements d’élégance fastueuse de l’Orient.
Cette galerie donne accès à trois salles
d’exposition consacrées aux trois dépar-
tements de notre colonie : Alger, Oran et
Constantine, et à trois autres pièces do
dimensions plus restreintes et disposées
pour l’exportation des vins dont le com-
merce prend de jour en jour plus
d’extension sur la côte africaine.
La façade regardant le fleuve est sil-
houettée d’un minaret qui est la fidèle
reproduction de la Zaouia de Sidi-Àbd-er-
Rliainan. C’est du sommet de cette tour
que le muezzin appelle les fidèles à la
prière et hisse le drapeau qui annonce aux
Musulmans le commencement du Rama-
dan.
A côté se trouve un porche à trois ar-
cades, porche dont le plafond est imité de
celui de la Musquée de la Pêcherie. Quant
à la grande coupole du vestibule, c’est
celle do laKoubade Sidi-Abd-er-Rhaman,
reproduite avec la même exactitude que
l’escalier qui est celui du musée d’Alger,
et qui conduit à deux loggias, traitées de
façons différentes et avec des encorbelle-
ments particuliers à l’architecture algé-
rienne. Je recommande spécialement aux
délicats celle qui est tournée du côté du
Pavillon des Postes et Télégraphes —
qu’on n’est d’ailleurs pas obligé de regar-
der ; — c’est une petite merveille de pro-
portion et d’esprit.
La grande galerie contient la carte de
l’Algérie, des modèles de paquebots, des
sculptures romaines et des minéraux. Les
arcadesqui la décorent reproduisent celles
de la galerie du musée d’Alger ; le plafond
et la coupole du salon officiel ont été em-
pruntés à l’architecture de cette jnême
ville.
Une troisième façade, quoique de moin-
dre importance, n’est pas moins intéres-
sante : c’est celle qui avoisine la Tunisie.
Le pittoresque auvent et la porte, dont la
mouluration est si délicate, proviennent
de ce musée d’Alger, où l’on peut puiser
sans crainte d’en tarir la source généreuse
et pure.
Les pi’oportions sont identiquement les
mêmes que celles des monuments copiés,
mais, dans certaines parties — pour le
minaret, entre autres — l’échelle a été
agrandie. Il y avait là une première diffi-
culté qui exigeait des constructeurs une
délicatesse de main toute spéciale, afin
de ne pas modifier l’impression générale
de cet art un peu intime ; de plus,
MM. Albert Ballu et Marquette ont tenté
et exécuté un tour de force dont le public
ne se doute pas, et sur lequel il est juste
d’attirer l’attention.
Ces messieurs ont voulu grouper, dans
l’édifice qu’ils avaient à construire, les
différents types de l’architecture arabe,
afin d’en présenter, pour ainsi dire, toute
l’essence. Sans nuire le moins du monde
à l’ensemble, sans que, l’œil puisse deviner
les soudures, ils ont su accoler différents
morceaux d’époques fort éloignées entre
elles. Ainsi le Minaret et la Kouba de Si li-
Abd-cr-Rhaman remontent au xme siècle;
la Mosquée de la Pêcherie Djama-el-Dje-
did, qui a inspiré certaines parties du
palais, date du xvie siècle ; le musée
d’Alger est du xviiie, et le porche d’entrée,
qui est la reproduction du tombeau du
dernier dey d’Alger, est moderne.
Poussant aussi loin que possible le res-
pect de la vérité, les architectes ont tenu à
n’employer — à de rares exceptions près
— que l’architecture algérienne, archi-
tecture spéciale, très particulière au pays,
mais non autochtone, dans le sens rigou-
reux du mot, car elle est le mélange
hybride de l’art arabe et de l’art italien.
Le style arabe pur n’est, en somme, repré-
senté que par les plafonds du vestibule et