L'exposition De Paris 1889
Premier & deuxième volumes réunis
År: 1889
Forlag: A La Librarie Illustree
Sted: Paris
Sider: 324
UDK: St.f. 061.4(100)Paris
Søgning i bogen
Den bedste måde at søge i bogen er ved at downloade PDF'en og søge i den.
Derved får du fremhævet ordene visuelt direkte på billedet af siden.
Digitaliseret bog
Bogens tekst er maskinlæst, så der kan være en del fejl og mangler.
166
L’EXPOSITION DE PARIS
était en 1878. Ce sont les mêmes cory-
phées, les mêmes vétérans, qui occupent
la scène. En tète vient l’illustre John
Everett Millais, qui nous a envoyé six
œuvres de marque. Comme peintre de
genre, 31. Alillais me laisse, je l’avoue,
assez froid. Devant ses Cerises mûres,
(lovant sa Dernière rose de VÉtè, ses
Bulles et sa Cinderella, qui semblent
faites pour la gravure, je pense, en
soupirant, à Gainsborough et à Rey-
nolds; mais son Portrait de Gladstone
nie semble un véritable chef-d’œuvre,
digne en tous points de l’immense ré-
putation de l’artiste.
M. Alma-Tadéma n’a rien peint de
plus gracieux, de plus vibrant, do plus
frais et de plus subtil, que le tableau où il
nous représente Sommeil des Ménades
àAmphissa; seène charmante emprun-
tée au Daniel Deronda de George
Elliot.
M. Ilerkomer connaît à merveille l’art
de peindre les « professionnal beautics » ;
il sait assaisonner ses portraits de femmes
de ce parfum discret de poésie qui plaît
si fort aux âmes tendres. Et, de fait, les
suffrages de nos mondaines se sont portés j
à l’envi sur ces deux élégantes représen-
tations de la beauté anglaise, l’une en
blanc, l’autre en noir. Inclinons-nous
devant le succès sans le discuter.
Les tendances caractéristiques de l’é-
cole d outre-Manche se retrouvent au
plus haut point dans les toiles de M. Or-
chardson. La prédominance des tons
ambrés y joue, comme clans les vieux
tableaux, un rôle harmonique très parti-
culier. Tandis qu’en France nous nous
efforçons de décrasser la palette roman-
tique en évoluant, depuis Corot, vers les
tons clairs, vers la gamme des gris, en
Angleterre le goût public reste fidèlement
attaché aux séductions un peu artificielles
du bitume et des ocres. Le Menuet de
M. Orchardson est une charmante com-
position, d’essence très anglaise ; je lui
préfère cependant le beau tableau de
Master Baby, où le peintre, avec une
tendresse de pinceau qu’on devine pater-
nelle, nous montre une jeune femme
penchée vers son bébé qui s’ébat, tout
nu, sur un large canapé. Je ne crois pas
me tromper en tenant celte forte et
expressive peinture pour l’œuvre maî-
tresse de M. Orchardson.
De même, M. Ouless n’a rien peint de
plus significatif, de plus sérieux et de
plus vivant, que le Portrait du cardinal
Manning, — c est un digne pendant de
son Darwin, — ni M. Shannon de plus
élégant, de plus aristocratique, au sens
anglais, que le grand portrait de M. Henry
Vigne, « grand maître des lévriers de la
Forêt d’Epping ».
L’école des préraphaélites est toujours
pleine de sève. Nous la voyons ici repré-
sentée par son chef incontesté, M. Burnc-
Jones, qui nous a honorés d’une de ses
œuvres les plus importantes et les plus
admirées : Le Roi Cophetua et la jeune
/ille pauvre. La figure du roi, agenouillé,
en armure, est d’une intensité de cou-
leur, d’un stylo et d’un relief véritablement
extraordinaires ; Mantegna l’eût signée.
Tout le talent, je dirais même tout le
génie de M. Burne-Jones, est dans cette
puissante création, qui est une des grandes
curiosités des salles anglaises. Nous
n avons ni Dante-Gabriel Rossetti, le
poète exquis et rare, dont les œuvres
sont classées aujourd’hui dans les musées
et dans les plus hautes collections de
l’Angleterre, ni M. Holman Hunt, l’apôtre
le plus actif du mouvement ; mais nous
avons M. Walter Crâne, qui est représenté
par la Belle Dame sans merci, et par de
délicieux dessins pour les Grimmïs
Household Stories et les Sirens Three •
nous avons surtout l’artiste le plus origi-
nal de toute l’école anglaise, M. Watts,
qui n’a pas envoyé moins de huit toiles.
C’est plus qu’il n’en faut pour faire con-
naître cet art aigu, ce sentiment, étrange,
un pou tourmenté, qui font de chacune
des créations de M. Watts une sorte de
problème inquiétant qui se pose devant
le spectateur comme un point d’interro-
gation. Je détache de cet ensemble la
figure de XEspèrance, dont le caractère
énigmatique et la grâce touchante nous
révèlent si complètement la poétique de
l’artiste.
Je me reprocherais de quitter la section
anglaise sans accorder une brève men-
tion à M. Forbes, qui est un des jeunes
peintres d’avenir de la Grande-Bretagne,
propagateur dans son pays des tendances
modernistes du Continent ; à M. Wyllie,
qui est un mariniste hors de pair, peintre
de race et de tempérament ; à M. Fildes,
à M. Parsons et aux eaux-fortes de
M. Macbeth.
En suivant l’ordre du plan, nous tom-
bons de l’Angleterre dans les salles de
l’Autriche-Hongrie. La chute est lourde.
Il semble qu’après les blonds et cares-
sants effluves de l’atmosphère anglaise,
nous entrions dans le laboratoire d’un
alchimiste. L’influence déplorable du
peintre Mackart se fait encore sentir sur
une école dont les tendances sont par
essence tout à fait indécises. Ce n’est
certes pas le talent qui manque, ni le
tempérament décoratif ; la peinture d’his-
toire, ce qu’on est convenu d’appeler la
grande peinture, est représentée dans
cette section par des adeptes éminents,
voire célèbres, comme MM. Muakacsy,
Matejko, Brozik, Vacslav Sachor et de
Payer; par des portraitistes délicats
comme M. Lehmann, et des peintres de
genre fort adroits comme M. Charlemont.
Ce qui manque surtout à la peinture autri-
chienne, c’est le sentiment du vrai,
l’amour du naturel, le. goût de la simpli-
cité. La recherche des qualités, qui sont
l'essence éternelle de l’art, nous les ren-
controns en partie chez M. Chelmonski,
qui est de Varsovie et appartient, en
réalité, comme M. Pranishnikoff et Marie
Bashkirsheff, à l’école slave.
La section russe n’a, d’ailleurs, rien qui
mérite de nous retenir, surtout si on en
écarte, pour le rattacher à la Suède, le
groupe finlandais, c’est-à-dire Edelfeldt,
Axel Gallon et Damelson.
Traversons les salles de l’Italie, non
sans avoir salué en M. Boldini un des
praticiens les plus habiles de notre temps,
un portraitiste de haute valeur, témoin le
Portrait de Verdi, et constaté avec éton-
nement que ce peuple qui passe pour
avoir tant d’esprit enmanque si singuliè-
rement dans sa peinture ; inclinons-nous,
en Espagne, avec la déférence qui
convient, devant les grandes toiles histo-
riques, pompeuses, truculentes et maca-
bres, de MAI. Munoz Degrain, Hidalgo,
Sala, Moreno Carbonero, Casado, Luna,
Alvarez etPradilla ; accordons, enpassant,
un regard aux jolis coins pittoresques qui
scintillent dans les tableaux de MM. Rico
et Domingo, et hâtons le pas.
Voici la salle où se sont groupés, de leur
initiative privée, quelques artistes do
l’Allemagne : MM. Menzel, Leibi, Paul
Hoeckers, Meyerheim, do Uhde, Claus
Meyr, Liebermann, Kuehl, Kæpping le
graveur et Oberlaender le caricaturiste.
11 ne manque à cette remarquable réunion
que M. Lembach pour présenter un
raccourci à peu près complet de la partie
la plus saine et la plus vivace de l’école
allemande. L’aspect de cotte salle est
excellent ; les œuvres sont bien présentées
et font éprouver à ceux qui no s’arrêtent
pas aux rudesses de l’enveloppe une
sensation forte et grave, dont il serait
maladroit de méconnaître la portée. Je
mets hors de pair, par reconnaissance
pour le plaisir que le tableau, que je ne
connaissais pas, m’a fait éprouver, la
Procession de la Fête-Dieu de M. de
Uhde. Il convient de tenir M. de Uhde
pour le premier peintre de rAlleniagne,
après M. Menzel, bien entendu. Mais
M. Menzel appartient au passé elle jeune
maître de Munich représente l’avenir.
Je voudrais m’arrêter là et éviter ces
salles du premier étage où règne une
chaleur à laquelle succombent les plus
vaillants. A la rigueur, je puis passer
sous silence la Suisse, qui se résume en
MM. Charles Giron et Burnand; les