L'exposition De Paris 1889
Premier & deuxième volumes réunis
År: 1889
Forlag: A La Librarie Illustree
Sted: Paris
Sider: 324
UDK: St.f. 061.4(100)Paris
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L’EXPOSITION DE PARIS
LE MATÉRIEL DE GUERRE
DES USINES DU CREUSOT
On sait quelle célébrité se sont acquise
les usines du Creusot. Leur renommée
est universelle ; leur puissance de pro-
duction, énorme : elles comprennent, au
dire des Américains, la plus vaste aciérie
du monde. (At no other place in the
world is steel håndled in such masses.')
Ce qu’on ignore généralement, ce qui
sera peut-être pour le lecteur un sujet do
surprise, c’est que, à ne parler ici que
de fabrication de matériel de guerre, le
Creusot compte plus d’un siècle d’exis-
tence ; qu’il est, depuis sept ans déjà, en
droit de fêter son centenaire. C’est à 1782,
en effet, que remonte la création de sa
« Fonderie de canons ».
Placé sous le patronage de Louis XVI,
qui en fut un des principaux action-
naires, le nouvel établissement d’artillerie
prit des accroissements rapides et sut
bientôt rendre au pays de signalés ser-
vices._
Durant toute la période des guerres de
la Révolution et du premier Empire, il
fut occupé sans relâche à fabriquer des
canons de fonte et de bronze ainsi qu’une
quantité de projectiles qui, bien que con-
sidérable, avait encoi’e peine à suffire aux
besoins, alors incessants, de nos armées
de terre, et do mer.
A la paix, naturellement, cet ordre de
travaux fut brusquement interrompu.
L’État crut devoir reprendre des attribu-
tions dont il s’était un moment dessaisi
et, de 1815 à 1870, la construction des
bouches à feu fut à peu près monopo-
lisée par nos grands établissements mi-
litaires.
Vint la sinistre guerre de 1870-71 au
cours de laquelle lo gouvernement de la
Défense nationale, pris de court, fut bien
obligé de solliciter le concours de l’in-
dustrie privée. Le Creusot s’empressa de
répondre à l’appel; M. Eugène Schneider
sut improviser un outillage et, en moins
de cinq mois, livrer au gouvernement :
23 batteries de 7, système de Reffye, cri
bronze; — 2 batteries même système, en
acier; — 16 batteries de mitrailleuses,
aussi du système de Reffye ; — soit, au
total, deux cent cinquante bouches à feu.
Cette livraison était accompagnée de
celle des affûts, avant-trains et cais-
sons nécessaires, ensemble trois cent
soixante-dix voitures.
Au lendemain de la guerre, M. Thiers
avait ou la pensée d’instituer une grande
usine nationale qui eût été appelée à tenir
en France le rôle dévolu en Allemagne à
la fameuse usine Krupp et il avait, à cet
effet, jeté les yeux sur la maison Schneider
et C“. Dans cet ordre d’idées, le Creusot
fût devenu le rival d’Essen. Pour des rai-
sons qu’il serait hors de propos de déve-
lopper ici, il ne fut pas donné suite au
projet de M. Thiers.
Toutefois, c’est au Creusot que, à par-
tir de 1872, furent entreprises les expé-
riences prescrites par le gouvernement
français, on vue de jeter les bases du
meilleur mode do production des « aciers
à canons » ; de déterminer exactement
les conditions auxquelles ces aciers de-
vaient satisfaire. A ce sujet, une commis-
sion instituée ad hoc fit, en 1874, un rap-
port dont voici le préambule :
« Les puissants moyens d’action du
Creusot dont les produits jouissent d’une
réputation européenne, les ressources
qu’il possède non seulement au point do
vue do la production du métal, mais
encore comme Ateliers de construction,
augmentaient l'intérêt .des essais qu’il
allait entreprendre. Poursuivis avec mé-
thode et persévérance, ces essais ont
pris, au Creusot, une importance excep-
tionnelle... »
Et les conclusions du rapport sont
celles-ci :
« Éviter, d’une part, les brusques
éclatements ; de l’autre, les trop promptes
déformations qui rendent l’emploi du
bronze incompatible avec les exigences
de Farlillerie moderne, tel était le double
but que M. Eugène Schneider s’était
proposé et qu’il a incontestablement
atteint. »
Ce sont les enseignements tirés des
résultats de ces expériences qui ont
permis à l’État <lc tracer la ligne de con-
duite à observer enmatièrede fabrication.
C’est du Creusot que sont sortis les pre-
miers canons de 80 et de 90 millimètres,
de campagne, système de Bange ; — les
spécimens de divers autres types de 90
et 95 qui n étaient point destinés à devenir
réglementaires ; — des mortiers de 220
et 270, aussi du système de Bange.
Cependant cet homme de génie qui avait
nom Eugène Schneider comprenait que,
pour forger des éléments de canons de
gros calibre, il ne suffisait pas d’employer
une main-d’œuvre ordinaire ; que le
temps n était plus où l’on pouvait se con-
tenter du travail de ces robustes forge-
rons.
Dont les bras vigoureux lèvent de lourds marteaux
Qui tombent en cadence et domptent les métaux.
11 se disait que les marteaux-pilons à
vapeur 1 dont était outillée sa Forge se
trouvaient même insuffisants Alors,
d’un seul coup, sans transition, avec une
hardiesse dont le succès a consacré le
mérite éclatant, M. Eugène Schneider fit
construire et monter un marteau-pilon
de 100 tonnes et »le 5 mètres de chute,
desservi par quatre fours et quatre
grues.
Une des merveilles du monde!... di-
sent les Américains : The \M-ton ham-
mer... not equalled in the world... the
largest in the world!...
Dès lors, moyennant le prix de cc mar-
teau cyclopéen, de ce géant capable d’un
travail de cinq cent mille kilogrammê-
tres le Creusot fut mis à même de forger
d’énormes lingots, d’en éliminer les élé-
ments douteux, de n’en utiliser que les
parties absolument saines. Ce précieux
résultat, si intelligemment obtenu, allait
faire époque dans les annales de l’in-
dustrie française.
Cc chef-d’œuvre d Eugène Schneider
était malheureusement le dernier des
grands travaux qu’il devait lui être donné
d’accomplir.
Depuis sa mort advenue en 1875,
M. Henri Schneider, sonfils, a marché non
sans succès on avant dans la glorieuse
carrière qui lui était ouverte. Jaloux do
1 honneur de continuer dignement celui
qui n’étaitplus, il s’est efforcé d’accroitre
1 importance des usines du Creusot. The
proportions of the establishment hâve
been much increased, disent les Améri-
cains. C’est, en effet, à son initiative
qu’est duc l’organisation des nouveaux
Ateliers d’artillerie dont nous allons
donner une description sommaire.
Disons d’abord ce que, en fait de ma-
tériel d’artillerie, le Creusot a produit de
187,) jusqu à cc jour. Au cours de cet in-
tervalle de temps, M. Schneider a livré
en Franco, à de terre : 336
canons, dont 12 de 240 millimètres,com-
plètement usinés, et les éléments d’acier
correspondant à l’usinage de 4,829 autres
canons, ensemble 5,165 bouches à feu ;
— à VArtillerie de la marine : les
cléments de 500 canons de gros calibre ;
— aux deux services pris ensemble :
2,118 affûts métalliques.
Le Creusot a fourni d’autre part : à
1 Espagne, 24 canons Ilontoria et tous
1. Le premier marteau-pilon à vapeur qui ait été
construit — en 1842 — est l’œuvre de Bourdon, alors
ingénieur en chef des usines du Creusot.
2. En 1874, le martelage des lingots se faisait encore
sous un marteau-pilon de 14 tonnes, le plus puissant
que possédât alors M. Schneider.