L'exposition De Paris 1889
Premier & deuxième volumes réunis
År: 1889
Forlag: A La Librarie Illustree
Sted: Paris
Sider: 324
UDK: St.f. 061.4(100)Paris
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L’EXPOSITION DE PARIS
315
que les tabacs de nos manufactures na-
tionales ne sont soumis à aucun traite-
ment spécial en vue d’en corriger les
propriétés toxiques. La régie se borne à
surveiller et à diriger les cultures, à ache-
ter les feuilles, à les emmagasiner et à
les manipuler pour la vente. Quant à la
responsabilité matérielle et morale qui
lui incombe dans les effets physiologiques
du tabac, elle ne parait pas en avoir con-
science. On ne voit pas même qu’elle se
soit jamais préoccupée, soit dans le choix
des terrains de culture, soit dans le choix
des graines qu’elle recommande ou im-
pose à ses justiciables, d’obtenir des types
de, tabacs moins nuisibles que d’autres.
Très sincèrement, et l’on peut dire très
honnêtement, elle se préoccupe seule-
ment de livrer à l’acheteur des produits
de son goût, et, par ce moyen, faire mon-
ter les recettes de l’État. Le point de vue
financier est le sien. Cela se comprend,
à la rigueur, chez un gabelou. On a peine
à l’admettre chez un savant de profes-
sion.
11 ne s’agit point ici de refaire le pro-
cès du tabac. Tout le monde convient
que c’est une habitude malpropre, inutile
et sotte; mais tout le monde fume. Ce
qu’on peut en dire de plus favorable,
c’est qu’elle n’est pas dangereuse au
même degré pour tous les sujets. Chez
les uns, ellene produit pas de mal appa-
rent ou appréciable, alors qu’ailleurs elle
détermine des arrêts du cœur, des syn-
copes, des embolies, des carcinomes, des
cas nombreux d’ambliopie et d’amaurose,
la paralysie générale progressive, et sur-
tout celle forme particulière d’amnésie
qui rend tant de fumeurs incapables de
se rappeler les substantifs usuels et leur
impose l’abus des mots « chose » et «ma-
chine » pour désigner les objets les plus
familiers.
Ce qu’on ne sait pas assez et ce que la
régie française devrait être la première à
proclamer, c’est que les effets toxiques
du tabac sont toujours en raison directe
de la proportion de nicotine qu’il contient,
qu’il y a, sous ce rapport, des différences
profondes selon les variétés de feuilles.
Les tabacs du Levant, par exemple,
sont très pauvres en poison et souvent
même en sont tout à fait indemnes, alors
que nos tabacs indigènes doivent être
classés parmi les plus pernicieux. Un ci-
gare du Lot, un simple cigare d’un sou,
contient assez de nicotine pour tuer son
homme sur le coup, si cette nicotine était
absorbée directement. Il est difficile d’ad-
mettre que l’inspiration habituelle d’une
fumée chargée de ce poison puisse être
une pratique hygiénique.
Par contre, les tabacs de Turquie, de
Grèce et de Hongrie ne contiennent pas
trace de nicotine, ce qui explique leur
innocuité parfaite au point de vue de la
paralysie générale et des autres maladies
provoquées et développées par l’abus de
nos tabacs occidentaux.
Le moins que puisse faire un fumeur
avisé est donc do choisir de préférence
dos tabacs non toxiques, et c’est ce que
font instinctivement beaucoup de gens
en écartant les cigares trop noirs ou en
s’adonnant aux cigarettes turques. Il
semble que la régie se devrait à elle-
même de les aider dans cette sélection,
en leur signalant les meilleures sortes.
Pour donner une idée des diilerences
que présentent les diverses espèces, au
point de vue de la richesse en nicotine,
il suffit de dire que les tabacs du Levant,
de la Grèce et de la Hongrie en contien-
nent 0 0/0; les tabacs arabes, du Brésil,
de. la Havane et du Paraguay, 2 0/0 ; le
maryland, 2,29 0/0; les tabacs du Pas-
de-Calais, 4,99 0/0; du Kentucky,
6,09 0/0; d'Ille-et-Vilaine, 6,29 0 '0 ; du
Nord, 6,58 0/0; do Virginie. 6,87 0/0 ;
de Lot-et-Garonne, 7,34 0/0; du Lot,
7,96 0/0.
Devant un pareil tableau, comment se
refuser à voir que la régie française
commet tout simplement le crime d’em-
poisonnement public, en vendant des
tabacs du Lot et de Lot-et-Garonne de
préférence aux tabacs turcs ou grecs ? Ce
serait grave chez un négociant ordinaire ;
c’est impardonnable quand ce négociant
remplit un office public. Comprendrait-
on que l’État s’emparât du monopole des
alcools, comme le demande avec tant de
raison M. Alglave, et qu’au lieu de pren-
dre de bonnes eaux-de-vie, il reprit ùson
compte le triste, commerce des empoison-
neurs actuels? Or, c’est précisément cc
qu i! lait, le plus bénévolement du monde,
en matière de tabacs.
J’entends bien qu’il y a la raison fiscale
et qu’un budget obéré comme le nôtre ne
renonce pas aisément à 400 millions de
recettes ; aussi n’est-il point question d’y
renoncer. Mais où est la nécessité de
consacrer vingt mille hectares de bonnes
terres françaises à la culture du tabac,
quand il est acquis que ce tabac est dé-
testable pour la santé nationale ? Ne vau-
drait-il pas cent fois mieux, même au
point de vue financier, frapper les tabacs
non toxiques de droits plus élevés, mais
n en pas tolérer d autres sur l territoire,
ou, encore, ne mettre en venl îles tabacs
français qu’après les avoir débarrassés
de leurs alcaloïdes ? Le problème n’est
pas de ceux qui peuvent arrêter les chi-
mistes éminents que nous voyons à la
tète de nos manufactures. On doit trouver
surprenant qu’il n’inquiète pas leur con-
science professionnelle.
L’idée ne leur vient donc jamais qu’ils
collaborent quotidiennement à 1 abâtardis-
sement de notre noble race française et
qu’ils concourent à l’affaiblir et à la sté-
riliser? C’est pourtant chose bien évidente
pour quiconque arrête un instant sa pen-
sée sur ce triste sujet. On peut dire du
tabac ce qu’on voudra dans la pratique
personnelle : il est certain qu’au point de
vue ethnique ce facteur exerce une action
désastreuse sur la santé et sur la moralité
générales. La philanthropie de nos ingé-
nieurs, si active et si éclairée à beaucoup
d’égards, comme en témoigne le. Pavillon
des Tabacs, ferait donc bien de se porter
désormais sur ce pauvre pub ic, taillable
et corvéable, qui leur achète tous les ans
pour un demi-milliard de nicotine !
Il est à peine besoin d’indiqu: r los
mesures diverses qui pourraient au moins
atténuer le mal : rectification des tabacs
trop riches en poison; indication en
chiffres apparents du coefficient toxique
de chaque espèce ; interdiction pénale du
tabac aux enfants âgés de moins de seize
ans; expérimentation etmiseàl’essai des
succédanés du tabac usités dans les cinq
parties <!u monde...
On sait que, sur la machine ronde,
400 millions d'hommes fument l'opium et
ses composés, 300 millions le cannabis
et le haschich, 100 millions le bête et
26 millions lo coca ; sans parler du fon-
gus des Sibériens, du chanvre et des
feuilles variées que d'innombrables popu-
lations niellent clans leurs pipes. Tout
cela vaudrait au moins d’ètre essayé. Et
s'il faut absolument que nous fumions du
tabac, est-ce vraiment la peine de prépo-
ser à la vente les lauréats de nos grandes
écoles, pour que ce tabac reste le plus
malfaisant de funivers ?
Philippe Daryl.
LE PALAIS INDIEN
Au Champ de Mars, le long de l’avenue de
Suffren, la Compagnie des « Thés <le la Tour »
a fait élever un palais qui, par son ensemble,
ses détails et sa décoration, offre le plus grand
intérêt.
C’est un vaste édifice dont le plan a été des-
siné par M. C. Purdon, le Directeur des collec-
tions indiennes du Musée de South Kensington,
à Londres, et qui est la copie assez fidèle du
Palais de Panch Mahal, élevé en 1556, à Agra.
L’intérieur se compose d’un transept, supporté
par des colonnes dont l’architecture se rattache
à l’ai t bouddhiste et dont les originaux ornaient
le temple d’Ahmedabad à la fin du xv° siècle.
Au centre s’élève un dôme de proportions
très heureuses, bien que d’une forme légère-
ment aplatie; à droite et à gauche du dôme,
douze petites coupoles dominent le palais
jusqu’à ses deux extrémités. Une porte monu-
mentale, surmontée de deux minarets avec