Exposition Universelle Internationale De Bruxelles 1910,
Organe Officiel De L'exposition, Vol. II
Forfatter: E. Rossel
År: 1910
Sider: 500
UDK: St.f. 061.4(100)Bryssel
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L’EXPOSITION DE BRUXELLES
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NOS CARILLONS
« Ame des Flandres, on croit vous entendre
chanter, au haut de la tour, parmi le soleil
et les nuées ! » s’écrie Camille Lemonnier, alors
que les cloches du carillon de Bruges ébranlent
le Beffroi géant, sous leurs multiples et mélo-
dieuses harmonies. Et, vraiment, c’est bien l’âme
du peuple belge, tout entier, qui, dans la mu-
sique ailée des carillons, chante, en des hymnes
triomphants, les exploits des de Coninck et des
Artevelde ; scande des vieux Noëls flamands,
sous la clarté douce des étoiles ; fredonne des
lied oubliés, dans le rêve des crépuscules, ou
trouble le silence profond des nuits, par le rire
éclatant d’Uylenspiegel.
Et l’on peut dire avec raison que :
Du pays, toute l'histoire
Est écrite dans les chansons
Qu’exhalent les vieux carillons.
A Ypres, au Beffroi des halles, les accents
d’un nouveau carillon s’unissent à ceux de l’an-
cien, pour clamer les prouesses des communiers
flamands. Les voix des carillons s’emmêlent
aux fines dentelles de pierre du prestigieux
hotel de ville d’Audenarde, s’harmonisent avec
l’atmosphère religieux des nombreux couvents
de Saint-Trond et d’Enghien, égrènent leurs
vibrations mélodieuses sur les pignons des
vieilles petites demeures de Dixmude, de Nieu-
port, de Thielt, troublent le calme des soirs à
Saint-Nicolas, par ses bordées d’arpèges et,
dans la fraîcheur des matins, éveillent Courtrai,
au son martial des Eperons d’or qui tintent dans
leurs patriotiques fanfares.
Les airs vieillots réjouissant la ville d’Alost
nous rappellent que le premier carillon y naquit,
il y a près de cinq siècles.
Placés d’abord dans les Beffrois qui conte-
naient le sceau, les clefs et les chartes des villes,
en même temps que la cloche destinée à réunir
les bourgeois, les premiers carillons, d’abord
mécaniques, purent, un peu plus tard, être joués
à la main, et on les introduisit dans le clocher
des églises. Depuis, tous les grands carillons,,
bien que pourvus d’un mécanisme, peuvent aussi
être mus par un carillonneur qui, à coups de
pied et de poing, met en branle les claviers
dont chaque touche est reliée au battant d’une
des cloches au moyen d’un fil de fer ou d’une
corde.
Les villes de Turnhout et de Roulers ont,
chacune, un carillon assez important, car il
comporte trente-cinq cloches et la nouvelle
église Saint-Pierre, d’Ostende, est munie d’un
carillon moderne dont la mélopée lente des.
vagues accompagne les chansons clai-
res. A l’autre extrémité du pays, à
Verviers, tout près des Fagnes, un
carillon moderne, aussi de trente-cinq
cloches, a ete installé dans la tour restaurée
de l’ancienne église de Notre-Dame-des-Ré-
collets. Et aux heures où le tumulte enfiévré
de la ville industrielle s’apaise,
Verviers cueille, à son « Vieux Chêne»
Le rameau vert des cantilènes
Qu’il suspend au clocher rêveur
Liege, la capitale de la Wallonie, ne compte
pas moins de trois carillons. Et, de la cathédrale
de Saint-Paul, de l’église Saint-Barthélemy,
comme de l’ancien palais des Princes-Evêques,
chaque fois que l’heure sonne dans le silence
des nuits, leurs voix claires, dominant le clapotis
des eaux de la Meuse et le grondement sourd
des terrils flamboyants, s’unissent dans une mer-
veilleuse harmonie.
De Tournai, la fine gaieté pétille dans les
airs comiques jonglant au carillon frondeur,
et Mons eneage dans son « Château » un
carillon de trente-six cloches dont, comme le dit
Lemonnier dans sa Belgique, « les trilles allè-
gres se mêlent aux notes frétillantes de ces
autres oiseaux chanteurs : les rires de la jovia-
lité wallonne ». A Louvain, les sons argentins
du carillon de Sainte-Gertrude semblent les
douces prières des béguines répondant aux hym-
nes solennelles du carillon de l’église Saint-
Pierre.
A Bruxelles, ce joyau musical manque à l’écrin
somptueux que lui offre la tour de l’Hôtel de
ville ou la Maison du Roi, mais il semble que
le carillon se refuse au droit de cité dans notre
jolie capitale.
De 1622 à 1714, en effet, un carillon habita
la tour de l’église Saint-Nicolas, mais la tour
s’étant effondrée, le carillon ne fut point rem-
placé. Pourtant, Bruxelles possède un carillon,
remisé nous ne savons où, qu’on a essayé, à
différentes reprises, de loger dans la Maison du
Roi, mais ces tentatives ne furent pas heureuses,
ce monument n’étant pas assez élevé et les vibra-
tions du carillon lui étant renvoyées par les murs
de l’Hôtel de ville. Enfin, on a agité sérieu-
sement la question de son installation à la tour
de ce dernier, mais on a craint de la fatiguer
par un poids trop lourd et d’obstruer un de ses
étages, donc de violer ainsi les lois de l’esthé-
tique qui exigent que toute la flèche soit ajourée.
Et il est vraiment dommage que Bruxelles
manque de carillon, alors que la plupart de nos
petites villes sont égayées par leur musique
aérienne et que ceux de Bruges, de Gand,
d’Anvers, de Malines ont une réputation uni-
verselle. Le carillon de Bruges est chanté par
Longfellow, par Lemonnier, par Rodenbach qui
compare la mise en branle de sa sonnerie « au
feu d’artifice éclatant tout à coup dans l’air
pour s’éteindre peu à peu en une plainte douce
comme un soupir qui descend se perdre dans
les ondes des canaux endormis ».
A Gand, les débris de l’ancien carillon et de
la gigantesque Roelant qui clamait autrefois :
« Myn naem is Roelant, als ik klep, dan is ’t
brand ; als ik luyd, is ’t storm », ont été fon-
dus en un carillon Hemony et une Roelant
nouvelle qui ne s’ébranle qu’aux jours des
grandes fêtes.
Au carillon d'Anvers, dit Camille Lemonnier,
« on dirait qu’une nuée de musiciens invisibles
s’est pendue aux cordes, abattue sur le clavier
et éparpillée dans la tour pour la faire chan-
ter ».
Mais le carillon le plus remarquable du pays
est, sans contredit, celui de Malines. Trente-
cinq mille kilos de bronze ont été consacrés à sa
fabrication. En dehors de ses six cloches em-
ployées pour le service de l’église et dont
l’une pèse 8,146 kilos, le carillon est composé
de quarante-cinq cloches. Trente-deux d’entre
elles ont été coulées en 1674 par Pierre
Hemony, à Amsterdam, et les autres sont dues
a Van den Ghein, à Van Aerschot, à Steylaert,
a Dumery, à Waghevens. L’heure et ses subdi-
visions sont annoncées, aux Malinois, par un
jeu automatique appelé « rammel » et composé
d’un tambour en laiton où sont vissés des cro-