Exposition Universelle Internationale De Bruxelles 1910,
Organe Officiel De L'exposition, Vol. II
Forfatter: E. Rossel
År: 1910
Sider: 500
UDK: St.f. 061.4(100)Bryssel
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L’EXPOSITION DE BRUXELLES
sionomie humaine, à la faire vivre intensément,
à la placer dans le cadre qui lui était propre,
où elle pouvait acquérir toute sa puissance de
caractère ou d’édification.
Nous retrouvons d’ailleurs dans ses tableaux
historiques ou religieux cette tendance à exalter
ENTRÉE DE LA SALLE JORDAENS.
la beauté humaine. Voyez dans X'Extase de saint
Augustin, de l’église des Augustins d’Anvers, la
belle figure de l’ange qui se détache superbe-
ment sur le drap bleu du vêtement flottant.
Voyez ses saint Sébastien, aux corps magnifi-
quement étalés, et ce fragment de YAntiope et
Jupiter, qui nous montre la nymphe, le corps nu,
les chairs resplendissantes sur le velours vert de
sa couche, avec les flammes de la chevelure
déroulée autour du visage. C’est là le Van Dyck
de la passion, de la volupté, le peintre de la
grâce et de l’émotion.
Après avoir visité l’Italie et étudié l’art des
maîtres de la péninsule, Van Dyck revint à
Anvers, où il resta pendant cinq ou six ans, puis
il partit pour l’Angleterre et se fixa à Londres,
auprès du roi Charles Ier. C’était une cour élé-
gante et raffinée. L’esprit délicat de Van Dyck
devait s’y trouver à l’aise. Dans ce milieu aris-
tocratique son talent se développerait selon les
tendances qui lui étaient propres. C’est là qu’il
trouverait ces types délicats qu’il reproduirait
sur la toile et dont les générations suivantes
allaient s’émerveiller.
Déjà, avant son séjour à Londres, Van Dyck
avait montré sa maîtrise. On connaît les portraits
qu’il peignit à Gênes, celui de Jean - Vincent
Imperiale, duc de Saint-Angelo, du Musée de
Bruxelles, représentant cette grande figure assise,
habillée d’une simarre de soie noire, et surtout
les portraits qui ornent le palais Balbi. Mais ces
tableaux sont inférieurs encore aux grandes pro-
ductions qui datent de son séjour à Londres.
La gravure a popularisé ce charmant tableau
dit de VHomme à la houlette, du Musée de
l’Ermitage à Saint-Pétersbourg. On ne pourrait
imaginer plus délicieuse idéalisation de la figure
humaine, plus de noblesse alliée à plus de grâce.
Jamais peut-être la jeunesse et la distinction
native ne furent présentées sous de plus sédui-
sants aspects.
L’exposition de l’Art ancien contient quelques
portraits remarquables du maître qui, dans ce
genre, rivalisa heureusement avec Rubens lui-
même. Nous admirerons d’abord le groupe char-
mant du peintre Snyders et de sa famille. Quelle
chaude et caressante couleur ! quelle heureuse
interprétation d’un sujet familial ! Il faudrait des
pages entières pour en dire la douceur intense,
la gravité sereine et la communicative tendresse.
Traversons la grande salle où sont réunies les
toiles religieuses du peintre, celles qu’on dé-
daigne un peu, lorsqu’on considère ses portraits
délicats et charmants, et arrêtons-nous dans le
salon aux murs duquel sont suspendues les toiles
qui nous représentent Les types les plus remar-
quables de la beauté humaine.
Voyez ces groupes d’enfants, ce délicieux por-
trait de Guillaume II, prince d’Orange, et de sa
fiancée, la princesse Marie Stuart, ceux de la
comtesse de Clanbrasil, de l’archiduchesse Isa-
belle-Claire-Eugénie portant le solennel Vête-
ment de l’Ordre des Clarisses, de Jean-Charles
de la Faille, du peintre Jean Wildens, de la du-
chesse de Richmond, du bourgmestre Jacob Van
der Borght, de la marquise Spinola avec son
enfant.
Arrêtons-nous quelques instants devant cette
grande figure de patricienne. Interrogeons Le
mystère de ce regard où tant de pensées sem-
blent vivre et se confondre. Quelles passions ont
dû traverser le cerveau qui éclaire d’une flamme
si ardente et si sereine tout à la fois cette énig-
matique physionomie ? On sent que cette femme
était faite pour commander aux peuples ; on sent
qu’elle participait aux idées d’une race raffinée
et on se l’imagine douée de toutes les qualités,
de toutes les violences et de toutes les ruses
de cette Renaissance italienne, si fertile en indi-
vidualités puissantes.
Et toutes ces figures passent devant nous,
animées, vivantes. Ce ne sont pas seulement
des corps, mais des esprits, des volontés, des
grâces, des passions o.u des élégances. La
psychologie de ces personnages est subtilement
étudiée. Le peintre a vu, compris et senti, senti
surtout, car l’émotion, la perception délicate des
choses qu’on ne peut décrire, mais qu’une
expression de la physionomie peut seule révéler,
le sens subtil de la pensée et du caractère sont
Les dons précieux qui font de Van Dyck un des
plus grands artistes de tous les temps.
Cet artiste eut toutes les distinctions et toutes
les (élégances. Après avoir reproduit sur ses
toiles les plus beaux visages que jamais œil
humain contempla, il se plut, par un raffine-
ment subtil, à peindre les mains. Voyez ces
mains délicates, aristocratiques et fines. Vous les
admirez dans presque toutes les toiles du peintre
et si vous désirez mieux comprendre l’importance
que Van Dyck y attacha, vous examinerez ce
curieux tableau des mains qui appartient à M. Ch.
Léon Cardon. C’est une simple étude, mais elle
révèle toute la poésie que le peintre dégagea de
cette partie si délicate du corps humain, mains
effilées de patriciennes, mains violentes de! domi-
nateurs et de conquérants, mains volontaires de
princes et de conducteurs d’hommes, mains de
cire du savant, qui semble polie par le contact
soyeux des parchemins, mains énergiques et
complexes de condottiere, mains d’artistes, qui
manieront le pinceau d’un geste délicat pour
faire surgir à nos yeux les splendeurs d’un
monde inconnu.
On sort profondément ému de ces salles où
le talent de Van Dyck nous est rappelé avec tant
de puissance. Sans doute, cette exposition est
incomplète. Sans doute, elle ne nous donnera pas
du maître une vision complète. Ce n’était pas le
but des organisateurs de nous la rendre. Nous
l’eûmes jadis, à Anvers, lors de l’exposition des
œuvres de l’artiste. Ce n’est peut-être qu’un
souvenir évoqué, mais ce souvenir est charmant.
Arthur De Rudder.