Exposition Universelle Internationale De Bruxelles 1910,
Organe Officiel De L'exposition, Vol. II
Forfatter: E. Rossel
År: 1910
Sider: 500
UDK: St.f. 061.4(100)Bryssel
Søgning i bogen
Den bedste måde at søge i bogen er ved at downloade PDF'en og søge i den.
Derved får du fremhævet ordene visuelt direkte på billedet af siden.
Digitaliseret bog
Bogens tekst er maskinlæst, så der kan være en del fejl og mangler.
460
L’EXPOSITION DE BRUXELLES
L’ART BELGE AU XVII SIÈCLE
VI. — LES DISCIPLES DU MAITRE. (Suite et ]in.)
Nous allons parler maintenant de quelques
maîtres de moindre importance, qui formaient
autour de Rubens, autour de ses grands disciples
Van Dyck et Jordaens, cette petite cour, dont le
talent rehaussait encore le génie de l’illustre
anversois. Leur éclat n’est pas diminué par cette
lumière. On ne peut pas doser la valeur de
ces artistes. Parfois, ils s’élèvent très haut ; ils
s’apparient aux meilleurs. Ils ont des qualités
originales, des qualités de grâce ou d’inspiration,
qui font d’eux des maîtres exquis, mais il leur a
manqué l’ampleur et la diversité, que seuls quel-
ques hommes d’élite ont pu posséder. A étudier
leur œuvre, l’amateur trouve un plaisir de raffiné.
Ils ont pour la plupart exploré un coin, qu’ils
ont choisi selon leurs tempéraments, du vaste
domaine de l’art. Ils y découvrirent des beautés
éternelles, et le patrimoine de l’intellectualité
humaine en fut agrandi et magnifié.
Nous allons donc parcourir rapidement les
salles où ces maîtres dominent.
Les tableaux religieux étaient nombreux à l’ex-
position du Cinquantenaire. Nous avons cité ceux
de de Crayer, nous signalerons aussi, parmi les
plus .remarquables, l’Erection de la Croix et
1 Adoration des Atages, de Gérard Zegliers, une
grande toile décorative, puis le Couronnement
de la Vierge, de Corneille Schut, et, surtout, la
Visitation de la Vierge chez Elisabeth, du peintre
anversois Victor Wolfvloet.
Les œuvres de ce maître, élève de Rubens,
sont très rares. Celle qui fut envoyée à l’expo-
sition orne l’église Saint-Jacques à Anvers. 11
faudra l’aller revoir, comme on va voir les
Rubens et les Van Dyck, car elle est vraiment
remarquable. C’est une composition à la fois
gracieuse et impressionnante où tout est parfait :
les attitudes, le groupement et le coloris. Anne
s est rendue aupres de la Vierge ; l’entrevue est
pleine de noblesse, en même temps que de réa-
lisme. Deux saints assistent à cet entretien, tan-
dis que des anges volètent au-dessus du groupe
et qu’un petit chien jappe à côté d’Anne. Les
couleurs sont harmonieuses et on ne peut s’em-
pêcher d admirer le joli effet que produisent les
tonalités bleues, blanches et mauves si habile-
ment employées par l’artiste.
Il était juste que Gaspard de Crayer, un des
disciples les plus autorisés de Rubens, un des
maîtres de l’art religieux au XVIP siècle, fut
représenté comme il convenait. On admira le
Jugement de Salomon (du Musée de Gand),
dont la coloration est aussi remarquable que la
bonne ordonnance des groupes, puis l’Assomp-
tion de Sainte Catherine (de l’église Sainte-
Catherine), la Descente du Saint Esprit (de
1 église Saint-Michel de Gand), et le Saint Pierre
pénitent du Musée de Valenciennes. On pour-
rait regretter que le Musée de Lille, qui prêta
plusieurs œuvres à l’Exposition du Cinquante-
naire, ne joignît pas a son envoi le Sauveur du
monde, ce tableau si caractéristique du talent et
de la douceur du peintre, celui où il exprima
avec tant d’émotion le sentiment religieux qu’il
rendit toujours avec tant de grâce et d’inspi-
ration.
D’Otto Vænius, qui fut un des maîtres de
Rubens, nous remarquons plusieurs toiles aux
belles colorations en tons francs, et aux beaux
visages de femmes aussi. Sans doute, l’expres-
sion manque un peu, les physionomies n’ont pas
assez de vie, les personnages sont figés, un peu
raidis dans leur attitude, mais comme l’artiste a
su nous les rendre agréables ! Comme il sait
donner du pittoresque à ses groupements, et
dans certaines de ses œuvres préluder au jeu
de la lumière et de l’ombre! Il est intéressant
d’examiner avec attention des œuvres comme la
Charité de Saint Nicolas, la Vocation de Saint
Mathieu et le Martyre de Saint André, du Musée
d’Anvers, pour juger du chemin parcouru par
Rubens, et comprendre tout ce que les maîtres
de la grande époque tirèrent de l’école italia-
nisante qui les précéda.
Les paysagistes du XVIIe siècle étaient repré-
sentés par Jacques d’Arthois, Lucas Achtschel-
ling et Corneille Huysmans, dit Huysmans de
Malines. C’est une occasion rare qui était offerte
d’étudier la manière de ces trois artistes, leur
conception du paysage, pas encore débarrassé,
certes du convenu et de l’artificiel, mais de
remarquer aussi leur sens déjà ému de la nature.
Les ocres dominent encore ; le coloris, qui
manque de naturel, est sacrifié peut-être au goût
de la composition, mais assurément celle-ci est
remarquable. Huysmans de Malines était très
bien représenté. Il y avait son Paysage avec
troupeau de moutons, du Musée du Havre, avec
la bonne ordonnance des plans, la variété des
éléments qui constituent le paysage et la poésie
intense répandue dans la composition. C’est une
œuvre qui méritait de retenir l’attention.
Une salle portait le nom de Siberechts. Les
œuvres de ce peintre sont peu répandues chez
nous. Il était intéressant d’en voir de remar-
quables. Un bon paysage de cet artiste nous
rappelle son talent si intéressant et si original.
C est en cet endroit également que nous pou-
vons étudier une toile curieuse de Adriaan Van
Utrecht, le Poulailler envahi.
De petits maîtres encore : La femme aux Bi-
joux, de Vàn Thulden. Une petite fille vêtue de
riches vêtements tient une main appuyée sur une
table couverte d’objets précieux. Au-devant
d’elle des anges s’avancent portant des bijoux ;
à droite, un autre enfant semble se baigner au
sein des richesses accumulées, et, auprès d’une
aiguière précieuse, lance, avec insouciance, des
bulles de savon, indiquant ainsi la vanité des
magnificences qui l’entourent.
Il serait trop long d’énumérer les œuvres de
tous les petits maîtres charmants qui étaient
situées dans les salles du rez-de-chaussée. C’est
Jean Breughel, dit de Velours, son délicieux
Paradis terrestre et les sujets mythologiques
qu’il exécuta de concert avec Henri Van Balen,
François Francken et ses Adorations des Mages,
aux beaux tons d’ambre ; le courtraisien Jacques
Savary, avec le Baptême de l’Eunuque, d’un si
joli effet de couleur.
Buis c’est encore Adrien Brouwer, admira-
blement représenté par vingt - cinq petits ta-
bleaux, scènes de pugilat et scènes d’ivresse,
kermesses violentes où les poings se serrent,
ou les tabourets volent en tous sens, où le sang
coule, festins de paysans, scènes plus réalistes
aussi. Voici Josse Van Craesbeeck, avec dix-sept
toiles, dont les Cinq Sens, la Rixe, la fête au
Château, qui sont symptomatiques du talent du
maître.
Mais l’ensemble le plus considérable d’œuvres
du peintre de genre était celui de David Te-
niers II, dit le jeune. Le nombre de ces toiles
n’était pas inférieur à quarante. Des amateurs
des musées de France, d’Allemagne, d’Angle-
terre et même de Norwège avaient envoyé des
tableaux qui nous permettent d’étudier la façon
dont cet artiste conçut le paysage.
Ce ne fut pas une des moindres satisfactions
des amateurs qui parcoururent ces galeries que
de pouvoir étudier les œuvres de Gonzalès
Coques. Ce peintre flamand, qui s’apparie de si
près aux maîtres hollandais, dont il possède le
charme d’intimité et de discrétion, n’est repré-
senté au Musée de Bruxelles que par le portrait
de Lucas Fayderbe. Il faut, pour l’admirer, aller
à Londres, à Cassel, à Nuremberg, à Dresde ou
à La Haye. Nous trouvons ici huit tableaux de
l’artiste et il en est un de premier ordre, le
Jeune Savant et sa Sœur, du Musée de Cassel.
Le jeune homme est assis près d’une table.
Il feuillette un livre ; à sa portée, quelques ins-
truments scientifiques indiquent Ja nature de
ses occupations. De l’autre côté, une femme au
visage charmant, sa sœur, est debout devant
une épinette dont elle caresse légèrement les
touches, pendant qu’elle écoute d’une oreille un
peu distraite les jexplications du savant. Sur
un tabouret, un chien sommeille, marquant ainsi
l’intimité de ce lieu familial. Aux murs des ta-
bleaux, et par la porte du fond restée ouverte,
s’aperçoit l’intérieur d’une chambre voisine. Une
impression de douceur, de noblesse, la tendresse
des choses qui s’unit au charme des êtres.
Une salle entière était réservée aux toiles des
grands animaliers et aux peintres de nature
morte flamands. Snyders et Fyt y trônent en
souverains. Et, de fait, il y avait là des œuvres
maîtresses peu connues de la plupart des ama-
teurs et que de longtemps, sans doute, on ne
verra plus réunies dans un ensemble aussi bien
ordonné.
Une des belles œuvres de François Snyders
est assurément l’intérieur d’office du Musée de
Caen, qui nous montre un garçonnet au milieu
de natures mortes d’une magnificence sans
pareil, offrant un fruit à un perroquet. Il y a
là un étalage de chairs appétissantes, daims au
ventre entr’ouvert, canards, homards, faisans,
sangliers, et, brochant sur le tout, des légumes
et des fruits de toute beauté.
Et maintenant la maison du maître est fermée.
Le maître a quitté sa demeure somptueuse. Les
élèves l’ont suivi dans sa retraite. De ces splen-
deurs il ne reste que quelques traces qui auront
disparu bientôt. Un souvenir, si l’on veut, mais
un souvenir qui persistera dans la mémoire, non
seulement des amateurs ou des hommes avertis,
mais qui se maintiendra dans l’esprit de la foule.
L’Exposition de l'Art ancien eut une grande im-
portance, non seulement par l’influence esthé-
tique qu’elle exerça sur le public en général,
même parce qu’elle contribua à faire connaître
à tous des œuvres de maîtres de chez nous
dispersées de par le monde, réunies dans la
patrie qu’elles avaient quittée depuis plusieurs
siècles. Il est juste de féliciter encore une fois
les hommes de goût et de science qui eurent
l’initiative de ce salon magnifique. Nous avons
cité MM. Kervyn de Lettenhove et Ch.-Léon
Cardon.
A. De Rudder.