Exposition Universelle Internationale De Bruxelles 1910,
Organe Officiel De L'exposition, Vol. II
Forfatter: E. Rossel
År: 1910
Sider: 500
UDK: St.f. 061.4(100)Bryssel
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L’EXPOSITION DE BRUXELLES
LE RADIUM EN 1910
Le mystérieux inconnu. — Tout le monde en parle et
personne ne l’a jamais vu. — L’émanation. — La
transmutation des métaux. — Il est le plus rare
et le plus cirer des corps. — Composition de son
rayonnement. — Ses vertus. — Applications :
Examen du diamant. — Thérapeutique. — Médica-
ments radioactivités et radifères. — Que devient-il
dans l’organisme?
Le radium était présent un peu partout à
l’Exposition. Et partout il intéresse ; on se sou'
vient qu’il fut quelque temps le roi du jour. On
a publié en son honneur une littérature immense,
en France particulièrement. Profitons de la cir-
constance pour voir ce qu’il reste d’acquis à
cette gloire, après les enthousiasmes. Peut-être
ne sera-t-il plus jamais aussi populaire qu’il le
fut dès sa naissance, au sortir du laboratoire de
M. et Mmc Curie.
Sa naissance est mal dit, car il était né depuis
toute éternité au sein de certains minerais par-
ticulièrement, et dans les eaux minérales, et
même, pourrait-on dire, dans presque tous les
corps de la nature. Sa distribution dans la croûte
terrestre est excessivement étendue et l’on a
révélé sa présence dans les minerais de pech-
blende, de pyromorphite, d’autunite, de chal-
colite, de carnotite et de thorianite, qui servent
d’ailleurs à sa production. Ces minerais en ren-
ferment une quantité plus grande, mais, en réa-
lité, si l’on ne regardé pas à la quantité, il y
a du radium partout. Le radium est sans doute
aussi vieux que le soleil, d’où il nous sera venu
ävec les autres corps ; mais il faut toujours
distinguer dans l’histoire des substances miné-
rales ou chimiques deux naissances, dont l’une
est la vraie et dont l’autre date de son premier
contact avec les connaissances humaines.
Tant que les observations, les recherches sur
les propriétés du radium n’étaient pas encore
sorties du laboratoire, les choses gardaient une
allure raisonnable et la petite âme lumineuse ne
pouvait que se réjouir, dans le recueillement,
près des creusets et des cornues, d’avoir fait la
connaissance du couple aimable de savants qui
venaient d’entrer en contact avec son esprit
lumineux.
Oui, son esprit seulement, car il ne s’est
jamais montré à ces savants sous sa forme cor-
porelle pure. Bien que Mme Curie, poursuivant
les travaux de son mari, enlevé à la science
par accident, comme on sait, lui ait consacré
déjà de nombreuses années de son existence,
jamais, pour elle non plus, ce corps mystérieux
n’est encore apparu sous sa forme vraie. On
ne l’a vu jusqu’ici que revêtu du manteau rigide
et brillant des cristaux, à l’état de sels. Les per-
sonnes qui ont employé le chloroplatinite, en
photographie, pourront saisir, sans être chi-
mistes, ce que cela veut dire. Le chloroplati-
nite ressemble à du grenat mat, il est translu-
cide et fond en jaune orange dans l’eau ; l’or se
présente aussi sous une formé analogue dans le
chlorure d’or que l’on pourrait comparer à de
l’ambre brun. Il fond également dans l’eau. Et
cependant c’est de l’or.
Une fois fondues dans l’eau, ces deux sub-
stances, l’or et le platine, peuvent, par certaines
manipulations chimiques, revenir de la forme
instable de solution à la forme stable métallique,
et l’une donnera du platine, l’autre de l’or,
solides.
Il n’en est pas de même du radium ; le radium
est inconnu, on ne connaît que ses sels. 41
apparaît avec ses propriétés, les unes fantas-
tiques, les autres maléfiques ou bienfaisantes,
comme les œuvres d’une personne mystérieuse ;
on voit en physique, en médecine ses actes ; on
distingue dans l’obscurité son fantôme.
Quand la découverte du radium fut connue
du public et du monde savant, on cria au mi-
racle. Il s’agissait d’une substance nouvelle qui
pouvait rayonner à l’infini, jusqu’à la fin des
siècles, croyait-on, disait-on, sans perdre la plus
petite parcelle de sa substance ! Que devenait
alors le dogme scientifique de la transmission
de l’énergie ? Le radium transmettait et ne
perdait rien ! Les idéalistes de la physique
triomphaient, ils tenaient enfin une substance
dont les manifestations étaient « immatérielles ».
Or, on sait depuis qu’il en coûte au radium
comme à tout le monde de rayonner, quelque
LES TROIS SORTES DE RAYONS
ÉMIS PAR LE RADIUM.
discrétion qu’il y mette. On a pu mesurer sa
déperdition et l’on put établir des calculs dé-
montrant qu’une masse donnée de radium n’est
plus, après 2,000 ans de rayonnement, que la
moitié de ce qu’elle était.
Il fallut en revenir au principe de la trans-
mission de l’énergie, tel qu’il avait été formulé.
Cela porta un coup sérieux au prestige de la
matière nouvelle. Elle rentrait, elle et ses vertus,
dans l’ordre général. Toutefois, certains savants,
tel Gustave Le Bon, n’ont pas désarmé et ce
dernier maintient son principe sur l’évolution
de la matière : « Rien ne se crée, tout se perd. »
Ce qui est le contraire de la formule courante :
rien ne se perd, tout se transforme, réalisée
notamment par la combustion du charbon, qui
devient force, transformée, elle, en mouvement
par la machine à vapeur, puis au besoin en
électricité par la dynamo, et dont Celle-ci peut
faire, si l’on veut, de la lumière, laquelle rend
au grand tout ses produits de désintégration.
Emporté par son imagination, toujours désor-
donnée et fantasque, lorsqu’il en a, le grand
public crut que le radium allait éclairer l’uni-
vers et rendre pour le moins la lune tout à fait
inutile ! Il espéra qu’à défaut de ces applica-
tions, qui tardaient à se produire, on pourrait
peut-être avoir la lampe éternelle, le globe de
cristal immuableinent lumineux, qui verserait
dans la demeure, et pour rien, des torrents de
lumière.
La malencontreuse idée vint aux savants de
donner des conférences sur le radium. On s’y
écrasait, les dames y étaient en foule. Grande
fut la surprise, que chacun garda bien intime-
ment au fond de son cœur, sans l’avouer, bien
entendu, quand on vit l’émanation, le rayonne-
ment du nouveau soleil !
Au moment de faire apparaître, enfin, cet
astre, ce fantôme, que savait-on ? Le conférencier
donnait l’ordre d’éteindre dans la salle, après
avoir passé au public avide une espèce de boîte
stéréoscopique au fond de laquelle il fallait re-
garder, et bien regarder pour y distinguer, à la
fin, une pâle luminiscence, cent fois plus pâle
que celle d’une traînée d’allumette sur un mur
dans J’obscurité I Le spectateur déçu, passait,
sans rien dire, la boîte à son voisin. Parfois,
quelqu’un ne voulant pas que l’on pût supposer
sa déception — il faut toujours paraître très
informé, n’est-ce pas ? — celui-là avait soin
d’ajouter : « C’est très intéressant ! »
Ce fut le second coup porté à la popularité du
radium.
L’avenir lui en réserve bien d’autres! Le
radium est-il un corps simple ? Il est difficile
de se prononcer sur ce point, étant donné,
comme nous l’avons dit, que le radium n’a
jamais été isolé et que l’on ne connaît que ses
sels. Il semble faire partie d’une série de corps
qui dériveraient les uns des autres. Avec le
temps et lés circonstances ils se transformeraient
comme le fer devient de la rouille, etc. Les
premiers termes de la série seraient l’uranium,
puis le thorium, le polonium, le baryum, d’où
viendrait le radium, lequel se transformerait en
aclinium, etc., et finalement le dernier terme de
la série, l’aboutissement de toutes ces substances
mystérieuses, aux propriétés révolutionnaires,
serait... le plomb.
Voilà, sur le radium, quelques-unes des notions
plus précises, que l’on a acquis de nos jours.
Elles ne sauraient diininuer la haute importance
scientifique de la découverte et des propriétés
du radium.
Il y a quelque temps, le radium semblait pro-
mettre des merveilles dans une autre voie, qui,
elle aussi, était de nature à enthousiasmer les
amants du merveilleux. Deux illustres savants,
MM. Cameroun et Ramsay, relataient, dans une
conférence à la Société chimique de Londres, des
expériences qui ne tendaient à rien moins qu’à
remettre en faveur les problèmes de l’Alchimie,
la transmutation des métaux. On rapporte qu’au
moyen de l’émanation radio-active, ces savants
auraient obtenu du lithium, en partant du cuivre.
Quoi qu’il en soit, le radium n’est pas près de
voir disparaî.re l’intérêt attaché à sa personne.
Longtemps encore il jouira tout au moins de la
considération publique, car il suffira de rappeler
au plus ignorant que les hasards d’une confé-
rence ou d’une exposition auront mis en pré-
sence d’une pincée de radium qu’<< il y en a là
pour 400,000 francs », à raison d’un gramme,
pour qu’on ôte son chapeau respectueusement
devant ce produit qui est à l’heure actuelle le
plus rare et le plus cher du monde !
Heureusement, on peut s’en passer. Mais
voyons tout de même quels sont, aujourd’hui,
les emplois du radium.
Il est élémentaire de préciser d’abord ses qua-
lités. Elles dérivent de son rayonnement, lequel
est constitué par des rayons de trois espèces.