Exposition Universelle Internationale De Bruxelles 1910
Organe Officiel De L'exposition, Vo.l 1
Forfatter: E. Rossel
År: 1910
Sted: Bruxelles
Sider: 452
UDK: St.f. 061.4(100)Bryssel
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BRUXELLES-EXPOSITION
miniaturistes qu’importèrent, dès le VIIIe siècle, les
missionnaires échappés des cloîtres d’Irlande,
maîtres en la science d’enluminure, prépara
tout au plus cette éclosion. Peu à peu, à mesure
que grandissait la fortune publique, les murs des
hôpitaux s’ornaient de fresques ^ont une exécution
précise révélait déjà, dans sa forme naïve, le
réalisme de la race. La Flandre y inscrivait ses
gloires naissantes ou y affirmait sa piété fervente.
C’était à Gand, sur les parois de la chapelle de la
Biloque, des figures de saints gigantesques, c’était
dans la même ville, au local des confréries, la
représentation des cortèges bourgeois.
C’est au sein de ces confréries ou de ces gildes
que l’art de la peinture naquit chez nous. Le
miniaturiste, le sculpteur, le peintre étaient des
artisans liés à leurs corporations un peu à la façon
du serf enchaîné à la glèbe. Le moyen âge ne
connut pas la liberté du travail. L’artiste n’était
alors qu’un ouvrier d’élite, souvent obscur, souvent
ignorant de lui-même, dédaignant parfois de signer
ses œuvres, ou plutôt n’escomptant pas l'hommage
d’une postérité illusoire. L’apprenti devenait maître
à la suite de laborieux efforts, le maître travaillait
dans l’ombre des demeures closes, patiemment,
minutieusement, et le chef-d’œuvre enfin produit
était le fruit du labeur de longs mois et parfois
de longues années.
C’est de ces ateliers solitaires et obscurs, situés
en quelque coin retiré des villes, à Bruges, à Bru-
xelles, à Gand, à Louvain, que sortirent les pre-
mières œuvres de l’école flamande, les plus belles
et les plus glorieuses, celles des Van Eyck, de Mem-
ling, de Thierry Bouts, de Roger Van der Weyden
et de Van Orley. Elles furent vraiment le sang de
leur chair et la moelle de leur esprit. Ils, les con-
çurent longuement, sans effort mais 1 sans hâte,
dans l’intimité de leur vie et de leur pehseéÇ y met-
tant le meilleur d’eux mêmes, le père travaillant
avec le fils, le frère à côté du frère, unis par le
même enthousiasme ou par le même recueillement.
D’ailleurs, à cette époque où l’élocution est
embarrassée dans des langues à peine formées,
dans des littératures en tous cas inaccessibles aux
foules, la peinture, la sculpture, la miniature, l’art
en un mot est le mode de communication le plus
efficace des esprits et des âmes entre eux. En
quelques traits, le peintre fixe et matérialise l’idée,
Fra Angelico au nom des artistes ses frères avait pu
dire qu’il enseignait au peuple les vérités éter-
nelles. Ces paroles sont vraies pour les choses
pieuses et profanes. Elles s’adressent aux peintres
flamands comme aux italiens.
C’est ainsi que nous voyons les peintres anté-
rieurs aux Van Eyck, Michel Broederlam, par
exemple, réunir dans un même tableau, en dépit
de la vraisemblance, trois ou quatre sujets diffé-
rents. Sur un même panneau, l’artiste nous repré-
sente la Fuite en Egypte, et tout à côté la Présenta-
tion au Temple; plus loin ce sera l’Annonciation,
l’Entrevue d’Anne et de Marie. C’est là une série
d’épisodes, une histoire non plus racontée mais
figurée dans ses détails successifs, et gardant encore
la forme du récit, pour l’édification des fidèles ou
pour l’agrément d’un amateur curieux.
Michel Broederlam fut d’ailleurs un peintre
habile pour son temps et qui échappa à l’obscurité
dont nous parlons plus haut. Nous savons qu’il
naquit à Ypres, qu’il travailla dans cette ville pen-
dant les dernières années du XIVe siècle et qu’il
acquit le titre de peintre de Mgr le duc de Bour-
gogne. Sa manière est franche et pittoresque, elle
abonde en détails gracieux, en trouvailles ingé-
nieuses et délicates. Avec Jacques Cavael, un autre
artiste yprois, et Jean Malouel, il forme la tran-
sition entre les peintres hiératiques et la génération
des Van Eyck. Nous arrivons à la grande époque
des maîtres gothiques, à la première floraison de
l’art flamand.
Les Van Eyck
Et cependant l’écart est immense qui sépare
Hubert et Jean Van Eyck des peintres qui les pré*
cédèrent. On comprend à peine comment ces
maîtres atteignirent à une perfection aussi com-
plète. Nous sommes, en effet, en présence d’œuvres
absolues et définitives.
Les frères Hubert et Jean Van Eyck, et leur
sœur Marguerite naquirent à Maeseyck, à peu de
distance de Maestricht, ville hérissée de tours et
bourdonnante de cloches, célèbre déjà par son
activité artistique et par la sainteté de ses pontifes,
située sur cette route qui, de Bruges et d’Anvers à
Cologne, allait être la voie triomphale par où se
ferait cet échange d’inspiration si fécond entre
l’école flamande et l’école rhénane, par où passe-
raient les Memling et les Rubens.
Hubert naquit, croit-on; vers i3yo, Jean vers
i3go. Vers 1410, ils découvraient le procédé de la
peinture à l’huile, qui allait leur permettre de
réaliser dans leurs œuvres une maîtrise incompa-
rable. On sait peu de chose sur leur vie. On
suppose qu’ils séjournèrent à Maestricht et à
Cologne, que Hubert visita le midi de la France et
peut-être l’Italie du Nord. On sait cependant,
d’une manière positive, que Jean Van Eyck fut
nommé peintre de Jean de Hollande pendant son
séjour à La Haye, que Hubert Van Eyck s’établit
à Bruges, puis à Gand, et qu’il mourut dans cette
ville le 18 septembre 1426.
Les Van Eyck eurent une vision du monde et des
hommes que nul autre n’eut plus après eux. Ce fut
comme un ciel qui s’entr’ouvrit, pour se refer-
mer ensuite; une révélation de beauté, une apo-
calypse de magnificence. Rien ne fut plus près
de la terre, rien ne.fut plus près du divin. La
réalité et l’idéal se confondirent pour chanter tout
à la fois un hymne triomphal à l’Homme et à Dieu.
Considérez YAdam eVEhé du musée de Bruxelles;
jamais la force et la beauté de l’homme, la grâce
et la faiblesse de la femme ne furent exprimées avec
une plus saisissante vérité. Examinez un autre
volet de l’Agneau mystique. Dieu le père trônant
entre la vierge et un saint : jamais la majesté
de la divinité ne fut représentée avec une plus
sublime grandeur. Les *Anges chantant du musée
de Berlin sont empreints d’une surnaturelle
beauté, et cependant ce sont des enfants, fils des
hommes et fils de Dieu réunis dans le chœur d’un
sanctuaire d’où semble s’échapper encore le par-
fum de l’encens. Comparez-leur les anges du
Pérugin ou de Bonfigli, trop près de l’homme, ou
ceux de Fra Angelico, trop loin de lui, et vous
reconnaîtrez sûrement que Van Eyck idéalisa ma-
gnifiquement les formes humaines, au point qu’on
hésite à dire s’il tenta de diviniser l’humanité ou
d’humaniser la divinité.
Son paysage est synthétique : une ville, des tours,
des clochers se profilent à l’arrière-plan, des
rochers, des bouquets d’arbres, une vallée, une
rivière qu’un pont traverse, et cela est d’une sur-
prenante réalité tout en étant d’une somptuosité
sans égale. On méconnaîtrait le caractère de cette
campagne si on disait qu’elle est idéalisée, car ces
prés, ces bois, ces montagnes ont été vus par les
yeux d’un peintre fidèle, nous les avons vus nous-
même dans cette réalité saisissante; il n’y a rien
qui ne soit conforme à la nature, et cependant il y
a là quelque chose d’indéfinissable qui leur donne
comme une splendeur d’éternité.
Hubert travailla avec son frère Jean à l’exécution
de l'Agneau pascal-, il n’en exécuta cependant
qu’une partie. On peut également, lui attribuer
avec certitude un volet de retable représentant
Robert Poortier, bourgeois de Gand, priant à
genoux sous la protection de saint Antoine.
Jean Van Eyck fut un portraitiste de premier
ordre. Son portrait d'homme de la National Gal-
lery, L'Homme aux œillets de la Galerie royale
de Berlin témoignent de son incomparable maî-
jfilf Memling. — La Chasse mj Sainte Ursule
^L • ul'. -
portraits d'Arnoulfini et de sa femme de la Natio-
nal Gallery, la Vierge adorée pâ^Ve chancelier
Rolin, du Louvre, etc.
Tèan Van Eyck mourut à Bruges le g juil-
let 1 II0 ; il avait été le peintre de Philippe le Bon.
Ce prince l’avait chargé de plusieurs missions de
confiance en Espagne et en Portugal et l’avait
honoré de son amitié.
Les successeurs des Van Eyck
Avec Jean Van Eyck un art définitif est créé,
une perfection est atteinte. Ses successeurs imite-
ront sa manière. Une beauté sera toujours dans