Exposition Universelle Internationale De Bruxelles 1910
Organe Officiel De L'exposition, Vo.l 1
Forfatter: E. Rossel
År: 1910
Sted: Bruxelles
Sider: 452
UDK: St.f. 061.4(100)Bryssel
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L’EXPOSITION DE BRUXELLES
L’École romantique — (jallait et Leys
Nous sommes très éloignés aujourd’liui des
idéals romantiques. Nous ne comprenons plus les
enthousiasmes vibrants qui animaient les artistes
de i83o, ni leur sentimentalité rêveuse, ni leurs
passions exaltées. Cela est aussi loin de nous que
la « sensibilité » du XVIIIe siècle. Ce sont des idées
dont nous ne participons plus et que nous
sommes tentés de mal juger, parce qu’elles ne
répondent plus à nos aspirations. 11 faut donc
nous extérioriser un peu si nous voulons saisir
l’importance du rôle que jouèrent dans l'histoire
de notre art Gallait et les peintres romantiques,
ne pas être injustes à leur égard et nous rappeler
surtout l’admiration que l’auteur de Y Abdication
de Charles-Quint provoqua non seulement en
Belgique, mais en France et en Allemagne.
Louis Gallait naquit en
1810, à Tournai, dans
cette ville où les souvenirs
du passé sont sans cesse
évoqués par les monu-
ments des âges écoulés.
A l’ombre de l’immense
cathédrale le jeune artiste
épelait sur ce livre de
pierre où tant de siècles
ont inscrit un souvenir
le langage de ce passé que
son imagination romanti-
que devait plus tard trans-
crire dans ses œuvres.
Les parents de Gallait
étaient de petits bouti-
quiers. Ils vendaient entre
autres marchandises de
petites images naïvement
coloriées qui faisaient la
joie des enfants. Ce furent
là les premiers dessins
qui tombèrent sous les
yeux du futur peintre.
Tout jeune encore il les
copiait avec ferveur, modi-
fiant déjà à sa manière ses grossières compositions.
Sa vocation se décidait.
Mais il fallait vivre, il fallait trouver une occu-
pation rémunérée qui allégeât un peu le fardeau
très lourd déjà des charges paternelles. Gallait
obtint un emploi chez un avoué de la ville.
Cependant son goût pour la peinture s’était
trop affermi pour qu’il y renonçât. II abandonna
la chicane et revint à l’art. Il entra dans l’atelier
du peintre tournaisien Hennequin et bientôt ses
progrès le signalèrent à l’attention de son maître
et de ses jeunes collègues. Enhardi par les éloges
qui lui étaient adressés, il se hasarda à solliciter
de l’Administration communale de sa ville natale
une bourse qui lui permît de suivre les cours
d’une académie. Gette faveur lui fut refusée. Ce
premier échec ne rebuta pas le jeune artiste. Il se
mit courageusement au travail, et à peine âgé de
22 ans il exposait au Salon de Gand une toile, le
Denier de Saint Pierre, qui fit sensation. Par la
vente de son tableau il avait acquis quelques
ressources, grâce auxquelles il put se rendre à
Paris, faire le pèlerinage traditionnel que tout
artiste belge devait accomplir afin de puiser, au
contact des maîtres de l’école française, les ensei-
gnements nécessaires à son développement artis-
tique. Dans cette ville Gallait se lia avec Ary
Scheffer et avec quelques peintres romantiques
dont il subit l’influence. C’est dans cette période
de sa vie qu’il peignit ses tableaux de Job, de
Montaigne visitant le Tasse dans sa prison, la
Prise d'Antioche et VAbdication de Charles-
Quint, une de ses œuvres les plus importantes.
L’Abdication de Charles-Quint, que l’on peut
admirer au Musée moderne de Bruxelles, avait
établi la réputation de Gallait. Les critiques et le
public s’accordèrent à louer les qualités de cette
œuvre, la fermeté et l’harmonie du coloris, les mé-
rites de la composition, la sûreté de la technique.
Gallait, de retour en Belgique, fut l’objet de
l'enthousiasme général. La population de sa ville
natale l’acclama. Le monde officiel l’accueillit
L. Gallait — Les Gildes bruxelloises rendant les derniers honneurs aux Comtes d’Egmont et de Hornes
avec bienveillance. On dit même que Charles
Rogier, alors ministre de l’Intérieur, insista auprès
de l’artiste pour qu’il ne quittât plus le pays et
s’établît à Bruxelles. Ces instances n’étaient
peut-être pas inutiles, car le nom de Gallait était
salué avec enthousiasme en France, en Allemagne
surtout. Au musée Stadel, de Francfort, un
tableau de Gallait, réplique de VAbdication de
Charles-Quint, avait été placé en face d’une toile
célèbre du peintre allemand d’histoire Lessing, Jean
Huss, et, par la comparaison, l’œuvre de notre
compatriote soulevait l’admiration générale.
Louis Gallait déféra au désir exprimé par le
fondateur de notre indépendance. Il s’établit
définitivement à Bruxelles, et désormais commença
pour lui une vie de travail ininterrompu. Il n’y a
dès lors aucun fait important à signaler dans son
existence, qui fut celle d’un artiste épris de son art,
absorbé par son œuvre de création. Nous rappel-
lerons cependant qu’il fut longtemps président de la
Société royale des Aquarellistes, et que c’est à son
initiative que les Bruxellois et les artistes doivent
l’édification du Palais des Beaux-Arts, où sont
actuellement réunis les tableaux des anciennes
écoles.
Louis Gallait mourut à Schaerbeek le 20 novem-
bre 1887, à l’âge de 77 ans. Il était parvenu à
l’apogée de sa renommée. Son œuvre était
accomplie, belle et durable.
Louis Gallait fut essentiellement ce qu’on
nomme avec un peu trop de dédain aujourd’hui
un peintre d’histoire. Certes, le genre est presque
abandonné et nul ne songe à le reprendre, du
moins sous la forme qu’avaient adoptée les peintres
de l’école romantique. Mais à l’heure de son efflo-
rescence il fut l’expression de ce grand courant
d’idées, qui portait les hommes de la génération de
i83o à reconstituer le passé dans ses moindres
détails, à reproduire les grandes scènes de l’histoire
d’une manière saisissante et accessible à tous.
Inspiré par son temps, Louis Gallait fut, si nous
pouvons ainsi nous exprimer, un admirable metteur
en scène. Il eut à un haut
degré le sentiment drama-
tique, la perception du
« moment historique ».
Il sut merveilleusement
choisir l’heure où la scène
devait être représentée,
établir les rapports de pas-
sion, de haine, de colère
ou d’amour, de respect ou
de mépris, qui devaient
exister entre les divers per-
sonnages. Sous son pin-
ceau,la peinture d’histoire
fut vraiment ce qu’elle
devait être : la synthèse
de l’idée historique résu-
mant les détails de l’évé-
nement, les caractères des
personnages, les dévelop-
pements de l’action, pre-
nant les uns et les autres
au plus haut degré de
tension et jetant sur la
toile l’action et les person-
nages vibrants et comme
haletants.
Parfois, il est vrai, cette composition est un peu
théâtrale, l’effet a été obtenu au prix d une savante
recherche; la spontanéité, cette qualité si précieuse
dans les beaux-arts, en paraît exclue. C est un
défaut inhérent au genre lui-même et les plus
grands maîtres y ont participé.
Ces qualités et ces défauts de Louis Gallait
nous les retrouvons dans presque toutes ses œuvres.
Dans VAbdication de Charles-Quint, l empeieui,
au milieu des gentilshommes et des dames de la
Cour rassemblée, à quelques pas du trône qu il va
déserter, pose la couronne sur la tête de son fils.
Le visage du pieux souverain porte la trace de la
fatigue et de la souffrance. On comprend 1 immen-
sité de sa lassitude et la raison pour laquelle il
abandonne le rang suprême, mais tout autour la
foule des gens de Cour forme une scène trop théâ-
trale et trop pompeuse, ou plutôt 1 arrangement
est trop apparent. La vie, la vérité est concentrée
avec une extraordinaire intensité sur la pei sonne
du vieil empereur, elle semble absente des autres.
Une autre toile célèbre du peintre nous montre
d’une manière plus apparente encore les qualités
du maître. Nous voulons parler des Derniei s
honneurs rendus aux comtes d’Egmont et de
Homes. C’est là un épisode saisissant de notre his-