L'exposition De Paris 1889
Troisième & quatrième volumes réunis
År: 1889
Forlag: A La Librarie Illustree
Sted: Paris
Sider: 324
UDK: St.f. 061.4(100)Paris
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L’EXPOSITION DE PARIS
87
L’AMEUBLEMENT
A. L’EXPOSITION UNIVERSELLE*
(Suite.)
Enfin, dans le salon de M. Raulin, nous
notons plusieurs commodes de marque-
terie et une bibliothèque rebondie avec
application de bronzes dorés du plus
noble aspect. Mais ici nous sortons de la
copie exacte des meubles anciens, pour
arriver à des adaptations des formes et
de la décoration anciennes aux ouvrages
d’ébénisterie d’usage moins archaïque.
Le résultat de ces copies si brillantes
et cependant si critiquées a été, en effet,
doublement heureux. Elles ont établi aux
yeux des amateurs que les travaux de nos
artisans contemporains n’étaient point à
dédaigner, puisqu’ils approchaient si près
de la perfection de nos pères. Comme
conséquence, les « curieux » qui avaient
continué de payer des prix extrêmement
élevés les meubles anciens, se sont habi-
tués à cette pensée que l’on pouvait aussi
payer chèrement des ouvrages qu’on dis-
tinguait à peine des plus beaux modèles.
De là est née toute cette belle industrie
de grand luxe qui produit aujourd'hui ce
qu’on est convenu d’appeler des Ameuble-
ments de Style.
De là aussi est venue cotte habileté
singulière de main-d’œuvre, dont nos ébé-
nistes et nos bronziers font montre dans
leurs applications modernes. Sans cette
imitation comme point de départ, nous
n’aurions à l’Exposition ni ccs tables-
bureaux e t ces b u (Fois rehaussés de bronzes
si finement ciselés qu’exposent la maison
Roux et Brunet ainsi que M. Durand; ni
ce petit bureau de bois de rose, envoyé
par la maison Schmitt. Ces jolis meubles,
en effet, ne sont plus des copies rigou-
reuses. Ils sont des imitations élégantes
que les Cressent, les Oeben, les Beneman,
les Carlin, les Dautriche et autres grands
ébénistes du xviii0 siècle n’auraient pas
dédaigné de signer.
Cette perfection de main-d’œuvre dans
le maniement des placages et dans l’orne-
mentation en bronze qui ornent les meu-
bles de stylo avait eu chez nous un pré-
cédent presque aussi heureux. Avant
d’épuiser leur habileté à copier merveil-
leusement le mobilier particulièrement
somptueux du xvii° siècle et du xvni0, nos
artistes du faubourg Saint-Antoine, de la
rue Amelot et de la rue Saint-Sabin
s étaient mesurés avec les meubles de
la Renaissance.
A une époque où l’acajou plaqué et le
4. Voir les n0» 49 et 50.
palissandre trônaient en maîtres, lesGro-
lié, les Fourdinois, les Sauvresy avaient
osé reproduire ces fines armoires à colon-
nettes, à statuettes, à cariatides qui sont
l’honneur du xvie siècle, et cos belles tables
à pieds redondants que dessinadu Cerceau.
Et c'est dans cette imitation des fins
bas-reliefs de l’école de Fontainebleau,
dos admirables volutes si fort à la mode à
la cour dos derniers Valois, que nos sculp-
teurs en meubles se sont formés. C’est
grâce à elle qu’ils sont parvenus à cette
largeur et à cette puissance d’exécution
qui nous charment, à cette finesse de
rendu qui donne à leurs productions un
caractère à la fois précieux et exempt de
maigreur.
Pour se rendre compte du degré de
perfection auquel nous sommes parvenus,
il faut contempler chez M. Renouvin un
fort beau lit en acajou, sculpté en plein
bois et orné do tètes de femmes, qui sem-
ble inspiré par les plus belles créations
d’Oppenord ; et chez M. Janselme, un
buffet à doux corps séparés par une cave
conçu dans le goût du xvn" siècle, cintré
dans le haut, e t orné de bas-reliefs exquis.
D’autre part, M. Chevrie expose une vi-
trine en acajou sculpté et ciré, couron-
née d’un trophée digne des meilleurs
maîtres, ctM. Blanqui, de Marseille, a re-
produit, d’après les dessins de l’archi-
tecte Sedille, une sorte de grand cabinet,
un peu lourd d’aspect mais d’une exécu-
tion irréprochable, et dont le dessin est au
moins nouveau.
Il faut noter également chez M. Qui-
gnon une porte de chambre, une vitrine
et une bibliothèque en acajou, style
Louis XVI avec guirlandes de fleurs prises
en plein bois; chez M. Roll, une cheminée
à cariatides d’une superbe venue; chez
M. Drapier, un buffet en noyer et des
petits cabinets en bois noir imitant l’ébène;
chez M. Lemoine, une superbe horloge à
deux corps et un baromètre. Tous ces
meubles sont des plus remarquables
comme sûreté de main ; jamais à aucune
époque les bois les plus rebelles n’ont été
sculptés avec une maîtrise plus complè te.
Mais le plus important ouvrage de sculp-
ture sur bois que renferme l’Exposition
est un escalier à double montée, en chêne
et en acajou sculptés dans la masse,
qu’expose M. Damon.
Les rampes, d’un joli dessin, sont pla-
cées en encorbellement et supportées par
une suite de modillons très fouillés. Les
départs de ces deux rampes et le couron-
nement de la galerie du premier étage
sont garnis de figures « petite nature. » en
acajou massif, exécutées d’après les mo-
dèles foui’nis par le sculpteur Gustave
Deloye. On peut rêver sans doute une fac-
ture plus délicate, mais ce bel escalier a
très gi’and air et ses sculptures offrent
une ampleur exceptionnelle.
Ajoutons que ce qui donne à toutes ces
constatations un redoublement d’intérêt,
c’est que les procédés de fabrication ne
sont plus les mêmes. Dans presque tous
les ateliers importants, la machine habi-
lement conduite s’est substituée, en
maintes parties, à la main do l’ouvrier.
Aujourd’hui les bois sont rabotés et cor-
l’oyés à la vapeur; les feuilles de placage
sont débitées mécaniquement. C’est à la
scie à ruban, ou scie sans fin, que se dé-
coupent les marqueteries avec une facilité
que n’ont jamais connue les disciples de
Boule; les moulures ne sont plus péni-
blement poussées au trusquin, mais obte-
nues grâce aux vertigineuses rotations de
la toupie.
Les moyens de production sont, en un
mot, tellement perfectionnés que les
ouvrages jugés autrefois les plus coûteux
et les plus compliqués s’exécutent au-
jourd’hui avec une facilité remarquable.
[1 n’est pas jusqu’à lu sculpture qui ne
soit à la veille d’entrer, elle aussi, dans
la phase de l’exécution pratique. On a
découvert une machine qui, suivant
exactement les saillies que lui livre le
modèle en plâtre, incise et taille le bois
avec une finesse sans pareille. A l’Expo-
sition do sculpture, dans un cadre de
médailliste, figurent deux bas-reliefs ob-
tenus de cette façon; et lors de l’examen
du jury d’admission, il fallut que leur
auteur, M. Levillain, déclarât le procédé
et la matière employés. Nos statuaires
les plus éminents les croyaient faits en
bronze.
Mais quand une industrie entre dans la
voie du progrès, il n’est pas de perfec-
tionnements qu’elle ne réalise. Ce n’est
pas assez d’arriver à retrouver et à appli-
quer les procédés anciens : on veut éga-
lement innover. Il nous faut du nouveau,
n’en fût-il plus au inonde. Or, il s’en
trouve dans l’exposition do M. Damon
et dans celle de AI. Schmitt, qu’il nous
serait assurément regrettable de ne pas
signaler.
On fait depuis quelques années beau-
coup d’ameublements en pitchpin et en
érable. Ces deux bois, d’une nuance si
délicate et d’un aspect si frais, ont deux
défauts : ils sont cassants et, par consé-
quent, se sculptent mal. On doit donc les
laisser unis. Employés par grandes sur-
faces, la finesse de leur grain les rend
monotones. Pour parer à cet inconvénient,
M. Damon a fait peindre à l’huile, sur les
panneaux nus de ses meubles, de jolies
végétations de plantes brillantes et des
envolées d’oiseaux aux couleurs cha-