L'exposition De Paris 1889
Troisième & quatrième volumes réunis
År: 1889
Forlag: A La Librarie Illustree
Sted: Paris
Sider: 324
UDK: St.f. 061.4(100)Paris
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L’EXPOSITION DE PARIS
a recherché des formes légères, sans
saillies accentuées, sans hérissement de
pinacles, d’acrotères et d’astragales, une
décoration simple et riche à la fois. Ces
exigences techniques ont été pour lui ce
que la rime elle mètre sont au poète. Elles
Font amené à condenser sa composition,
à en harmoniser toutes les parties, avec
une grande précision, et l’œuvre d’art est
devenue ainsi l'enveloppe du mécanisme,
d’horlogerie, comme le vers est le vête-
ment de l’idée.
Avec la renaissance moderne de la
sculpture et la découverte des procédés
économiques de réduction, l’industrie a
adopté une nouvelle forme, en contradic-
tion radicale avec cc principe : la pendule
socle. Le système contraire d’autrefois,
dont les Trois Grâces de Falconet sont
restées le type le plus célèbre, était do
meilleur goût et un peu plus logique. Cette
utilisation industrielle de la statuaire con-
stitue une monstrueuse hérésie artistique.
Il semble, d’ailleurs, que les fabricants
qui s’y livrent, avec entrain et profit, en
aient la conscience. J’ai constaté agréable-
ment que dans la plupart des pièces de ce
genre qui se trouvent à l’Exposition, on
a disposé les cadrans de telle façon qu’ils
sont à peine visibles ; pas do fonds écla-
tants; un léger anneau de métal enserre
les aiguilles, très ténues. C’est là un
véritable socle qui paraît simplementorné.
Cet aveu de culpabilité mérite quelque
indulgence; il fait prévoir heureusement
la conversion prochaine et complète des
hérétiques, pénitents. Qu’on modèle en
torchères, en cariatides, ou en gaines,
toutes les déesses, nymphes et bacchantes
qu’il plaira; qu’on les coule, en cuivre, en
fer, enplomb ou en stéarine, peu importe.
Mais convertir en sujet de pendule ou en
un instrument quelconque d’utilité mobi-
lière la Vénus de Milo, le Narcisse, le
Jour et la Nuit de Michel-Ange, etc.,
c’est une profanation qui, aux temps anti-
ques, eût attiré le châtiment des dieux.
Cola me rappelle la fantaisie épaisse d’un
richissime amateur étranger, qui, pour
témoigner publiquement, dansun banquet,
de son ardente passion de l’art, avait
imaginé de faire reproduire, en bouchons
de bouteilles et de carafes, tous les chefs-
d’œuvre de Phidias, de Polycïète et de
Lysippe. On lui souhaita le châtiment de
Midas; il l’avait bien mérité.
L’industrie des montresneprésentepas,
au point de vue artistique, une moindre
diversité de styles, de fantaisies et d’ex-
centricités, et il n’est guère plus facile do
tirer de 1 analyse de son exposition des
indices pour déterminer avec exactitude
le caractère de la production pendant
cette fin de siècle. La seule particularité
évidente est le développement de la fabri- |
cation de la montré d'art, ou qui, tout au
moins, tend à passer pour telle. A aucune
Exposition antérieure, je n’avais vu une
proportion aussi considérable de pièces
décorées. Le goût actuel du public riche
est incontestablement porté vers ce genre,
auquel il a été initié par l’organisation des
musées d’art et d’industrie, par les expo-
sitions rétrospectives et par les ouvrages
d’érudition artistique. En écartant, par
principe, toute la catégorie des pièces
dites dß haute nouveauté, les pommes de
parapluies et do cannes, les briquets ou
porte-cigarettes, les bracelets, les noi-
settes, oignons, bonbonnières, etc., les
pièces fabriquées spécialement en vue de
l’Exposition actuelle, avec des tours
Eiffel, des portraits de M. Carnot, des
emblèmes et des allégories du centenaire,
ou peut déclarer, sans trop de présomp-
tion, qu il y a dans cotte seclion plus d’art,
plus de goût et d’originalité, que dans la
section des horloges et des pendules.
L’imitation servile et banale du passé s’y
manifeste moins audacieusement et les
témoignages d une préoccupation élevée
do produire de belles œuvres y sont plus
nombreux.
L’industrie française des horloges et
pendules n'a pas, à l’Exposition, de con-
currents; mais la Suisse lutte do puis-
sance cl outillage, d’habileté technique et
de goût avec la France, dans la section
dos montres. Elle a envoyé de fort belles
pièces, d’une forme gracieuse et d’une
décoration artistique. Les ciseleurs et les
graveùrs ont cherché, sans faire de la
compilation ni du vieux neuf, des inspi-
rations fécondes dans les meilleures épo-
ques d art, tant en Italie et en Allemagne
qu’en France; ils se sont ingéniés à varier
les procédés de décoration, à mettre delà
couleur dans leurs compositions, par des
alliages habiles de métaux et par l’emploi
intelligentdesémauxmoderneset anciens.
Nos artistes, cependant, ne leur sont
inférieurs en rien: ils n’ont ni moins de
passion pour leur métier, ni moins de
souci de la perfection, et, tout chauvi-
nisme écarté, je n’hésite même point à
tenir encore non seulement les Parisiens,
mais ceux de Besançon, comme les vrais
maîtres pour faire une pièce d’art. L’Ex-
position en est la preuve éclatante. Il y a
là des œuvres exquises, aussi originales
qu’élégantes et d’un travail fort précieux.
J ai eu grand plaisir également à décou-
vrir que les montres à matières de prix,
perles, diamants, pierres, sont moins
nombreuses qu’autrefois ; que les pièces
à bon marché témoignent toujours, par
quelque côté, d’une préoccupation d’art.
Dans dos fantaisies excentriques même,
des réveille-matin de poche, des montres
à mouvements invisibles, des cigales qui,
par leur cri, remplacent le traditionnel
nœud de mouchoir, on a fait appel au
concours d un artiste pour donner une
plus-value à la trouvaille de l’inventeur.
C’est là un indice très caractéristique du
développement du goût.
En résumé, cette grande industrie
nationale de l’horlogerie est en progrès ;
nous devons nous en féliciter, car elle
occupe plus de 60,000 ouvriers, et donne
lieu a un mouvement commercial annuel
d’environ 65 millions de francs.
Marius Vachon.
^EXPOSITION DU BRÉSIL
L’étude de la situation actuelle du Brésil nous
est rendue facile par une série de publications
faites sous la direction de M. de Santa-Anna
Nery, journaliste brésilien, qui écrit le français
de façon à nous faire envie, et qui est un éco-
nomiste estimé en même temps qu’un bon écri-
vain. C’est d’abord un grand ouvrage, Le Brésil
en 1889, rédigé avec le concours d’un certain
nombrede littérateurs et de savants nationaux;
puis c’est un Guide de l'émigrant au Brésil, et
enfin une Notice descriptive sur le Brésil à l’Ex-
position de 1889. On trouve dans ces publica-
tions un ensemble de renseignements qu’on de-
manderait vainement à d’autres documents
français. Il convient cependant de les manier
avec prudence. Je ne sais pourquoi les totaux
quinquennaux y sont constamment donnés pour
des moyennes, ce qui pourrait induire grave-
ment en erreur.
Le Brésil avait exposé en 1867 et s’était
abstenu en 4878. Il y avait donc vingt-deux ans
qu’il ne s’élail présenté iï notre examen. Il l’a
fait cette fois avec une ampleur dont il faut re-
mercier les particuliers qui ont pris l’initiative
de son Exposition.
Trois grands faits dominent son histoire éco-
nomique pendant celte période: l’émancipation
des esclaves et l’accroissement considérable de
1 immigration qui en est la conséquence; l’ou-
verture du bassin de l’Amazone au commerce;
le développement extraordinaire de la culture
du café.
Le recensement de 1872, le dernier qui ait été
fait, avait relevé l’existence de 1,510,806 es-
claves sur une population totale de 9,930,472 ha-
bitants. L’asservissement de ces malheureux
était une honte, mais la question était de sa-
voirs! la suppression de cette honte n’entraîne-
rait pas la ruine des cultures du pays. Il n’a
point manqué de prophètes de malheur pour
prédire au Brésil qu’il ne remplacerait pas le
travail servileet que par conséquent c’en serait
fait do sa force productive. Il est consolant de
constaler que ces prophètes se trompaient et
que, pour celte fois, la fortune a été du côté de
la e^nérosité.
La loi qui a émancipé définitivement les es-
claves, et qu’on a baptisée du beau nom de « loi
dorée », n’est que du 13 mai 1888; elle n’a donc
pas encore donné ses conséquences, mais l’ex-
périence du passé permet de les attendre sans
inquiétude. En effet, la traite étant supprimée,
l’esclavage ne se recrutant plus, et une série de
mesures d’affranchissement ayant été prises, le
nombre des esclaves avait été réduit de moitié