L'exposition De Paris 1889
Troisième & quatrième volumes réunis
År: 1889
Forlag: A La Librarie Illustree
Sted: Paris
Sider: 324
UDK: St.f. 061.4(100)Paris
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O
L’EXPOSITION DE PARIS
L’ART DES ÉTATS-UNIS
AU CHAMP DE MARS1
Au rebours deM. Harrison, MM. Hitch-
cock et Pearce n’ont pas cessé de progres-
ser. Quoiqu’il expose chez nous depuis
une quinzaine d’années, M. Pearce ne nous
est connu, réellement connu, que depuis
peu. C’est de 1886 que date sa Bergère
picarde, la première de ses toiles véri-
tablement personnelles ; clic lui fit sur
l’heure une réputation. Sa Sainte Gene-
viève parut l’an d’après ; il exposa en
1888 la Rentrée du troupeau. Nous ne
voyons à l’Exposilion, signé de lui, qu’un
do ces trois tableaux, mais ce tableau, à
mon sens, est le meilleur : la Bergère
picarde. C’est une lande àpeine ondulée,
couverte de maigres herbages, et de
maigres moutons, tout au long d’un sen-
tier raboteux, y promènent leur faim.
Tandis que son chien les surveille, la ber-
gère s’est arrêtée, pensive, l’œil mi-clos,
les deux mains au bâton qui lui lient lieu
de houlette. La lande est poudreuse, le
ciel gris, les haillons do la bergère sont
gris également, et de lu monotonie do ces
notes grises une mélancolie sans nom se
dégage. Les terrains ont de la solidité, le
paysage captive, la note est saisissante et
très juste; l’œuvre est depuis longtemps
populaire, et le mérite ; c’est de belle et
saine poésie.
Nous voyons encore au Champ de Mars,
de M. Pearce, d’autres moutons gardés
par un berger, dans une plaine qu’argen-
tent les rayons de la lune, et un harmonieux
portrait déjeuné femme brune. Elle porte
avec désinvolture sous son bras, un petit
chien blanc à longues soies, et son corps,
vêtu d’une robe bleue, se détache agréa-
blement sur fond gris.
Le succès des bergères de M. Pearce
lui a valu des imitateurs dont quelques-
uns no sont pas dépourvus de talent. Tel
est M. Birge Harrison ; la bergère en
mante grise qui, dans son tableau de
Novembre, glisse lentement, dans les
bois, sur le sol jonché de feuilles roussies,
est proche parente de la Picarde de
M. Pearce, etje la louerais davantage sans
cette ressemblance qu’on n’a pas assez
lieu de croire fortuite.
AM. II itchcock on ne reprochera rien do
pareil. Plus que personne, chaque année,
depuis 1 accueil enthousiaste que le public
a lait a ses Tulipes, il essaye de varier
scs sujets et de présenter sous une forme
nouvelle son talent. A l’instar de AI. Mel-
chors, il goûte infiniment la Hollande,
mais il la goûte surtout dans le paysage,
il l estime surtout pour les effets que l’on
tire du bleu et du lilas de ses corsages. Je
1. Voir les n" 56 à 38.
ne m’étendrai ni sur ses Tulipes, trop
connues, ni sur sa Maternité, oîile charme
du paysage ne saurait compenser le peu
de solidité du corps de sa jeune mère,
mais j’insiste sur VAnnonciation, si déli-
catement peinte, avec sa silhouette de
jeune femme en robe bleue, penchée sur
une éblouissante rangée de lis blancs.
C’est d’un coloris raffiné, qui nous donne
les sensations les plus douces et les plus
ingénieusement tendres.
M. Ridgway Knight se complaît aux,
scènes rustiques, qu’il sait choisir à mer-
veille ; c’est la Veuve consolée par les
commères, ses voisines; c’est la Rencon-
tre, au détour du chemin, <1'1111 berger et
de deux accortes jeunes filles; c’est, sur le
bord d’une rivière, à l’heure où les loin-
tains, noyés déjà dans la brume, s’estom-
pentde bleuâtres vapeurs, deuxpaysannes
hélant un passeur. Tout cela est fortbien,
et du dessin le plus châtié, maisM. Knight
trouve-t-il indispensable de lécher à ce
point sa peinture et de donner à ses filles
dos champs des grâces si peu rustiques et
venues de FOpéra-Comique en droite
ligne?
L’orientalisme est représenté d’une
façon fort brillante par les belles architec-
tures indoues et les scènes vivantes,
dramatiques au possible, de M. Weeks.
Lo soleil asiatique rutile, et flamboie,
dans son œuvre, sur des Processions de
mariage, des Cortèges de Rajah, des
Enterrements de fakir. AI. Bridgman ne
se contente pas de ^ous donner ses élé-
gantes Mauresque?, enveloppées de longs
voiles d’un blanc pur, et ses pittoresques
scènes algériennes ; il nous fait voir, par
le portrait de sa femme, qu’il manie dans
la perfection le pinceau du portraitiste
féminin.
La Bretagne a, dans les tableaux de
M. Mosler, un historiographe inspiré. On
peut voir do lui, au Luxembourg, une
toile excellente, le Retour ; ou en verra
do non moins bonnes au Champ de Mars.
Je signalerai surtout de lui le Petit corne-
museux, le Repas de la moisson, les
Der niers moments et les Derniers sacre-
ments ; l’œuvre de AI. Mosler est émue,
simple et sincère.
A part M. Vail, un Français, puisqu'il
est de Saint-Malo en Bretagne, les Etats-
Unis ne brillent point par leurs tableaux
de marine. 11 est vrai qu’on aurait peine
à rêver œuvre plus vigoureuse et,plus,
ferme que ce Port de pêche dù au talent
de M. Noël.
Bornons-nous maintenant à citer les
fleurs do Mme Greatorex ; les gamins de
M. Ryder; F Imprudent et la Fille du
fermier, (rune élève de M. Bouguereau,
M110 Elisabetli Gardner, qui, à présent,
pourrait lutter avec lui ; les moutons de I
M. Fisher ; Après le déjeuner, de
M. Hassam ; un Soir d'hiver, de M. Davis ;
un Clair de lune, do M. Coffin; la Place
de la Bastille, de M. Boggs ; un Soir de
M. Dow; une Soirée prés du lac, de
M. Allen; laMarcellerie, M. Donoho.
L’influence du peintre allemand Lieber-
mann a donné naissance à une jolie scène
hollandaise de M. Mac-Ewcn ; nos dessi-
nateurs Pille et Renouard ont inspiré,
l’un M. Abbey, l’autre M. Reinhart, qui,
déplus, est Fauteur de deux toiles remar-
quablement composées et remarquable-
ment peintes, Épaves et XAttente de
l'absent.
Joignons-y los grisailles de M. Cox, ot
les allégories de M. Lgw notons, dans la
sculpture, une œuvre des plus distin-
guées, les Montreurs d'ours, de M. Wil-
liam Bartlett, et nous n’aurons rien omis
do ce qui peut ajouter à la gloire des ar-
tistes américains.
Thiébault-Sisson.
BEAUX-ARTS
LA SCULPTURE ÉTRANGÈRE 1
Il est à remarquer que ces prestidigi-
tateurs habitent Florence et Milan. C’est
particulièrement dans ces deux villes que
l’on tourmente lo marbre, qu’on le trans-
forme en broderies, en étoffes, en moires,
en salins, on tapis, en peluches, eu gazes,
en plumes, en chaînes démontré; qu’il
est gravé, tuyauté, ruché, strié. Unsculp-
teur milanais qui se respectera ne modè-
lera jamais une draperie sans accuser si
clic est do laine, de coton ou de soie. Des
artistes do la valeur de M. Vêla sont
tombés dans ces enfantillages. A Rome et
à Venise, on a conservé un certain senti-
ment de la dignité qu’exige la statuaire ;
on y produit encore quelques œuvres qui
invitent à la i’éflexion, comme celle de
M. Ferrari que nous citions plus haut.
Nous estimons qu’il doit paraître terrible-
ment vieux jeu.
L’Italie a aussi, comme la France, ses
sculpteurs naturalistes. Ils travaillent
ordinairement à Naples; ou plutôt, c’est
dans cette ville que, sous lïnfluence de
M. Gemito, s’est développé le mouvement
qui, depuis, s’est répandu dans toute la
péninsule. On se rappelle la surprise
qu’excita, il y a une quinzaine d’années,
l'apparition, à notre Salon, du Pêcheur,
de M. Gemito. Ce gamin, ramassé et copié
sur le port de Naples, était d’une vérité
criante. On ne pouvait nier la vie extra-
ordinaire qui l’animait; mais la vie n’est
pas la beauté, et il rayonnait de laideur.
1. Voir le n" 88.