L'exposition De Paris 1889
Troisième & quatrième volumes réunis
År: 1889
Forlag: A La Librarie Illustree
Sted: Paris
Sider: 324
UDK: St.f. 061.4(100)Paris
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L’EXPOSITION DE PARIS
Ces notions établies, voyons ces échan-
tillons de la gravure photographique par
le gillotage et ceux de la gravure pho-
tographique directe.
Toutes les productions de la gravure
photographique, soit qu’elles présentent
une utilité commerciale, par le gillotage
et la gravure photographique en relief,
ou qu’elles répondent à des besoins pure-
ment artistiques, par la gravure en creux,
sont très largement représentées à
l’Exposition actuelle.
iM. Gillot fils, M. Michelet, M. Ch. Petit
présentent de magnifiques spécimens de
gillotages.
M. Dujardin produit, on le sait, d’ado-
rables œuvres par la gravure en creux ;
M. Lumière, de Lyon, s’est également
distingué par l’exécution de bonnes gra-
vures photographiques.
Ce serait une lâche trop délicate que
de chercher à décerner la palme à Fuii
ou à l’autre de ces divers artistes. Le
jury de l’Exposition a déjà prononcé,
dans la distribution qu'il a faite des ré-
compenses, sur la valeur comparée de
leurs œuvres. 11 nous dira, quand ses
rapports seront rendus publics, quels pro-
grès a faits récemment la gravure photo-
graphique et l’avenir qui peut lui être
réservé dans l’industrie et les arts.
Ce qui nous a frappé seulement, et ce
que nous voulons faire ressortir, en ter-
minant, c’est le caractère éminemment
artistique que présentent les gravures
obtenues par la photographie. Il nous
semble qu’à l’heure qu’il est la photo-
graphie s’arrache aux sentiers battus du
mercantilisme, et s’élève dans une région
plus haute, qu’elle arrive, sans prétendre
à remplacer la gravure, à conslituer (tou-
tefois sur une échelle inférieure) une
forme particulière de cette manifestation
de l’art.
Aujourd’hui, l’appareil photographique
nous apparaît comme un moyen nouveau
(lonl nous pouvons disposer; comme un
procédé, jusqu’ici sans analogue, pour
Iraduire matériellement l’impression que
l’ail sur nous l’aspect delà nature. Autre-
fois, l’artiste avait à sa disposition le
pinceau, le crayon, le burin, la pierre
lilhograpbique ; il a de plus, maintenant,
l’objeclif de la chambre obscure. L’objec-
tif est un instrument, comme le crayon
on le pinceau; la photographie est un
procédé, comme le dessin et la gravure;
car ce qui fait l’artiste, c’est le sentiment,
et non l’outil. Tout homme heureusement
et convenablement doué peut obtenir les
mêmes effets avec l’un quelconque de ces
moyens de reproduction.
Aux personnes que celle assimilation
pourrait surprendre, nous ferons remar-
quer qu’un photographe habile a tou-
jours sa manière propre, tout aussi bien
qu’un dessinateur ou un peintre; de telle
sorte qu’avec un peu d’habitude on re-
connaît toujours, au premier coup d’œil,
l’œuvre de tel ou tel opérateur, et, bien
plus, que le caractère propre à l’esprit
artistique de chaque nation,se décèle avec
une singulière et frappante évidence, dans
les œuvres sorties des différents pays.
Vous devineriez d’une lieue un paysage
Tableau d’autel.
Émail avec monture en bronze ciselé et doré.
(Exposé par M. Barbedienne.)
photographique dû à un artiste anglais,
;ï sa couleur fade, guindée et monotone,
à la presque identité qu’il présente avec
une vignette anglaise. Jamais un pho-
tographe français ne pourra être con-
fondu, sous ce rapport, avec un de ses
confrères d’outre-Munche.
Nous ajouterons que l’individualité de
chaque photographe demeure toujours
reconnaissable 4ans 8011 œuvre. Faites
reproduire, par différents opérateurs, un
même site naturel; demandez à différents
artistes le portrait d’une même personne,
et aucune de ces œuvres, reproduisant
pourtant un modèle identique, ne ressem-
blera à l’autre; »dans chacune d’elles, tout
ceque vous reconnaîtrez, c’est la manière,
ou plutôt le sentiment de celui qui l’a
exécutée.
Si donc l’objectif n’est qu’un instrument
de plus dont nous disposons pour tra-
duire l’aspect de la nature, si le photo-
graphe conserve dans ses œuvres son
individualité, sa manière propre, le sen-
timent qui le distingue et l’anime, on est
bien forcé de reconnaître que la photo-
graphie fait véritablement partie du
domaine des Beaux-Arts. Au lieu de n’y
voir qu’un simple mécanisme à la porli'e
du premier venu, il faut donc s’efforcer
de la pousser plus avant encore dans lu
direction artistique; il faut applaudir aux
efforts de ceux qui travaillent dans cet
esprit élevé, et souhaiter que leur exem-
ple trouve beaucoup d’imilateurs.
Nous avons signalé les plus intéres-
santes nouveautés que l’on rencontre
dans les salles de l’Exposition de photo-
graphie, celles qui marquent les progrès
récents de ses applications aux sciences
et aux arts. Un très curieux musée ré-
Irospeclif est annexé à cette même expo-
sition. C’est une collection d’appareils
qui remontent aux premiers temps et à
l’origine de la photographie. Les per-
sonnes qui ont le culte des souvenirs dans
les sciences et dans les ails, ne verront
pas sans intérêt celle évocation liislori-
que des débuts et des progrès successifs
delaphotograpliie.
Les appareils et les spécimens des
épreuves métalliques de Daguerre, les
gravures photographiques sur papier de
Niepce, de Talbot, de Bayard, sont réunis
dans les premières vitrines. On voit, dans
d’autres, les épreuves et les appareils de
Niepce de Saint-Victor, l'inventeur du
négatif sur verre albuminé. Plus loin, se
trouvent les appareils de Poitevin, un des
maîtres de cet art, l'inventeur du procédé
à la gélatine chromatée, qui a servi de
point de départ et sert encore de base à
la gravure photographique.
Celle collection, qui forme comme une
histoire delaphotograpliie, est d’un inté-
rêt sans égal. On ne peut se défendre
d’un sentiment de surprise, quand on met
en parallèle les premières ébauches de
Daguerre et de Niepce, avec les produits
merveilleux que, donne aujourd hui la
photographie. Du daguerréotype, qui exi-
geait un temps considérable de pose, et ne
donnait qu’une image fugace et unique,
aux appareils qui produisent une image
permanente en un cinquantième de se-
conde, quelle stupéfiante enjambée!
Louis Figuier.