L'exposition De Paris 1889
Troisième & quatrième volumes réunis
År: 1889
Forlag: A La Librarie Illustree
Sted: Paris
Sider: 324
UDK: St.f. 061.4(100)Paris
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L’EXPOSITION DE PARIS
LE CONGRÈS
DES TROIS AMÉRIQUES
Dans un précédent article nous avons
passé rapidement en revue les richesses
que l’Amérique du Nord, l’Amérique cen-
trale et l’Amérique méridionale offraient
aux yeux des visiteurs de l’Exposition
Universelle. Nous avons constaté les im-
menses ressources de ces pays nouveaux,
les progrès de leur agriculture et de leur
industrie, les réalités du présent et les
promesses de l’avenir. Dans l’évolution
commerciale qui s’annonce et dont ils sont
les précurseurs, ils joueront le rôle prin-
cipal. Ce que sera ce rôle et les consé-
quences qui en découleront pour l’Europe,
c’est ce qu’il nous reste à déterminer.
L’aînée de ces républiques, — bien
qu’elle ne compte encore qu’un siècle
d’existence nationale, —la plus puissante
de toutes et aussi la plus peuplée, les
Etats-Unis, disions-nous, aspiraient à
prendre la direction du mouvement; leur
ambition ne visait à rien moins qu’à dé-
tourner à leur profil exclusif les bénéfices
d’un commerce que l’Europe leur dispute.
Ils ont pris l’initiative et, le 1er oc-
tobre 1889, sous la présidence de
M. Blaine, secrétaire d’État, se réunis-
sait à Washington le Congrès des trois
Amériques. Le but officiel de cette réunion
élait d’étudier : l”les mesures tendant à
maintenir la paix et à encourager la pros-
périté des divers États de l’Amérique;
2°les mesures en vue de la formation d’une
union douanière, grâce à laquelle le com-
merce des nations américaines entre elles
serait, autant que possible, encouragé;
3° l’établissement de communications ré-
gulières et fréquentes entre les ports des
divers Étals américains et les ports de
chacun d’eux; 4° l’établissement d’un
système uniforme de droits de douane
pour régir le mode d’importation et d’ex-
portation des marchandisés, pour en dé-
terminer la classification et l’évaluation;
5" l’adoption d’un système uniforme de
poids et de mesures, et aussi de lois
pour la protection des marques de fa-
brique et pour l’extradition des crimi-
nels ; 6° l’adoption d’une commune mon-
naie d’argent ayant cours légal dans
toutes les transactions entre tous les
citoyens des Étals américains ; 7° l’adop-
tion d’un plan définitif d’arbitrage pour
tonies les questions cl contestations;
7° enfin, examen de tous autres sujets
relatifs à la prospérité des divers Etats
représentés.
Conçu, en 1882, par le président Gar-
field, qu’une mort tragique l’empêcha de
mener à bien, repris en 1886 parle sénateur
Frye, et en 1889 par M. Blaine, secré-
taire d’État du président Harrison, ce
projet n’est que la paraphrase et l’exten-
sion de la fameuse Doctrine Monroe
étendue, appliquée à tout un continent.
La grande république américaine a, elle
aussi, semble-t-il, sa mission providen-
tielle, sa manifest destiny, pour parler le
langage de ses orateurs et de ses hommes
d’Etat, et cette mission s’incarne dans
le mot d’ordre de Monroe et du sénateur
Sumner.
Les mois d’ordre ont leur histoire.
Programmes d’un parti politique ou d’une
idée nationale, ils résument sous une
forme concise, intelligible à tous, les ten-
dances d’une époque et les aspirations
d’un peuple. Le jouroù, pour la première
fois, dans le Congrès des États-Unis,
le sénateur Suniner parla de la mani-
fest destiny des Etats-Unis, le mot fit
fortune; il remplaça celui de « Doctrine
Monroe » qu’il résumait et qu’il élevait
ainsi à la hauteur d’un dogme. La « Doc-
trine Monroe », première consécration
officielle de la politique annexionniste,
est, en Amérique, la source autorisée à
laquelle on puise des arguments en fa-
veur de toute extension d’influence, sans
se préoccuper des circonstances assez
singulières qui lui ont donné naissance.
En 1823, James Monroe élaitprésident
des Etats-Unis. Les colonies espagnoles
venaient de secouer le joug de la métro-
pole. Cette grande monarchie de Charles-
Quint, sur laquelle le,soleil ne se cou-
chait jamais, achevait de s’effondrer. Le
Mexique, un empire, s’affranchissait le
premier; puisla Plata, l’Uruguay,Buenos-
Ayres, le Paraguay, le Chili, la Bolivie, le
Pérou, des provinces grandes comme des
royaumes, proclamaient et affirmaient
leur indépendance. Sur tous les points,
battus, écrasés, les Espagnols cédaient
après une lulle héroïque, ne conservant
plus un coin de terre sur ce continent
découvert, subjugué, colonisé par eux.
Des merveilleuses conquêtes des Pizarre
et des Corlez, de laut de sang versé, de
tant d’injustices commises, il ne restait
rien que le vague espoir d’une interveii-
lion diplomatique de l’Europe.
L’Europe coalisée avait renversé l'em-
pereur Napoléon, ramené la France dans
ses anciennes limites, rétabli la dynastie
des Bourbons. La Sainte-Alliance agitait
la uueslion d’indemniser l’Espagne et de
lui tenir compte de la part qu’elle avait
prise à ces grands événements, en lui
restituant, sinon tonies ses colonies, du
moins quelques-unes d’entre elles : le
Pérou et la Bolivie. Le gouvernement
anglais, sans combattre ouvertement ces
velléités de restauration, les voyait avec
déplaisir. George IV régnait en Angle-
terre. Caiining remplaçait, au Ministère
des Affaires étrangères, lord Castlereagh
qui venait de se suicider dans un accès
d’aliénation mentale. Non content de dé-
tacher l’Angleterre de la Sainte-Alliance,
Canninglit inviter sous main le président
des Etats-Unis à se prononcer contre
toute tentative d’intervention de l'Europe
dansles affaires d’Amérique, s’engageant,
de son côté, à reconnaître officiellement
l’indépendance des colonies espagnoles.
James Monroe n’eut garde de négliger
l’occasion qui lui était offerte d’affirmer
hautement le rôle que les États-Unis se
proposaient de jouer sur le continent
américain. Dans un message célèbre
adressé au Congrès, il déclara qu’après
l’initiative prisepar les États-Unis et suivie
par les colonies espagnoles^ « l’Amérique
devait être à l’avenir affranchie de tonie
tentative de colonisation et d’occupation
étrangère. Améric/ue auæ Améri-
cains. »
Cette audacieuse affirmation dépassait
de beaucoup les suggestions de Canning.
Elle mettait l’Europe en demeure d’éva-
cuer le Nouveau-Monde, et l’Angleterre,
maîtresse du Canada, n’entendait nulle-
ment l'abandonner. Toutefois Canning
s’en tint à quelques remontrances sur la
forme; son but élait atteint. En présence
du mauvais vouloir évident de l’Angle-
terre et du langage menaçant des États-
Unis, la Sainte-Alliance renonça à son
projet. James Monroe avait bien mérité
de son pays. En 1803, ambassadeur en
France, il avait signé le traité d’acquisi-
tion de la Louisiane; en 1819, il avait
négocié l’achat de la Floride à l’Espagne
moyennant 25 millions de francs, et il ter-
minait sa deuxième présidence par une
déclaration dont ses successeurs devaient
tirer des conséquences que l’Angleterre
ne prévoyait pas alors.
En reprenant et en étendant démesu-
rément la portée de l’idée formulée par
Monroe, il y a trois quarts de siècle, le
président Harrison et M. Blaine ne visent
à rien moins, aujourd’hui, qu’à la création
d’une ligue amphictyonique don t le mem-
bre le plus actif, le plus riche et le plus
puissant, la République des États-Unis,
serait le directeur elle chef. Double ligue
défensive : contre l’invasion des flottes et
des armées de l’Europe, par qui ce con-
tinent a été découvert, colonisé et peuplé;
contre les produits manufacturés de l’Eu-
rope dont la concurrence est redoutable
pour ceux des États-Unis, où la main-
d’œuvre coûte plus cher. But essentielle-
ment pratique et commercial qui consiste,
ainsi que le met en vive lumière l’in-
téressant rapport de MM. E. Lourdet et
A. Prince à la Chambre syndicale des
négociants-commissionnaires, à protéger
l’industrie américaine contre celle de