L'exposition De Paris 1889
Troisième & quatrième volumes réunis
År: 1889
Forlag: A La Librarie Illustree
Sted: Paris
Sider: 324
UDK: St.f. 061.4(100)Paris
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X.
L’EXPOSITION DE PARIS
LA RELIURE D’ART1
MM. Marius Michel et fils arrivent
presque ex-œquo avec AI. Cuzin, qui lés
dépasse à peine de plusieurs filets. — On
sait la grande notoriété de ces relieurs
qui savent lut 1er parla plume et le crayon
en faveur de leurs idées graphiques, et
dont plusieurs ouvrages techniques ont
déjà été publiés sur la reliure artistique
et industrielle. — Avec une grande ha-
bileté de faire, un dessin généralement
savant, une grande solidité dans la prépa-
ration du volume, MM. Marius Michel
ont un grand souci de faire nouveau en
persistant à s’appuyer sur la méthode et
la logique mathématique des anciens. Ils
argumentent sur les courbes, sur les li-
gnes, sur les filets, sur les entrelacs, sur
toutes les combinaisons de tracés imagi-
nables et ils réalisent dos plats qui sont
impeccables comme pondération de dé-
coration géométriquement voulue, mais
dont la grâce légère et ce je ne sais quoi
d’Art qui s’appuie sur des riens, sont, à
mon sentiment, trop souvent exclus.
L’un des défauts de ces reliures est
d’offrir un aspect trop lourd, par suite
d’une série de cartons coupés en biseaux
et qui donnent la sensation des anciens
ais de bois du xve siècle.— La décora-
tion le plus souvent exécutée sur le
premier plat — sans répétition sur le
plat du dos — n’est pas toujours heu-
reuse et évoque bien vite l'idée de ccs
albums de photographie très richement
décorés et faits pour la table du salon,
alors que le volume est exclusivement
l'ail pour être placé de champ sur les
rayons d’une bibliothèque et non de plat,
comme un bibelot, sous la glace d’une
vitrine.
MM. Marius Michel ont inventé cepen-
dant une reliure superbe et qui convient
surtout aux livres du moyen âge et de la
renaissance romantique, je veux parler
du cuir incisé et ciselé, puis rehaussé de
couleurs, dont ils nous donnent plusieurs
spécimens d’une rare beauté sous leur
vitrine si richement composée. La plus
largement conçue revêt un exemplaire du
Cantique des Cantiques. — ^Histoire
des quatre fils Aymon, publiée par Lau-
nette, avec aquarelles de Grasset, a été
également habillée par eux en fort cuir
de bœuf damasquiné et ouvré d’arabes-
ques magistrales; c’est une merveille
d’exécution et aussi de goût, et qui fait
un véritable honneur à ces consciencieux
et ingénieux chercheurs dans la voie des
procédés retrouvés et remis au jour avec
l’addition des connaissances acquises.
4. Voir le n° 47.
MM. Marius Michel sont, du reste, fa-
miliers à tous les genres et. ne dédai-
gnent point les mosaïques jetées par tons
à pial à la japonaise; ils savent non moins
sûrement exécuter une ornementation
à filets entrelacés dans le genre Maïoli,
et leur vitrine est d’une variété incom-
parable.
M. Lucien Magnin, de Lyon, encore
inconnu à Paris, a, sous une petite vitrine
d’un mètre carré, fait une exposition fort
suggestive et qui mérite bien de lui valoir
une médaille d’or. — On peut aimer
ou non la manière de « relieur mosaïste »
inventée par M. Magnin, mais il est hors do
doutequccct ouvrier d’art—en dépit d’un
manque de fermeté dans le poussé de scs
dorures — tient la tète de l’exposition,
sinon par l’exécution souvent fautive, du
moins par l’originalité ou la hardiesse
de ses compositions décoratives et parle
curieux procédé de ses mosaïques ombrées
cl dégradées au pinceau par des moyens de
coloration d’une solidité à défier le temps
et le soleil. — Sa reliure exécutée sur
la Mireille de Mistral, édition Hachette
in-folio, avec les figures mosaïquées de
Mireio et de Vincen sur les plats ainsi
que la décoration polychrome du cadre,
est absolument nouvelle. Sa doublure
maroquinée et multicolore de Paul et
Virginie est éblouissante comme un
vitrail moderne ; enfin, ses deux reliures
extraordinaires qui enveloppent la Fran-
çaise du siècle et Son Altesse la Femme
sont d’une exécution ornementale très
riche, très brillante et surtout entière-
ment nouvelle. Je voudrais m’étendre
davantage sut' l’exposition de M. Magnin,
qui pourrait servir de point de départ à
une longue étude sur la Reliure d’art de
demain, niais je ne dois pas oublier que
je dois ici concentrer nies idées en
colonnes et non les développer en tirail-
leuses. Ce pourquoi je me condense.
M. Ruban, l’un- des derniers venus
parmi les préparateurs de maroquin
plein, est en train de former sa réputation
à Paris aussi bien que dans les deux
Amériques. C’est un jeune, un actif, un
fringant, prêt à s’élancer sur la moindre
piste où l’entraîne le collectionneur. Il
comprend, il saisit d’un mot et ne se refuse
à rien sous l’éternel prétexte réduit on
niaise formule, que ça ne s’est jamais
fait. — Il expose une Dame aux Camé-
lias, reliée « à l’emblème », avec un léger
bouquet de la fleur préférée par Marie
Duplessis, fleur dont les pétales et les
feuilles sont fort joliment mosaïqués; sa
reliure du Miroir du monde, très sérieu-
sement exécutée, est d’une grâce abso-
lue, mais ce qui me frappe le plus dans
ma profonde révolte contre la tradition,
ce sont les plats de ses maroquins avec
appliques de médaillons anciens, minia-
tures féminines larges comme l’ongle,
d’un pouce, et ses petits bronzes japo-
nais, éventails et papillons sertis dans le
cuir même, s’harmonisant délicieuse-
ment avec l’ornementation de la dorure.
M. Ruban a droit à tous les encourage-
ments du jury et à tous les éloges des
amateurs. Il laisse concevoir des manières
nouvelles vers lesquelles MM. Edmond
de Goncourt, Popelin, Philippe Burty et
moi-mème avons souvent poussé les
ouvriers relieurs, et qui consistent à
marier au maroquin les émaux, les
miniatures sur ivoire, les médailles an-
ciennes, les broderies d’Oricnt et toutes
les curiosités délicatement ouvragées et
rares qui peuvent s’incruster dans la
peau, avec un très léger relief en plus.
La vitrine de M. Michel Ritter a de
grandes prétentions à l’effet et attire tout
d’abord le visiteur, mais elle ne justifie
point son éclat Irompeur ni par le bon
goût, ni par l’exécution, ni même par
I innovation. M. Ritter fait le cuir ciselé
d’après le procédé de MM. Marius Michel,
mais combien inférieur ! Il fait des mosaï-
ques comme M. Magnin, mais quel tour
déplorable ! il emprunte aux uns et aux
autres, mais il ne sait rien personnifier
avec une supériorité caractéristique.
Je ne parlerai de M. Giraudon que
pour mémoire. M. Giraudon est un maro-
quinier pour la fashion et l’exportation
beaucoup plus qu’un relieur d’art ; la
plupart des ouvrages qu’il expose ont été
exécutés il y a douze ans, par un relieur
de très réel mérite et de haute originalité,
M. Amand, aujourd’hui retraité, dont
M. Giraudon a repris le fonds et la clien-
tèle.
Ccs reliures do M. Amand avaient déjà
été exposées en 1878. Comment le jury
d’admission en a-t-il accepté le placement
à l’Exposition actuelle?
Il me reste à résumer ces notes hâtives.
— L’Exposition des relieurs en 1889
montre des chefs-d’œuvre inspirés par
Fart des prédécesseurs des xvn0 et
xvnie siècles, mais elle ne fait que donner
des promesses pour la création d’un genre
indiscutablement nouveau et d’un style
d’allure toute moderne.
On ne saurait donc trop engager les
bibliophiles, qui sont gens de savoir et
de goût, à tenter des coups d’audace pour
la reliure de leurs livres modernes. —
C’est d’eux, en définitive, que dépend la
solution de la question, car les relieurs
font moins ce qu’ils veulent que ce qui
leur est ingénieusement commandé et
pour ainsi dire imposé, avec la perspec-
tive de voir leur labeur largement rétri-
bué.
Il n’est point de mosaïques, d’effets