PROJETS SUK L’OllIENT.
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De méme, plus tard, il enverra de Malte un de ses aides de camp å Ali, pacha de Janina, qui avait déjå en Groce une influence considé-rable et dont il connaissait les projets ambitieux, qui devaient nécessai-rement ]e brouiller avec le sultan.
L’expédition d’Egypte décidée dans l’esprit de Bonaparte, restait å. faire accepter ce projet å la nation et au gouvernement. Ce n’était pas la premiére fois qu’il était question en Occident de pareille conquéte. Sans remonter jusqu’aux croisades, sans parier des plans que, au temps cle Philippe le Bel, le Vénitien Sanuto proposait å l’Europe, ni méme des projets que concevait, au coinmencement du seiziéme siécle, le génie d’un Ximenés ou d’un Albuquerque, on sait qu’en 1G72, Leibniz avait engagé Louis XIV å tourner contre les musulmans du Nil les forces dont i] menagait la Hollande. Enfin, tout récemment, en 1777, avec M. de Sartines, alors ministre cle la marine, et surtout en 1781, avec M. de Saint-Priest, ambassadeur å Constantinople, il avait été sérieusement question dans le cabinet de Versailles de se dédommager sur l’Égypte des conquétes de Catherine II en Pologne et du coté de la mer Noire, et de donner ainsi å la France une part importante dans le démembrement imminent de I’empire ture. La réussite de l’expédition n’offrait pas de doute; la Porte, trop occupée du coté dela Russie, n’aurait osé s’aliéner la France, et la ca valerie des Mamelouks, trés brave, mais sans artillerie et sans discipline, ne tiendrait pas contre une armée réguliére et contre une flotte dont l’armement, avait été l’objet cle la plus grande sollicitude et des plus louables effbrts. La guerre d’Amérique fit oublier l’expédition pro-jetée. Bonaparte, en remettant le projet en discussion, n’entraina pas l’assentiment unanime; une grande partie de la nation se souciait pen d’une conquéte éloignée, alors qu’il lui semblait possible de frapper l’Angleterre au centre meine de sa puissance et de cliercher å Londres ce que Bonaparte voulait chercher en Egypte et peut-étre dans les Indes. Joseph Chénier était l’interpréte cle l’opinion générale, quand, parlant de cette armée d’Italie qui était å bon droit réputée invincible, il Jinissait ainsi son élégie sur la mort de Hoche :