CONSPIRATION DE PICHEGRU ET CADOUDAL. - MOREAU. 389
jour qu’elle s’était décidée a aller lui faire une visite (1). « Était-ce la peine d’avoir renversé l’ancienne dynastie, disait-elle, pour en établir une nouvelle ? » C’était d’ail-leurs une femme de mérite; elle savait plusieurs langues, peignait la miniature et était pour la musique une des ineilleures éléves de Steibelt; aussi les beaux bals qu’elle donnait a son hotel de la rue d’Anjou-Saint-Honoré étaient-ils fort recherchés. Les royalistes, aussi bien que les républicains mécontents, affectaient de s’y rendre. Moreau pouvait done étre facilement mis en rapport avec les conjurés.
Sans s’engager par aueune promesse, ce général écoutait avec com-
plaisance les confidences qu’on lui faisait. qui tenaient au complot furent bientot connues; il était tres surveillé et il se cachait moins que les autres. Il fut le premier arrété, le 15 février: Pichegru le fut le 28 février, rue de Chabannais; Georges, le 9 mårs, au carrefour de Bussy. Georges avoua hautement ses projets et déelara que les conjurés n’at-tendaient pour agir que la présence d’un prince de la maison de Bourbon. Or le duc d’Enghien, le plus brillant des prin-ces de cette famille, se trouvait préci-
Ses entrevues avec des gens
sément alors dans le voisinage de la frontiére, å Ettenheim, sur le territoire du grand-duché de Bade. Bonaparte était décidé å sévir impitoyablement contre les royalistes et å épargner plutot les révo-lutionnaires. Il résolut cle frapper, s’il le pouvait, un prince de la maison de Bourbon et fut encouragé surtout dans ce projet par Talleyrand (2).
Bonaparte avait toute raison de croire que le duc d’Enghien était le prince attendu par Georges. L’espion qui apporta la nouvelle que
(1) Il n’y avait lå aueune intention blessaute de la part de Mma Bonaparte j elle faisait déjå. uu grand usage du fard. Lorsque Mmc Moreau se présenta, Joséphine venait de faire une promenade cheval : le grand air avait complétement altéré et brouillé les couleurs artificielles de son teint, et il avait fallu réparer ce désordre. (Voy. Imbert de Saint-Amant, Josephine.')
(2) Malgré le soin que mit Talleyrand å rechercher et å. faire disparaitre, lorsqu’il fut membre du gouvernement provisoire en 1814, les piéces qui pouvaient le compromettre, il resterait encore de lui une lettre, ne laissant aucun doute sur ce point. Voyez Sainte-Beuve, Nouveaux Lundis, t. XII, p. 50-52, 132-133.