BONAPARTE DANS LES BUREAÜX DE LA GUERRE.
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crus sur-le-champ que c’était un homme d’esprit, ou du moins fort singulier. Je me rappelle que je trouvais que son regard ressemblait ä celui de J.-J. Rousseau, que je connaissais par l’excellent portrait de Latour, que je voyais alors chez M. N***. En revoyant ce général au nom singulier pour la troisiéme et quatriéme fois, je lui par-donnai ses oreilles de chien exagérées. Je pensai å un provincial qui outre les modes et qui, malgré ce ridicule, peut avoir du mérite. Le jeune Bonaparte avait un tres
bean regard et qui s’animait en parlant. S’il n’eut pas ébé maigre jusqu’au point d’avoir l’air maladif et de faire de la peine, on eut remarqué des traits remplis de finesse. Sa bouche surtout avait un contour plein de gråce. Un peintre, éléve de David, qui venait chez M. N*** oü je voyais le général, dit que ses traits avaient une forme grecque, ce quime donna du respect pour lui. Qaelques mois plus tard, aprés la revolution de vendémiaire, nous sümes que le général avait été présenté å. Mme Tallien, alors la reine de la mode, et qu’elle avait été frappée de son regard. Nous n’en fumes point étonnés. Le fait est qu’il ne lui manquait pour étre jugé favorablement que d’étre vetu d’une facon moins miserable. Et cependant, dans ce temps-lå, au sortir de la Terreur, les regards n’étaient pas sévéres pour le costume. Je me rappelle encore que