PASSAGE DU NIÉMEN. — SÉJOUR A VILNA. 703
masof formait une réserve de 40.000 hommes å Lutsk, en Volhynie. Enfin l’amiral Tcliitchagof allait ramener 50.000 hommes des bords du Danube. Deux corps se formaient en outre å Mosyr, sur le Pripet et sur la Dwina, å Riga et Dünabourg. Un camp retranché était établi si Drissa; c’était le réfugié allemand Pfühl qui l’avait fait éle-ver : il espérait en faire un Torrés-Védras, y jouer le role de Wellington et y arréter Napoléon.
Mais Napoléon, qui avait pour objectif Moscou, forme le plan de pénétrer en Russie par la trouée du Dniéper, c’est-il-dire par le couloir de quinze lieues qui s’étend entre la Duna et le Dniéper, alors paralléles, avant qu’ils ne se dirigent l’un vers le nord l’autre vers le sud et qu’ils n’opposent å l’envahisseur un obstacle des plus difficiles. Pour arriver a Moscou il fallait couper cette immense ligne russe ; par conséquent Macdonald, å gauche, devait refouler Wittgenstein et me-nacer Pétersbourg par Riga et Revel, tandis qu’å clroite Schwart-zenberg contiendrait Tormasof en attirant Bagration au sud. Pendant ce temps, Napoléon, avec la Grande Armée, attaquera Vilna, rejet-tera Barclay de Tolly au nord sur Drissa et la Dwina, tandis que ses lieutenants rejetteront Bagration dans les marais de la Bérézina ou du Pripet.
Entre les deux ailes, le centre marchait sur le Niémen en trois grands corps. Jérome, avec 80.000 hommes, devait passerå Grodno; le prince Eugéne, avec 75.000, å Pilony • Napoléon, avec 220.000, å Nogaraiski, trois lieues au-dessus de Kowno. Le 23 juin, au matin, le corps de Napoléon, au sortir de la foret de Pilwisky, se forma en trois colonnes et descendit des hauteurs environnantes jusqu’au Niémen. L’invasion était commencée. Le sort en était jeté, la fatale expédition de Russie était entreprise et, å la faute politique dont cette guerre était la con-séquence, venait s’ajouter des le début la faute militaire, peut-étre plus grave encore, de commencer la Campagne å la fin de juin, alors qu’il restait trois mois å peine avant l’arrivée de la saison des froids, qui, cette année-lå justement, devait étre si rigoureuse.
Le 25, les colonnes s’ébranlérent, traversérent lentement les trois ponts et se perdirent dans le lointain. Aucun ennemi ne paraissait;