DÉSASTRE DE L’ARMÉE.
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des malades. En route, Napoléon apprit que les Busses marchaient sur Viazma pour lui couper la retraite. Bientöt on franchit le champ de bataille de la Moskova; le ter-rain était piétiné, dévasté, couvert de débris d’armures, d’uniformes, d’étendards, et d’environ 30,000 cadavres; on y retrouva un Frangais encore vivant. A Kolots-koi, Napoléon fit recueillir les mieux portants d’entre les blessés; on en imposa un ä chaque voiture, mais les vivandiers qui en regurent les jetérent dans les fossés.
En chemin, les contingents espagnols et portugais tuaient les prisonniers russes; Napoléon le sut; des lors, ne pouvant ni les échanger ni les relåclier, on les laissa mou-rir de faim. On alla, en deux marches, de Giatz å Viazma. L’Empereur y attendit
Fig. 308. — Betraite de la Grande Armée franQaise. Gravure allemande de l’époque.
trente-six heures le prince Eugene et Davout, qu’il remplaga, å son arrivée, par Ncy, ä l’arriére-garde. Davout, par sa régularité méme, avait compromis son corps.
Le 6 novcmbre, le ciel se couvrit, et bientöt la neige tomba sans Interruption; la terre disparat. « Les soldats, dit Ségnr, sans vivres et sans fen, se trainaient en grelottant; tombaient-ils, bientöt la neige les couvrait, de légéres éminences les faisaient recon-naitre. La route est toute parsemée de ces ondulations, comme un champ funéraire; les plus intrépides et les plus indifférents s’affectent et passent rapidement en détournant leurs regards. Mais, devant eux, autour d’eux, tout est neige, leur vue se perd dans cette immense uniformité. »
Aprés la plaine blanche, une autre plaine blanche.
Les armes tombent des mains ou font geler les doigts. Les soldats errent å l’aventure, sans armes et sans sacs, comme des prisonniers, heureux lorsqu’ils ne sont pas pris par les Cosaqu.es, qui les dépouillent et les laissent expirer nus sur la neige! « Chacun marchait pour son compte, dit Coignet; plus de sentiment d’humanité les uns pour
NAPOLÉON Ier. 91