Ornementation Usuelle
De Toutes Les Époques Dans Les Arts Industriels Et En Architecture
Forfatter: Rodolphe Pfnor
År: 1866-1867
Forlag: La Librarie Artistique de e. Devienne et Cie
Sted: Paris
Sider: 418
UDK: 745.04 Pfn
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mures, et leurs beaux sommets à cimier comm& des casques! Il
faudra bientôt à ce doux monde qui se penche des meubles à hau-
teur d’appui, grassouillets comme des madrigaux, courts sur pied
comme des sonnets, où l’on pourra fouiller assis, car on va vivre
assis désormais. Nous avons horreur du bois nu ; c’est indécent
et grossier : « Les arbres eux-mêmes, en leurs forêts, ont la con-
venance de se vêtir d’écorce ! » Aussi nous ne montrerons le bois
de nos lits que sous une croûte d’or et caparaçonnés d’étoffes.
C’est assez que d’être obligés de laisser voir celui des tables ! Si
nos commodes, nos chiffonnières, nos guéridons, nos consoles,
nos armoires à livres sont en bois, cachons leur charpente
comme la nôtre sous dos flots d’agréments. Fi de la chair! fl du
bois ! Le naturel est vil, le vrai est pour les manants!
Et ce mauvais goût produisit tout de même des merveilles;
l’art sait éclore de l’œuf le plus mal pondu. Coustou sculptait pour
le doreur les figures en bois du lit en or de Louis XIV, ce roi-so-
leil qui se couchait et dormait dans ses rayons, comme un Crédit
mobilier. Le pauvre Nicolas Poussin écrivait à sa nourrice des
Andelys : « En ce pays de Paris, on m’occupe à dessiner des or-
nements de cheminée, des montants de tables de nuit, des fron-
tispices et des couvertures de livres. » Et, plus encore que les
dessins de Poussin, plus que les figures cubieulaires de Coustou,
ce siècle de Louis XIV eut un homme tel qu’il en vient deux ou
trois par histoire de pays, Boule, dont notre temps ignorant et
blagueur ne sait pas bien si c’est quelqu’un ou quelque chose ;
Boule, nom qui, maintenant archi-profané, baptise et masque
effrontément les plus basses œuvres du mauvais meuble. Fils d’un
ébéniste et obligé, selon les vieilles mœurs, d’être ébéniste comme
son père, quand il aurait rêvé d’être Lebrun, Bouchardon ou Man-
sard, ce génie garrotté se fit un avenir dans sa niche. A sa prière
ardente, l’Art divin descendit dans le métier. L’établi devint son
chevalet, le bâti du menuisier sa toile ; ses couleurs furent les
bois étrangers, l'argent, le cuivre, l’écaille, l’étain. Et lorsque,
compositeur inspiré, mosaïste créé, graveur comme Cellini, il
avait peint de cette façon inconnue les tableaux que vous savez,
architecte, il inventait, pour les encadrer, des profils dont per-
sonne, même en les copiant, ne retrouvera la grâce ; sculpteur,
il découpait, pour les relever, des bronzes comme jamais plus on
n’en fera. Ce n est pas que le goût n’en puisse revenir, qui sait :
mais le pouvoir et le désir de payer ces choses ! Boule fit pour le
banquier Samuel Bernard un bureau de cinquante mille francs,
ce qui, à notre cours, en dirait bien cent mille. Vous figurez-
vous à cette heure un financier juif ou chrétien payant cent mille
francs un bureau neuf? Vieux, ce serait une autre affaire :
objet d’art à revendre ! Nous n’avons plus d’amateurs, nous avons
des brocanteurs. On est maquignon de meubles comme de che-
vaux.
Il y eutalors quelqu’un dont le nom estfort demeuré et qui s’ap-
pelait Bérain. Il corrigea Boule et finit par se faire prendre pour
lui. Sur dix Boule retrouvés, il y a neuf Bérain. Les experts s’y
trompent et les catalogues trompent. Comme on est doucement
volé dans ces ventes célèbres !
L’art du meuble alla ensuite, toujours de plus en plus, s’effémi-
nant et se mignardisant. Les leçons majestueuses de Boule et de
Macé de Blois se perdirent. La régence de Louis XV n’avait
que faire de ces exceptions nobles. Les amours étaient devenus
canailles et les meubles durent leur ressembler. On cultivait la
luxure, il fallut la symboliser; Fébénisterie se prit à faire du con-
vexe et du creux; au lieu de pieds de lion elle adopta les pieds
de biche : cela s’appela du galbe et.du contour. On sauve tout avec
des noms. On délaissa de même le grand décor et le grand bronze ;
on fit du composé sous prétexte de simple, en demandant aux
bois des effets inconnus. Sous ce rapport il y avait un mérite, et
les marqueteurs de Louis XV rendirent au meuble, sans le vou-
loir, des services dont on se souvient. On passa en revue tous les
bois exotiques, et ressuscitant les vieux procédés usités en Italie
et en France quelque cent ou cent cinquante ans auparavant, on
teignit certains de ces bois, on en mit d’autres se brûler dans le
sable et tremper dans le lait de chaux ; on en passa au soufre, au
sublimé ; on imagina et on employa tout ce qui pouvait modifier
ou diversifier les nuances. De cela les ouvriers, et même des ar-
tistes, firent sur les meubles des fleurs, des fruits, des attributs,
des animaux, et s’appelèrent peintres en bois. Quelques détails
charmants en sont restés malgré ces formes horribles; l’art ne dis-
paraît jamais tout entier. On encadrait cela dans de minces ba-
guettes de cuivre déplorablement guillochées, on achevait la dif-
formité des tiroirs par des poignées et des entrées de serrure en
fontes odieuses, et voilà ce que furent ces beaux meubles
Louis XV en rose, en violette, en satin, pour lesquels, il n’y pas
bien longtemps encore, une sorte d’engouement s’est remani-
festé.
Il se trouve des malheureux qui les imitent toujours.
Et puis ce fut fini. La mode avait duré cent ans à brouiller les
lignes peu à peu ; à rétrécir et abaisser les pièces ; à chantour-
ner les dessus de porte, les bordures de miroirs, jusqu’à la caisse
des voitures; à mêler le droit et le tortu, le carré et le rond; à
inventer des commodes en marmite, des secrétaires à ventre ;
à ne plus trop rien voir enfin ni savoir en ce qu’on faisait, et se
sauver, comme des limonadiers, par le blanc et l’or dans la déco-
ration! S’il fut jamais vrai de dire que les générations peuvent
être distinguées les unes des autres par les formes des tables,
des chaises, du lit, de la tapisserie, de tout, depuis les plus gran-
des entreprises de l’art jusqu’aux industries les plus vulgaires, et
qu’en ce livre des faits on puisse lire leur signification et leur
esprit, le mobilier du dix-huitième siècle signifiait parfaitement
et de plus en plus le désordre, l’extravagance et la fatigue. Ce
qu’on en voit, pris aux derniers temps de Louis XV, n'a pas l’air
de tenir debout ; on dirait d’un art qui boirait pour s’étourdir.
C’est au point que le jeune rôgne qui venait eut peur et voulut
par une réaction brusque se purifier dans l’antique, change-
ment radical s’il en fut, et peut-être le plus énergique prélude de
la résolution générale qui suivit. Aussi les vieillards suppliaient-
ils et s’écriaient-ils de ne rien déranger ; ils entendaient craquer
les murs !
Ici se place une phase intéressante de laquelle il faut dire
quelques mots.
(la suite prochainement.)
Auguste Luchet.
LA PEINTURE SUR VERRE
(suite )
Antérieurement au douzième siècle, l’absence de toute verrière
ne permet aucune réflexion solide sur la peinture sur verre ; mais
au douzième siècle, cet art se développe avec une telle activité
et excite tant d’enthousiasaie qu’on pourrait presque dire que