Ornementation Usuelle
De Toutes Les Époques Dans Les Arts Industriels Et En Architecture
Forfatter: Rodolphe Pfnor
År: 1866-1867
Forlag: La Librarie Artistique de e. Devienne et Cie
Sted: Paris
Sider: 418
UDK: 745.04 Pfn
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naret du Caire, la coupole de Delhy ou d’Agra, le clocheton de
Pékin et la tour à mâchicoulis d’Ispahan. Il y a clans l'art russo
tout le rayonnement des pays orientaux mêlé à la rigidité froide
du nord, lo rêve des houris asiatiques marié à la légende bleue
des pêcheurs de la Baltique.
L’Exposition du Champ-dc-Mars permet sous ce rapport une
série de rapprochements très-utiles et très-curieux pour l'inves-
tigateur.
A côté de la Yourta des nomades et de YOurasua des Yakouts
ne montre-t-elle pas F Isba presque norvégienne des paysans sta-
tionnaires ? Près du divan en drap rouge brodé de soie que sur-
monteun faisceau d’armes où brille un casque, des cottes de maille,
des fusils incrustés de nacre, comme sur l’Indus ou dans le Rad-
jastan ; près d’un tapis que l’on dirait brodé par les mains d’un
ouvrier de Bénarès ne place-t-elle pas les rudes vêtements des
Lapons et desGroënlandais?Et dans cespetites statuettes peintes,
presque semblables à celles que nous voyons dans la partie in-
dienne de l’exposition anglaise, côte à côte avec le Tartare et le
Toungous, ne fait-elle pas marcher le Samoyède d’Archangel, le
Courlandais, le Finnois et l’Esthonien.
A propos de costumes, un sentiment étrange vous saisit le
cœur lorsque, de retour d’une excursion dans la partie française,
vous parcourez cette galerie si bien aménagée que la Suède, la
Norvège et le Danemark ont consacrée à leurs costumes natio-
naux.
Ces paysannes qui effeuillent leur marguerite, ne les connaissez-
vous pas? Ce brave homme qui part pour le marché, ne l’avez-
vous pas vu quelque part ? Cette famille qui unit sa fille à son
fiancé, mais vous venez de la rencontrer il n’y a qu’un instant.
Meine recherche de la couleur, même coiffure de lin. blanc, même
broderies éclatantes. Ce sont des Françaises du pays de l’Ouest,
du Midi, de Strasbourg ou des côtes de la Manche.
Est-ce que ces gens de la glèbe ne seraient que des membres
séparés de la même famille ?
Ne nous laissons pas distraire par une aussi grave question et
revenons simplement à l’art des pays du nord. Là encore, dès lo
musée de l’histoire du travail, à la vue de cet âge de pierre, dont
les Danois nous donnent une collection si complète, dont les
Russes offrent des spécimens si merveilleux, là encore la même
idée nous poursuit. Partout même hache, même marteau, meme
collier, même bracelet, même flèche, même lance. Moins loin
dans le temps, les vases d’or parlent comme des coupes gauloi-
ses. « Buvez, égayez-vous, et en vous levant le matin dégrisez-
vous à la santé du propriétaire Simeon. » — « Courage, 6 homme,
ne cherche pas la sagesse, mais l’humilité; car si tu possèdes
l’humilité tu triompheras de la sagesse; etc., etc. » Que d'autres
décident; contentons-nous du rapprochement.
Mais quoi ! sur ces Bratines il y a des dates. Je les croyais du
dixième siècle, elles sont du seizième et même du dix-septième
siècle.
C’est ici que la Russie diffère entièrement du Danemark et de
la Norvège.
Il y eut, avant le dixième siècle, comme une invasion forcée
de l’art byzantin chez ce peuple. La cause, nous ne la recher-
chons pas. Doit-on l’attribuer tout d’abord aux iconoclastes qui
chassèrent les fabricateurs d’images chéries des Russes, dans ces
contrées si simples jusque-là? Je ne sais. Mais à cette date il y
eut importation grecque en pleine Russie ; sur cette belle fleur
de Byzance, ainsi transplantée, vinrent se greffer les éléments
divers que nous venons d’indiquer tout à l’heure ; puis elle les
absorba successivement, et seule s'éleva, dominant tout de son
épanouissement superbe.
Pendant ce temps, ailleurs les styles changeaient ; au roman
succédait le gothique, au gothique la renaissance, puis surve-
nait le Louis XIV, le rocaille, etc. La Russie restait la même.
Pierre le Grand, seul, parvint à faire dévier l’art de cette voie
gardée si longtemps.
Les pays Scandinaves, au contraire, avaient suivi les progrès
des arts de France et d'Italie, et créèrent par la suite une renais-
sance particulière, celle du château de Frédériksborg.
Aussi, dans le palais de l’Exposition, dès la galerie de l’his-
toire du travail, ce qui vous frappe, dans la section russe, c’est le
caractère byzantin des portes de Saint-Isidore ou de Saint-Jean
de Rostov, des ornements de la cathédrale de Saint-Dimitri, à
Vladimir ; et dans la section suédoise, danoise et norvégienne au
contraire l’aspect chevaleresque des cuirasses du roi Gustave,
dos écussons armoriés, des f'auchards, des hallebardes, des ban-
nières, des hanaps, des cornes à boire et des éperons dorés.
Au-dessous, on ressent bien le passage du byzantin transformé
dans les portes des églises de Savland ou de Flaa, mais le vrai
caractère Scandinave est parfaitement gothique, pour employer
un mot dont la signification dans ce sens est admise, mais qui
n'exprime pas complètement ma pensée.
Christian IV et la belle Christine Munch, çette duchesse de Va-
lentinois du Nord, sur cet élément gothique, purent facilement
enter la renaissance. Elle fut, dans leur magnifique château de Fré-
dériksborg, ce Fontainebleau danois si malheureusement incen-
dié il y a quelques années, digne d’eux et de leur peuple. L’Ex-
position ne nous laisse qu’un regret. Pourquoi n’a-t-elle, pour
représenter cette phase si curieuse d’un art trop peu connu, que
quelques meubles exécutés d’après les dessins de M. Heinr-Han-
sen ? Une originalité si remarquable méritait des imitations plus
nombreuses. De quoi vous parlerai-je encore dans cette revue si
rapide, où je ne puis qu’indiquer sommairement la marche à suivre
pour ceux qui désirent étudier particulièrement los arts étrangers
exposés au Palais de l’industrie. La mosaïque du professeur Neff,
la porte en cuivre doré, les broderies caucasiennes, les bijoux de
Rudolphi, etc., etc. Il me semble avoir déjà dit un mot des unes,
avoir indiqué les autres. Je me contenterai de louer sans mesure
la manière dont sont exposées toutes ces choses. Ces fines décou-
pures de bois si gracieuses, si délicates, si pittoresques, depuis
le porte-bouteilles des vins de Crimée, jusqu’au dressoir du
musée rétrospectif; depuis le cabaret à volets peints de la galerie
des aliments, jusqu’aux écuries dont nous avons donné le dessin
il y a quelques mois ; et puis, je signalerai à ceux qui mettent la
France si haut comme étude des arts du dessin dans l’industrie :
la Société danoise, pour l’application des arts à l’industrie et ses
magnifiques produits ; le musée d’art et d’industrie de Moscou, et
L'école de dessin technique dite Stroganof, assez semblable à
l’école anglaise dont nous avons déjà parlé jadis, et ses splen-
dides dessins, et je dirai : Sachons au moins suivre, nous qu’on
avait habitués à toujours précéder autrefois.
Henri du Cleuziou.
R. PFNOR, Propriétaire-Directeur.
puris.__ Typ. de Rouge frères, Danon et Frcsnô, rue du Foui’-St-Germaia, 43