Ornementation Usuelle
De Toutes Les Époques Dans Les Arts Industriels Et En Architecture
Forfatter: Rodolphe Pfnor
År: 1866-1867
Forlag: La Librarie Artistique de e. Devienne et Cie
Sted: Paris
Sider: 418
UDK: 745.04 Pfn
Søgning i bogen
Den bedste måde at søge i bogen er ved at downloade PDF'en og søge i den.
Derved får du fremhævet ordene visuelt direkte på billedet af siden.
Digitaliseret bog
Bogens tekst er maskinlæst, så der kan være en del fejl og mangler.
OÆ) 21 (SK.
amour de l’art estun levier puissant, il est vrai, mais qui a besoin
d'avoir un point d’appui solide, je veux dire la fortune et la con-
sidération que le talent appelle autour de lui. Aussi voyons-nous
Van Eyck, plus connu sous le nom de Jean de Bruges, employer
son i)inceau à la peinture des vitraux. C’est probablement le
mérite éminent de cet artiste qui lui a fait attribuer à tort la
découverte des émaux colorants. A ce propos, le lecteur nous
permettra de lui expliquer ce qu’on entend par émaux colorants,
et de lui faire distinguer ces derniers de ce qu’on pourrait appeler
la teinture du verre, dont nous verrons dans ce siècle se pro-
'duire un usage abusif comme de toute invention récente.
Un émail se compose d’une matière vitrifiable qu’on appelle
fondant et d’un oxyde colorant, qui s’appliquent sur une surface
métallique ou argileuse.
Le caractère distinctif des émaux colorants est de faire relief,
d’augmenter l’épaisseur de la substance émaillée et non point de
subir une sorte de diffusion à. travers les molécules du verre
comme la matière tinctoriale qui imprègne les tissus.
Le jaune d’argent, par exemple, colore le verre, le teint et ne
forme point un émail comme les composés de cuivre et de cobalt.
Il existe une autre espèce de verre coloré qui a été confondu
avec les émaux par plusieurs savants, et cette erreur a jeté une
sorte de confusion dans l’histoire des émaux. Je veux parler des
verres à deux couches ou verres plaqués ou doublés. S’il m’était
permis d’emprunter une analogie à une autre industrie, je com-
parerais le placage du verre au placage de l’acajou sur un bois
d’une autre essence. Dans les verres doublés, en effet, on étend
une couche mince de verre coloré sur une couche de verre blanc,
de telle façon que les deux couches soient adhérentes, mais dis-
tinctes par une sorte de stratification. Dans les émaux colorants, l’é-
mail est appliqué sur le verre blanc au moyen du pinceau comme la
peinture sur toile, et la cuisson (non point la cuisson du verrier
qui fabrique le verre, mais celle du peintre sur verre qui le peint),
en le vitrifiant, le fait adhérer intimement au verre sur lequel il
est apposé et où il fait saillie.
Les verres doublés, au contraire, se forment dans une seule
cuisson, celle du verrier ; on cueille une masse de verre blanc
dans un creuset, on la souffle en une boule que l’on plonge dans un
autre creuset de verre coloré en fusion ; la première boule s’en-
veloppe alors d’une couche de couleur ; on continue le soufflage,
et les deux couches, l’enveloppée et l’enveloppante, se dévelop-
pent simultanément. La lame produite présente une surface
rouge, verte ou bleue et une autre blanche. C’est bien là encore
un émail, c’est vrai ; le verre lui-même n’étant qu’un émail. Mais
c’est une feuille de verre de couleur unie intimement à une autre
feuille incolore.
Les anciens usaient cette première feuille mince au moyen du
grès, du poinçon, pour faire reparaître en certains endroits le
verre blanc, et composaient ainsi des dessins variés en opérant
en creux. Aujourd’hui, l’acide fluorhydrique facilite ce travail
en dissolvant la couche superficielle, en traçant des sillons qui
forment les contours du dessin.
Cette discussion, nous permet d’expliquer comment on a at-
tribué à Jean de Bruges la découverte des émaux colorants,
quand ce n’est qu’à la fin du quinzième siècle ou plutôt au com-
mencement du seizième que les peintres-verriers les emploient
dans la fabrication des vitraux. Eug. Oudinot.
(La suite au prochain numéro.}
LÉ
PAVILLON DE S. M. L’IMPÉRATRICE
AU CHAMP-DE-MARS
Parmi toutes les merveilles et toutes les richesses que l’on
rencontre de toutes parts au champ de Mars, il est un petit chef-
d’œuvre ignoré de la foule, car, seuls, les artistes et les vrais
connaisseurs sont admis à le visiter : nous voulons parler du pa-
villon de repos destiné à S. M. l’impératrice dans le jardin ré-
servé, exécuté par MM. Penon frères sur leurs dessins et sous
leur direction spéciale. Cette œuvre remarquable réclame une
place d’honneur dans cette publication, car elle est, sous tous les
rapports, digne de servir de modèle à tous ceux qui s’occupent
de décoration.
Ce pavillon est, à l’intérieur, un petit salon octogonal percé
de quatre ouvertures (une porte-croisée qui y donne accès et
trois fenêtres), qui alternent avec quatre trumeaux décorés de
peintures d’un genre tout nouveau. La pièce entière, y compris
la coupole qui lui sert de plafond, est revêtue d’un lambris en
bois de sycomore, orné de fines sculptures d’un goût exquis et
d’une exécution merveilleuse. L’ameublement se compose de
quatre chaises, de deux fauteuils, d’une chaise longue, d’un gué-
ridon, et, comme accessoires, d’un petit bureau, de sa chaise,
d’une harpe et d’un pupitre à musique. Ces différents meubles
en bois de sycomore sont recouverts de tapisseries de soie
brodées à la main. Aux fenêtres sont des lambrequins découpés,
aussi en soie brodée, derrière lesquels se drapent des rideaux de
soie blanche s’enlevant en transparence sur de doubles rideaux
de soie bleue.
Toute la décoration et l’ameublement sont Louis XVI. On se
tromperait étrangement, cependant, en pensant que ce chef-
d’œuvre n’est qu’un pastiche consciencieux des admirables com-
positions de cette époque. Loin de là, MM. Penon, en l’adoptant,
ont voulu seulement se tracer un point de départ précis, comme
une base d’opération. Désirant faire une œuvre sérieuse, ils ne
nous ont point donné, sous le prétexte de nous montrer de l’ar-
chitecture de leur façon, un assemblage hétéroclite de motifs
empruntés à tous les temps et à tous les peuples. Ils ont préféré
adopter un style, sans cependant abdiquer leur liberté d’artiste
et leur originalité, et ils ont réussi à créer une œuvre marquée
d’un cachet tout à fait personnel. Ils ne pouvaient, du reste,
mieux choisir, et nous sommes persuadé que ce n’est pas par
pur caprice, ni pour obéir à la mode, qu’ils ont préféré cette épo-
que à toute autre.
En effet, l’art n’est-il pas aujourd’hui dans une situation ana-
logue à celle où il se trouvait au commencement du règne de
Louis XVI? On était alors arrivé à exagérer tous les défauts du
style créé sous Louis XIV, style qui, malgré sa lourdeur, sa pro-
fusion d’ornements et son aspect théâtral, était plein de grandeur
et de majesté. La fantaisie avait envahi la décoration, la mode
et le mauvais goût faisaient partout la loi ; en un mot, on était
arrivé à une véritable décadence.
Des artistes consciencieux et savants, frappés de ce triste état
de choses, entreprirent de ramener l’art à des principes plus sé-
vères, et il se fit sous leur direction une réaction puissante, de