Ornementation Usuelle
De Toutes Les Époques Dans Les Arts Industriels Et En Architecture
Forfatter: Rodolphe Pfnor
År: 1866-1867
Forlag: La Librarie Artistique de e. Devienne et Cie
Sted: Paris
Sider: 418
UDK: 745.04 Pfn
Søgning i bogen
Den bedste måde at søge i bogen er ved at downloade PDF'en og søge i den.
Derved får du fremhævet ordene visuelt direkte på billedet af siden.
Digitaliseret bog
Bogens tekst er maskinlæst, så der kan være en del fejl og mangler.
s
Comment régler, sans elle, cette folle du logis qui s’appelle
l’imagination, et à laquelle on serait forcé de laisser sans cela le
soin de régir et de gouverner toute composition décorative. On
sait comment elle gouverne quand on a le malheur de lui confier
le sceptre.
Un mot sur cette logique française, donc à propos de notre
plat.
Le contenant doit toujours être fait pour le contenu. Si vous
mettez des fleurs dans un vase destiné à servir au repas ou à la
cuisine, il y aura manque d’harmonie, disproportion, battement,
comme on dirait en musique, absolument comme lorsque vous
écrivez au fronton d’un temple une phrase citoyenne, et que
vous le consacrez à honorer la vertu de la plus humble des
bergères.
Dans leurs décorations de faïence, les Italiens n’avaient pas
compris ce principe. Au quinzième siècle, il pouvait vous arriver
à la fin d’un premier service, de découvrir, en maniant le couteau
ou lafourchette, à travers des ossements de volailles, la résurrec-
tion du Christ, la naissance de Vénus, l’annonciation de la
Vierge ou le triomphe de Galathée. Les Nivernais suivirent cet
exemple. Ils étaient au début les fils des Italiens. Rouen et les
autres se gardèrent bien de ce défaut, et de peur d’y tomber, ils
commencèrent même, après l’essai chinois obligatoire, par l’orne-
ment simple. Notre graveur fut encore plus logique tout en étant
plus Gaulois et plus Rabelaisien, le fond de son sujet est empreint
d’une réalité très-caractéritique. Pus n’est besoin de le faire
remarquer au lecteur.
La première préoccupation de tout homme qui est appelé à
composer un édifice, à décorer quelque chose, devrait toujours
être celle-là : Que contiendra ce palais, cette maison, ce pavil-
lon? Et surtout que contiendra ce buffet, cette armoire, cette as-
siette, ce plat, cette soucoupe, ce bol ou cette aiguière. Malheu-
reusement, cette préoccupation occupe bien’peu les esprits de nos
jours ; mais ne désespérons pas, on est revenu de plus loin.
H. no C.
LES ARTS PARISIENS
LE MEUBLE
( Suite)
Le grand mérite du meuble de l’Empire consistait dans sa soli-
dité. Les traditions de la fabrication forte et loyale ne s’étaient
point encore égarées; à défaut d’art, on avait le devoir. Aujour-
d’hui, beaucoup n’ont plus ni l’un ni l’autre; mais pourtant je
crois qu’en cherchant bien on trouverait encore, même à Paris
des ébénistes qui se souviennent et se préoccupent de ce temps
irréprochable, comme, par exemple, M. Grohé,M. Godin, M. Bou-
tung, M. Chaix, M. Pecquereau et quelques autres. Ainsi M. Go-
din et M. Pecquereau sont des élèves de Jacob, le célèbre Jacob
Desmalter, ébéniste do TEmpire et de FEmpereur, honnête en
ses ouvrages dessous comme dessus, disait-on. Il est bon de rap-
peler ces devises des vieux aux jeunes qui les oublient. Les meu-
bles de Jacob étaient difficiles à user, quoique plaqués, à cause
du soin très-grand qu il mettait à les construire. On en voit qui
traînent les déménagements depuis cinquante ans et n’ont pas
encore fléchi. Ses élèves et les élèves de ses élèves font comme il
faisait, autant que possible, avec quelques procédés de plus et un
peu de lourdeur de moins. La feuille étant plus mince aujour-
d’hui, ce n’est peut-être point le même plaqué imperturbable,
mais c’est encore le plaqué honorable et qui a ses raisons de
plaire, même aux adorateurs du massif, tels que nous. La pre-
mière raison est dans le prix ; la seconde est dans le poids ; la troi-
sième, sur laquelle on insiste le plus, est dans la tendance à se
fendre qui afflige ces beaux panneaux massifs.
Or voici comment on plaque, quand on veut faire du riche et
du bon dans 1 espèce. Une planche plus ou moins forte de peu-
plier d’Italie est mise entre deux feuilles de chêne qui sont
placées en contre-fil avec elle, et sur la feuille de chêne s’ap-
plique la feuille définitive et visible, placée en contre-fil aussi :
le tout d'épaisseur convenable et collé de colle à l’épreuve. Bonne
colle est nourrice du bois, disent les maîtres. Ces quatre ou cinq
feuilles contrariées s’établissent ensemble comme un compensa-
teur réciproque de leurs effets, et nous ne nions pas qu’il n’en
puisse résulter des conditions fort bonnes. Le revêtement exté-
rieur est ordinairement en acajou, un noyer d’Amérique, ou en
palissandre, une sorte de cèdre ; quelquefois en ébène, bois ma-
gnifique et rebelle, ou encore en assemblages de petits bois assez
analogues à l’acacia, que nous appelons, à cause deleur couleur ou
de leur tissu, bois de satin, bois de violette, bois d’amarante, bois
de rose, etc. L’Empereur, ce francissime, h’aimait point les bois
exotiques et prétendait fort que l’ébénisterie nationale s’en pas-
sât. Il avait raison, à la rigueur : et le noyer d’Auvergne, le
chêne de Compiègne, le marronnier blanc, le sycomore, l’érable,
le sapin, l’if, le poirier, le frêne, sont dos bois suffisants et pleins
de ressources. L’Algérie, depuis ce temps, nous a donné en
plus le thuya.
C’est ce plaqué beau et bon avec lequel on fait encore des ar-
moires de mille francs, des bureaux de huit cents francs, des lits
de six cents francs, qui sont le succès, l’honneur et la fierté de
notre grande ébénisterie parisienne.
Nous verrons bientôt ce qu’on fait avec le plaqué dit du fau-
bourg.
La Restauration fut donc une lacune, ou tout au plus un temps
d’arrêt dans le meuble. On lui doit le bronze troubadour cepen-
dant, par reflet possible de la Gaule poétique, divertissement litté-
raire d un procureur général. Vers la fin, un mouvement se fit :
les enfants nés de l’Empire étaient devenus des hommes. Ce
mouvement prit un nom et eut un chef; et tout chez nous se mit
à marcher, dans l’art et dans la politique. 11 est donc vrai de dire
que la renaissance du mobilier français est l’œuvre du roman-
tisme etde Victor Hugo. Ceci peutavoir l’air d’un paradoxe, mais
peu importe. Le poëte immense a fait chez nous la révolution de
la littérature et du meuble, qui sont, comme personne n’en doute
les deux habitations de l’homme, l’une pour son corps, l’autre
pour son esprit. Sans la coalition constitutionnelle des chapeliers
et des tailleurs de Louis-Philippe, il l’eût faite aussi dans le cos-
tume, maintenant mieux retombé que jamais, sauf exceptions
rares et mal portées, à nos pantalons soigneux préservateurs de
nos bottes, ot à nos clicipotiux en cinwnt plaQué de soie noire im-
primant sur le front de chacun le trait rouge de l’imbécillité.
Cela est à dire parce que cela est. Ainsi encore de notre littéra-
ture, si profondément remuée par Hugo il y aura bientôt qua-
rante ans, et qui dort inerte depuis qu’il est parti. Seul encore