Ornementation Usuelle
De Toutes Les Époques Dans Les Arts Industriels Et En Architecture
Forfatter: Rodolphe Pfnor
År: 1866-1867
Forlag: La Librarie Artistique de e. Devienne et Cie
Sted: Paris
Sider: 418
UDK: 745.04 Pfn
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30 3 > CüÄ
au sérieux clans nos recherches naïves de reconstruction. Quelle
passion comique et furieuse ce fut au commencement, et combien
le commerce moqueur et voleur en abusa ! Abuser est la maladie
française ; aussi bien de ce qui s’élève que de ce qui tombe.
Plus tard nous vînmes au goût de la Renaissance. C'était moins
grave que l’autre et plus joli ; mieux praticable à nos petites piè-
ces, nos petites mœurs, nos petites étoffes, nos petites affaires.
Aux profils aigus des compagnons d’Albert Durer, les rondeurs
fleuries de Jean Goujon succédèrent dans notre estime et notre
amour. Cela nous ressemblait d’un peu plus près. 0 les beaux
temps toujours copiés et jamais revenus! Siècles où l'on croyait
et aimait ! Les grands artistes dont nous savons les noms, saintetés
qui nous servent à revêtir tant d’erreurs, livraient d’abord leurs
merveilles ; et d’autres après eux, sous eux, venaient, plus près
fie la foule et des habitudes communes, artisans purs, simples et
pauvres menuisiers, pieux ignorants pleins de mission et dégoût,
lesquels, ayant vu ces merveilles des hommes-dieux, les imi-
taient du mieux qu’ils pouvaient, assez ou peu, selon la main et
la flamme. Voilà pourquoi les fouilleurs voyageurs que nous di-
sions ont tant trouvé et leurs heureux patrons tant vendu de
vieux meubles grossièrement exécutés, mais où rayonnaient la
pensée, le dessein, l’harmonie des modèles. En ces jours à jamais
perdus de Fart magistral et pontifical, les fidèles attendaient, en-
tendaient, retenaient la parole, et la rendaient ensuite respec-
tueusement et amoureusement, ainsi qu’ils l’avaient reçue. Cha-
cun selon son savoir et ses forces; tous en vertu de la même foi.
Ce qui ne se fait plus aujourd’hui, où chacun est à lui-meme
son prophète, l’or, mes frères, étant le seul Dieu. Alors on met-
tait sa conseience à premièrement marcher dans les pas de plus
fort que soi, la nature ou son maître. Le’s élèves d’un grand pein-
tre italien allaient jusqu’à gagner scs maladies! Palissy moulait
sur nature les taches de ses fruits et les plaies de ses animaux.
Les choux en faïence, si prodigieux, comme notre cher médecin
Benoist savait encore en découvrir, sont des choux moulés. A
peine maintenant, au contraire, fait-on poser un homme ou une
femme en chair quand on veut produire une figure humaine.
Les plâtres et le mannequin suffisent; l’à-peu-près fait assez
pour les trois que nous sommes, fabricant, acheteur et marchand.
Donc, et pour résumer, de 1832 à 1848 environ, l’art mobilier
français fut et vécut de la réparation et de la copie. Parmi des
meubles tout à fait sublimes et qui sont restés notre épouvante,
on vit se produire bien plus nombreux ceux que j’appellerai des
arlequins, méchantes contrefaçons de carcasses flamandes dans
lesquelles le recarreleur insérait des morceaux de bois de tout
âge et de toute force. C’était trouvé beau pareillement. Nous l’a-
vons dit, l’industrie du meuble ancien doit beaucoup à M. Mon-
bro père, qui était à la fois un amateur et un réparateur distin-
gué. Longtemps son magasin fut comme un musée, générateur
de beaucoup d’autres. Un meuble pris chez Monbro servait de
passe-port à cent pauvretés. 1840 vit son summum. Puis la manie
s’apaisa. On ne voulut plus guère, chez nous, mettre le prix aces
beaux restes, et l’Angleterre les emporta. Elle nous prend tout
notre vieux ainsi, et ce n’est pas sa faute. Si vous voulez écrire
une histoire de France, aujourd'hui, il vous faut aller en prendre
la matière au British-Museum. Nous laissons aller tout pour de
l’argent, monuments et documents. C'est l’affaire de quelques gé-
nérations. La famille française tient volontiers aux os de son
père, un peu encore à ceux de l’aïeul; plus loin, c’est trop loin.
A cause de ce que cela coûterait d’abord, et par indifférence du
passé ensuite. Voilà pourquoi, sans doute, on dit de nous si cou-
ramment que les leçons du passé ne servent pas.
Cette mort de notre passion pour le meuble ancien importait
peu au reste. Le goût s’était refait. Ce qu’on avait vu vieux,
fruste, rongé, piqué, verminé, vermiculé, on désira l’avoir neuf.
L’industrie parisienne eut un enclos de plus dans son domaine.
Cet enclos, bien ou mal cultivé, lui vaut aujourd’hui le quart à
peu près de sa récolte en meubles meublants de toute espèce. Ce
n’est pas beaucoup encore, mais c’est un chemin. Plus de soixante
maisons s’y emploient, avec près de trois mille ouvriers et des
machines. Toutes ces maisons ne sont pas grandes, et tous les ou-
vriers ne sont pas bons. On ne s’appelle point partout Sauvrezy,
Mazaroz, Fourdinois, Grohé, Chaix, Godin, Guéret, etc. Mais
laissez faire, laissez venir, laissez mûrir ; le meuble moderne vrai
arrive, il entre dans la vie moderne, hors des châteaux et des
palais. Il ne s'agit point pour l’avoir de payer des sommes folles ;
les choses à cinquante mille francs des expositions sont affaire de
Tuileries et d’Empereur. Mais pour deux mille ou deux mille cinq
cents francs, dès àprésent vous aurez, si vous voulez, votre cham-
bre à coucher meublée en chêne sculpté, à savoir un lit, une com-
mode-toilette, un buffet à deux corps pouvant servir de bureau,
une armoire, une table, une chaise longue, deux fauteuils et quatre
chaises volantes : tous les sièges garnis en reps de laine, façon
des Gobelins, qui est une étoffe très-forte. Ce sera sobre d’orne-
ments, mais beau de lignes, et durable jusqu’après vos petits-en-
fants. Vous payeriez la même somme pour des meubles en plaqué
commun, une fourniture à renouveler tous les six ans, et qui ne
sera jamais honorable. Évidemment, nous parlons ici pour les mé-
nages sérieux et définitifs, non pour les dames en bois de rose,
au cœur vaste comme le désert, qui changent de mobilier comme
de mari. Beauté, voilà notre rêve; solidité et bon marché, voilà
nos lois. Réaliser l’un en observant les autres, c’est le suprême.
Or, le meuble massif nous assure les lois. Quant à la vérité du
rêve, elle est à trouver par tout le monde, l’ouvrier, le fabricant,
vous et moi, pourvu que nous y soyons en personne. Ceci vaut
une explication.
Auguste Lughet.
(La suite prochainement.)
EXPOSITION UNIVERSELLE DE 1867
“OO-
GALERIE DE L’HISTOIRE DU TRAVAIL.
FRANGE
La commission impériale, se rappelant l’immense succès qui
accueillit, il y a deux ans, l’exposition rétrospective organisée au
palais des Champs-Elysées, par les soins de la société de 1 Union
centrale des Beaux-Arts, décida qu’une exposition semblable
ferait partie du programme de l’Exposition universelle de 1867,
et qu’une des zones du palais du Champ-de-Mars serait affectée
à cette destination, sous le nom de galerie de l’histoire du travail.
Montrer, à côté des produits de l’industrie moderne, les chefs-
d’œuvre des siècles qui nous ont précédés, c’était, en effet, relier
le passé au présent et compléter ainsi l’enseignement que doivent
toujours dégager ces grandes solennités industrielles, qui seront
une des gloires de notre temps.