Ornementation Usuelle
De Toutes Les Époques Dans Les Arts Industriels Et En Architecture
Forfatter: Rodolphe Pfnor
År: 1866-1867
Forlag: La Librarie Artistique de e. Devienne et Cie
Sted: Paris
Sider: 418
UDK: 745.04 Pfn
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ou cinq pièces avec beaux ornements et mouleures qui cachent
leurs commissures : de sorte qu’à les voir il semble qu’elles soient
entièrement d’une pièce se montrant fort belles et de bien bonne
grâce. C’est un ordre Corinthien ainsi que vous le cognoistrez
mieux, par le discours que j’en feray. »
Mais, ce qui fera de Philibert de l’Orme, l’architecte le plus
puissant, sans aucun doute qu’ait possédé la France, c’est l’appli-
cation de la mathématique, à l’art d’architecture, c’est-à-dire
de la merveilleuse coupe des pierres, qui lui a permis de con-
struire mathématiquement, et non par un procédé empirique
comme on faisait avant lui, des voûtes de toutes formes. Aujour-
d’hui encore, les hommes spéciaux trouveront dans son livre, de
précieux renseignements, et cependant, il n’avait à sa disposi-
tion, que son précieux « compas » et en fait de géométrie des-
criptive il ne savait qu’une chose, à savoir que « dans toute figure
il faut d’abord tirer deux lignes à angle droit. »
C’est encore à Philibert de l’Orme qu’est due l’idée première des
prodiges de toiture dont nous voyons aujourd’hui de si surpre-
nantes applications. Certes, ses charpentes sont loin de nos min-
ces armatures de fer, légères comme des toiles d’araignée, mais
combien ne sont-elles pas plus étonnantes, si on les compare aux
poutres énormes, aux chevronnages massifs qui précédaient leur
invention. Les applications que Philibert de l’Orme en tire, sont
d’une ingéniosité qui effraye, écoutez la description qui suit, ne
dirait-on pas exactement celle d’une prison cellulaire, telle qu’on
les construit de nos jours:
« J’avois pensé assez d’autres inventions et faict plusieurs des-
seings prests à mettre en œuvre, entre autres pour faire un dor-
toir aux religieuses de Montmartre près Paris.... ledit dortoir
eut esté si grand et si large qu’il eut couvert non-seulement les-
dites cellules des religieuses, mais encore tout le cloistre, et eut
esté tout rond et enfourné de portiques par le dedans et par le
dessus de doubles allées, l’une sur l’autre pour servir de passage
à aller aux chambres ou cellules des dames qui se fussent trou-
vées en grand nombre, selon les sortes et façons qu’on a accou-
tumé faire pour les religieuses, sans le logement de l’Abbesse qui
eut esté plus grand, et de la porte d’une des dites cellules on eut
vu toutes les autres.... Ce que je prétendais faire pour ledit dor-
toir n’estoit de tant grande peine que grande admiration. Je
dirai ce mot, quand on voudrait couvrir tout un château et la
cour qui serait à son milieu, on le pourrait faire facilement par
cette invention. »
Le volume d’architecture de Philibert de l’Orme se termine
comme il a commencé par deux images mystiques doctement
expliquées, non sans aigreur (dans la première explication sur-
tout), contre les derniers défenseurs de l’architecture gothique,
on peut remarquer dans le fond de l’image destinée à représenter
« le maladroit architecte. » La caricature d’un château gothique
et, par contre, les édifices, palais ou temples, du « docte archi-
tecte » rappellent, et de fort près, les inventions de Philibert
de l’Orme lui-même.
« Véritablement, ceux-ci {les mauvais architectes') ressemblent à
la figure d’un homme, lequel je vous représente ci-après habillé
ainsi qu’un sage, toutefois fort eschauffé et hâté comme s’il cour-
rait à grand peine et trouvait quelsques têtes de bœuf sèches en
son chemin (qui signifient gros et lourd esprit) avesques plusieurs
pierres qui le font chopper, et buissons qui le retiennent et des-
chirent sa robe...
Ledit homme n’a point de mains, pour montrer que ceux qu’il
représente ne sauraient rien faire. Il n’a aussi aucuns yeux en la
tête pour voir et cognoistre les bonnes entreprises, ny oreilles
pour ouïr et entendre les sages, ni aussy guères de nez pour
n’avoir sentiment des bonnes choses... Bref il a seulement une
bouche pour bien babiller et mesdire et un bonnet de sage
avecques l’habit de mesmes pour contrefaire un grand docteur et
tenir bonne mine.................................................
... Pour revenir à nostre sage représentant l’architecte, je lui
figure d’abondant quatre mains pour monstrer qu’il a à faire et
manier beaucoup de choses en son temps s’il veut parvenir aux
sciences qui lui sont requises. Davantage il tient un mémoire et
instruetien en ses mains pour enseigner et apprendre ceux qui
l’en requerront avec une grande diligence et sedulité représentée
par les ailes qu’il a aux pieds qui démontrent aussi qu’il ne veut
qu’il soit lasche et paresseux en ses affaires et entreprises. Il
montre outre ce, qu’à tous ceux qui le visiteront ou iront voir
à son jardin il ne cèlera ses beaux trésors de vertu ses cornu-
copies remplies de beaux fruits, ses vases pleins de grandes
richesses, et secrets ; ses ruisseaux [et fontaines de sciences,
ni ses beaux arbres, vignes et plantes qui fleurissent et portent
fruits en tous temps. Vous voyez aussi en ladite figure plusieurs
beaux commencements d’édifices, palais et temples desquels le
susdit sage et docte architecte montrera et enseignera la struc-
ture avec bonne et parfaite méthode, ainsi qu’il est manifesté en
ladite figure en laquelle aussi vous remarquez un adolescent
apprentif, représentant Jeunesse, qui doit chercher les sages et
doctes, pour être instruicts, tant verbalement que par mémoires,
escritures, dessings et modèles, ainsi qu’il vous est figuré par le
mémoire mis en la main de l’adolescent docile et cupide d’ap-
prendre et cognoistre l’architecture. »
Ferons-nous à Philibert un reproche de cette partialité, non
certes — et non plus de son obstination à ne jamais se servir des
voûtes dites françaises à qui pourtant nous devons le chef-d’œuvre
de Notre-Dame. Moins partial, il n’eût pas été le novateur con-
vaincu qu’il a été...
Nous avons fait analyser l’œuvro de Philibert de l’Orme par
lui-même autant que possible, et en suivant dans son propre
volume page à page la série de ses études, quelques mots de bio-
graphie pour faire connaître la vie de l’homme comme nous
avons tâché de faire connaître son esprit, et nous avons fini.
La vie de Philibert de l’Orme fut des plus heureuses. Né à
Lyon, au commencement du seizième siècle, nous le retrouvons
en Italie quelques années plus tard ; en 1536, revenu à Lyon, il
construit ses premières « trompes. » — Le cardinal de Bellay le
protège, le présenté à la cour, il construit tour à tour le fer à
cheval de Fontainebleau, le château Saint-Maur-cles-Fossés,
enfin Anet, Meudon et les Tuileries.
A la mort de Henri II, Catherine de Médicis lui confie l’inten-
dance des batiments et en 1555 le nomme aumônier et conseiller
du Roi,— puis, quoique non tonsuré, lui donne l’abbaye de Saint?
Éloi, de Noyon, et de Saint-Serge, d’Angers.
A ce propos Ronsard oubliant que tous deux, l’un en poésie,
l’autre en architecture poursuivaient la même œuvre, l’attaqua
dans une satyre « la Truelle crossée. » Eh ! pourquoi pas, mon-
sieur du Laurier, quand cette truelle a gâché le plâtre du
château d’Anet ?
Enfin, ce fut au milieu de sa prospérité, en l’an 1577, que la
mort interrompit l’œuvre du plus inventeur, du plus artiste de
nos architectes : Philibert de l’Orme.
J. Du Boys.
R. PFNOR, Propriétaire-Directeur.
Typ. de Rouge frères, Danon et Fresné, rue du Faur-St-Germain, 43