ForsideBøgerL'exposition De Paris 188… deuxième volumes réunis

L'exposition De Paris 1889
Premier & deuxième volumes réunis

År: 1889

Forlag: A La Librarie Illustree

Sted: Paris

Sider: 324

UDK: St.f. 061.4(100)Paris

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214 L’EXPOSITION DE PARIS LA JOAILLERIE ET LA BIJOUTERIE Si l’on donnait aux dames à choisir une classe dont elles pourraient emporter les objets, aucune n’hésiterait, sans doute. Elles prendraient la classe 37, joaillerie et bijouterie. Et si l’on donnait aux mes- sieurs à choisir, je parie qu’il en est bien peu qui ne feraient point comme les dames. Aucune partie de l’Exposition ne contient, en effet, réunie sur un aussi petit espace, une pareille quantité de richesses. 11 y en a bien pour quarante à quarante-cinq millions. La caverne d’Ali- Baba serait pâle auprès des feux dont élincelle cet entassement de perles et de diamants. La plus raffinée des industries s’est ainsi donné la plus élégante des instal- lations. La grâce sobre de ses vitrines Louis XV en bois naturel encadre fort bien ses éblouissants étalages. Une inno- vation fort appréciée des exposants mérite d'être signalée, car elle pourrait être reprise en d’autres occasions. Derrière les vitrines sont ménagés de petits salons qu’ils se sont partagés entre eux. Ils s’y reposent, ils y peuvent recevoir un client, ils y ont installé des coffres-forts où joyaux et bijoux reposent la nuit sous la triple sauvegarde de serrures perfec- tionnées, de grilles puissantes et de gar- diens spéciaux sûrs. Ces petits salons sont d’une grande commodité. La classe est divisée en trois parties. Au centre brille la joaillerie; la bijouterie fine occupe une extrémité, et la bijouterie d’imitation l’autre. Une voie centrale la traverse et une voie circulaire en fait le tour. Celle-ci est un peu délaissée du public, qui enfile la voie centrale sans se clouter qu’il néglige sur les côtés plus de trésors qu’il n’en faudrait pour tourner la tète à toutes les sultanes d’Orient. Il court tout de suite à une minuscule vitrine dressée an centre de la salle. Un caillou, gros comme un bouchon de carafe, y tourne sur un pivot sous une cage de verre. Inclinez-vous si vous avez le respect des royautés ; c'est, en elfet, le plus grand et le plus beau des diamants connus. Il pèse 180 carats, 44 de plus que le Régent, 74 de plus que le Kohinoor. Un prospectus donne sur ce personnage considérable les renseignements suivants, que je me ferais un scrupule de ne point vous communiquer : « Lorsque la reine d’Angleterre mani- festa le désir de voir ce diamant, le prince de Galles, qui était présent à l’exhibition, s’écria : « C’est un diamant impérial ! » — La pierre était baptisée, c’est le nom qu’elle portera toujours. « Elle a été taillée à Amsterdam, sous la direction et la surveillance d’un comité composé de trois des premiers lapidaires de cette ville; — la reine de Hollande était présente, lorsqu’on lui a appliqué la première facette. Il a fallu dix-huit mois pour la finir entièrement. » Son poids original en étal brut était de 457 carats; pour lui donner une forme agréable, on en a détaché un morceau de 45 carats qui, taillé lui-même, a fourni encore un brillant de 20 carats. J’ajoute qu’il a été trouvé au Cap et qu’il appar- tient à un syndicat de joailliers anglais et français. Il a fallu associer un certain nombre de fortunes pour couvrir une telle acquisition. Combien vaut-il? Etant unique, il est inestimable. Le prix dé- pendra des offres des concurrents. Et ils ne, sont nombreux, ni parmi los particu- liers, ni même parmi les souverains, les enchérisseurs qui peuvent mettre plu- sieurs millions à une pierre. La joaillerie et la bijouterie française luttent sur le marché international contre les difficultés que rencontrent toutes nos industries de luxe. Ces difficultés tiennent au profond changement qui s’est fait en ce siècle dans l’àme des peuples. Personne n’a plus contribué que la France, avec ses nobles théories sur la liberté humaine, à l’éveil du sentiment national chez les divers groupes ethniques de l’Europe, et personne n’en a plus souffert. On sait ce qu’il nous en coûte en politique, on remarque moins ce que nous y avons perdu en comnaerçe. Au xvnie siècle, la France était la reine de la mode, elle don- nait le ton, et les autres pays suivaient. Nos industriels et nos artistes n’avaient qu’à obéir à leur goût pour être au goût do toute l’Europe. Mais l’éveil du senti- ment national a eu pour corollaire l’éveil du goût national. A mesure qu'un peuple prenait plus fortement possession do sa personnalité, il devenait plus rebelle aux influences extérieures. Il s’est passé un peu partout ce que M. Piel, le président de la chambre syndi- cale de la bijouterie d’imitation, racontait de. l’Angleterre devant la commission d’en- quête de 1881. Encore l’Angleterre est- elle un pays do forte originalité. D'autres exemples seraient bien plus frappants. Mais j’ai celui-là sous la main. « Les Anglais, disait 31. Piel, ontaujour- d’hui un goût que j’appellerai national, qui leur plaît : l’article français ne fait plus d’effet chez eux. Je puis mémo vous rap- porterlefait suivant : un négociant anglais a voulu essayer d'introduire des bijoux français dans son pays ; il a acheté pour 10,000 francs de joaillerie; il était en- chanté de son achat et dos pièces qu'il avait choisies. 11 arrive en Angleterre, ii expose ces objets à sa vitrine et il trouve | aussitôt qu’ils ne lui plaisent plus. Trans- plantés à Londres, ils ne faisaient plus du tout le même effet qu’à Paris. » Pour affranchir leur pays de l’étranger, les gouvernements ont partout aidé de leur mieux à ce développement du goût national. Quand nous avons commencé à nous préoccuper sérieusement de l’état des industries d’art en Europe, il y a quelques années, nous avons découvert avec surprise combien l’enseignement du dessin avait été répandu autour de nous. De riches particuliers se sont associés à ce mouvement d’émancipation avec une générosité dont nous n’avons point d’vlée en France. Devant la même commission d’enquête, M. Falize citait un Mécène anglais, M. Morrisson, qui, pour fournir des modèles à ses compatriotes, a acheté pour 1,800,000 francs d’incrustation à Luozaga, le grand artiste espagnol. Comment nos industries de luxe triom- phent-elles de ce particularisme crois- sant et maintiennent-elles Jour situation acquise? En s’efforçant d’atteindre la per- fection. Du moment que la provenance française n’est plus par elle-même une recommandation, elles sont condamnées, sous peine de mort, à être supérieures en art à leurs rivales. La vraie beauté, en effet, ne connaît pas de frontière ; il n’y a pas de goût national qui tienne devant un objet parfait. Il est parfait aussi bien à Saint-Pétersbourg ou à Madrid qu’à Paris. L’exposilion de joaillerie offre à ce point de vue quelques vitrines qu'il est impos- sible d’examiner sans orgueil, et, j’ose le dire, sans émotion patriotique. Elles sont irrésistibles et les étrangers n’y résistent point. Je n’en voudrais pour preuve qu’une parure de 175,000 francs que j’ai vu vendre sous mes yeux. Depuis quelque temps nous assistons à un renouvellement complet de la déco- ration sous l’influence de l’Extrême- Orient. Nos artistes abandonnent les for- mes conventionnelles et vont demander leurs modèles directement à la nature. Cette intéressante évolution, la joaillerie l’avait commencée spontanément avant l’avènement du japonisme. Très avancée déjà à l’Exposition de 1878, on peut la considérer aujourd’hui comme achevée. Les broches exposées sont particulière- ment intéressantes : elles représentent soit une branche fleurie, soit, plus rare- ment, des insectes. Admirez d’abord avec quelle sincérité la physionomie indi- viduelle des feuilles, leurs attaches, le port des fleurs, tous les caractères qui dillerencient une espèce d’une autre, sont étudiés. Admirez ensuite avec quel esprit cos caractères sont rendus; combien sont significatives les dispositions choisies.