L'exposition De Paris 1889
Premier & deuxième volumes réunis
År: 1889
Forlag: A La Librarie Illustree
Sted: Paris
Sider: 324
UDK: St.f. 061.4(100)Paris
Søgning i bogen
Den bedste måde at søge i bogen er ved at downloade PDF'en og søge i den.
Derved får du fremhævet ordene visuelt direkte på billedet af siden.
Digitaliseret bog
Bogens tekst er maskinlæst, så der kan være en del fejl og mangler.
L’EXPOSTTTON DE PARTS
qui montrent à quel point les rites do-
mestiques sont choses tenaces,' à. travers
les révolutions et les bottleveräeriients
. ' ' ! j'j. ' • j
nationaux. , . ;
On voit là comme il est difficile.d'éléver
un être humain, coinbien, il en coiùlo et
quel capital dei.soins, de soucis, do fi'Ü.ß
de tout genre représente un adulte ar-
rivé à sa maturité.
Une, autre exposition voisine, celle des
« Dames de France, secours aux blessés
de terre et de mer », flanquée de mo-
dèles d’hôpital de campagne, avec bran-
cards, boîtes de chirurgie, tables d’opé-
rations. paquets de toile, gouttières et
attelles pour membres fracassés, entas-
sements de coton hydrophile, pyramides
de ouate et montagnes de, tourbe à panse-
ments, témoigne des soins fraternels que
s’impose la philanthropie moderno pour
adoucir ou réparer les maux de la guerre.
Entre ces deux expositions s’élève,
froide et morne comme un couperet de
guillotine, la façade du génie militaire.
Si l’antithèse a été voulue, et nos ar-
chitectes en sont bien capables, quelle
étrange énigme sociale elle souligne à nos
yeux! On pourrait la formuler ainsi :
Étant donné un enfant amené à la
vingtième année contre toutes les proba-
bilités, déterminer le moyen le plus sûr
do le détruire; et si. d’aventure, on n’ar-
rive qu’à le mutiler, trouver les procédés
les plus savants pour en accommoder les
restes.
Allez donc ne pas philosopher devant
des antinomies si cruelles! Et, si vous le
pouvez, défendez-vous d'un mouvement
de révolte en rencontrant des canons au
tournant de la féerie coloniale. Que vous
le vouliez ou non, ces affûts en fer et ces
gueules noires vous choquent comme une
note atrocement discordante dans la sym-
phonie du travail. Quoi ! se dit-on, voici
la ün dernière de cette belle civilisation?
Était-il donc si necessaire de nous rap-
peler qu’elle tient à un fil? Fallait-il nous
mettre sous les yeux la vanité des biens
do ce monde cl empoisonner notre allé-
gresse de ce memento mort? Oh! la
cruelle précaution de faire ainsi surgir au
banquet le spectacle de la guerre! Oh! la
macabre idée de nous crier quïl suffira
demain du caprice d’un monarque ou des
besoins d’une dictature pour anéantir
tant de splendeurs! Lanière prévoyance
et la malencontreuse sagesse !...
Mais quoi! Ils on t raison, lésprévoyants.
Ce luxe même, et cos triomphes indus-
triels et cette accumulation inouïe de ri-
chesses ne sont-ils pas autant de motifs
de redouter les brigands et de s’armer
contre les nations de proie? N’est-il pas
d’autant pins nécessaire de se défendre,
qu’on a davantage à perdre? Quand on
■traygrgo, ø.v^c de l’or plein ses poches
ki forêt, de Bondy .de..l'Europe contempo-
raine, n’est-ce pas le moment, ou jamais,
lie laisser passer une crosse de revolver?
"'Hélas! ille'faut. Puisse du moins notre
apincRient être aussi bon que possible!...
Et l’on entre en soupirant.
L’armement est plus que bon et beau, il
est merveilleux; il est sans rival. Disons-le
avec un sentiment de joie profonde, puis-
que aussi bien ce n’est plus un secret
national, mais une vérité admise à l’étran-
ger par tous les hommes compétents. Si
noble et superbe que soit clans son en-
semble notre Exposition, l’artillerie fran-
çaise écrase tout le reste.
Il ne s’agit plus ici d’un produit isolé
ou d’un modèle spécial. C’est un triom-
phe collectif de toute la métallurgie fran-
çaise, où chacun joue son rôle et tient sa
partie : le Creusot et Saint-Chamond,
Rive-de-Gier et Commentry, Unieux et
Nantes, Grenelle et Saint-Denis, les for-
ges et chantiers comme les hauts four-
neaux, ingénieurs et soldats, forgerons et
techniciens. La splendeur, et par-dessus
tout l’admirable unité des résultats obte-
nus par uno telle variété de collaborations,
est un phénomène unique, sans exemple
dans l’histoire d’aucun pays, et qu’il ne
faut pas hésiter à regarder comme le gros
événement de cette Exposition pivotale.
Non seulement nous avons désormais
mie avarice indéniable sur tout ce que
pourraient tenter dans le même ordre les
nations rivales, mais la variété même des
éléments constitu tifs de celte avance nous
assure qu’il no tient qu’à nous de la gar-
der indéfiniment.
On doit d’autant moins hésiter à con-
stater un tel fait, qu’il n’est plus désor-
mais un mystère pour personne et même
donne la clef des incidents les plus nota-
bles de l’histoire diplomatique des deux
derniers mois. Indiqué et signalé depuis
cinq ou six ans par toutes les grandes
expériences comparatives de l’étranger,
le voici subitement mis en pleine lumière
et s’imposant avec une évidence aveu-
glante. Il a suffi pour cela qu’on vit nos
types de canon côte à côte avec les élé-
ments multiples, et variés dans leurs ori-
gines, mais uniformément parfaits dans
leur exécution, dont se compose notre
incomparable artillerie.
Cette conclusion délicieuse est parfai-
tement logique au fond. 11 serait para-
doxal qu’un pays comme le nôtre, dont
les infinies ressources éclatent si majes-
tueusement dans toutes les voies du tra-
vail, n’eût pas réussi on dix-huit ans de
labeur assidu à se faire d’excellents ca-
nons. Peut-être semble-t-il inattendu que
ces canons soient les ■meilleurs du monde.
| C’est qu’on a lini par s’habituer, chez
nous et ailleurs, à l’idée très fausse que
les arts dé la guerre sont distincts de
ceux de la paix et que la supériorité dans
les uns est presque une raison d’infé-
riorité dans les autres. Grâce aux dieux,
il n’en est rien! La sciencô raffinée sera
toujours la science; l’art consommé pré-
vaudra toujours et l’esprit, non plus que
l’imagination créatrice, ne saurait, nulle
part perdre ses droits.
Parcourez les galeries de l’acier; pas-
sez en revue les établissements métal-
lurgiques de la Loire; entrez, au pied
de la tour, sous l’appentis où le canon de
Bange de 48,000 kilogrammes allonge
sa formidable encolure. Puis, suivez la
série de nos pièces de siège et de cam-
pagne, depuis le 95 millimètres jusqu’au
220 millimètres rayé ; passez aux canons
à tir rapide, si élégants et si soignés ; aux
canons-revolvers de 37 et de 47 mini-
mètres, avec leurs coussinets de caout-
chouc, qu’on dirait faits pour une épaule
de femme, leurs niveaux à bulle d’air et
leurs hausses impeccables; étudiez les
projectiles noirs et gris, depuis l’obus de
800 kilogrammes destiné à des voyages
do 10 kilomètres, jusqu’à l’obus de 24, à
alvéoles vitrées; donnez un coup d’œil
aux coupes verticales qui vous les mon-
trent ouverts, avec leur sinistre anatomie,
et aux murailles d'épreuve en fer, de
50 centimètres d’épaisseur, qui portent
la cicatrice des tirs d’essai. Enfin, passez
aux appareils de précision de la section
technique : voyez ces calibres qui don-
nent le millième de millimètre, ces densi-
mètres à mercure, ces lanternes électri-
ques pour l’exploration de Famé des
pièces, ces vérificateurs ; ou tout simple-
ment examinez de près, en ses détails,
une culasse à vis centrale et obturateur
plastique. Si vous en avez le temps et
l’occasion, faites-vous raconter par un
homme du métier pourquoi les frottes en
spirale qui renforcent nos pièces par en-
roulement sont dix fois plus sûres que
les manchons des pièces allemandes...
Ces choses vous diront chacune leur mot,
et vous ne pourrez pus ne point entendre
leur langage.
Les amours de canons ! qu’ils sont
propres et reluisants, et d’allure savante!
A les voir ainsi, la bouche en cœur, sur
leurs affûts brevetés, étirant à des lon-
gueurs invraisemblables leurs tubes bron-
zés ou nickelés, qui s’emboîtent, on dirait
plutôt des télescopes.
C’est à se demander si telle pièce
monstrueuse, sortie pour un cuirassé ja-
ponais des forges et chantiers de là Médi-
terranée, n’a pas le mandat unique d’en-
voyer aux planètes voisines un obus
chargé de lettres galantes.
(A suiore.} Philippe Daryl.