Exposition Universelle Internationale De Bruxelles 1910,
Organe Officiel De L'exposition, Vol. II
Forfatter: E. Rossel
År: 1910
Sider: 500
UDK: St.f. 061.4(100)Bryssel
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L’EXPOSITION DE BRUXELLES
Dans la rapide visite que nous ferons de l’ex-
position du Folklore national, nous suivrons
l’ordre du catalogue, habilement rédigé par le
secrétaire du comité, M. Is. Teirlinck. De suite,
LA CHAISE DE LA FEMME ADULTÈRE.
des figures amies s’offrent à nos regards. Ce
sont les bons géants familiers. De tous temps
le peuple belge aima ces géants. Ce ne sont plus
pour lui les êtres grandioses et farouches de la
fable antique, mais de bonnes gens bienveil-
lantes, une force qui s’adoucit aisément, de pe-
tites divinités ridicules, dont on se moque un
peu, mais qu’on affectionne, la joie peut-être du
faible devant une puissance qu'il sait débonnaire
et pas dangereuse, qu’il mène à son gré et dont
il s’imagine être le triomphateur.
Jadis, chaque ville possédait son géant. C’était
le palladium de la cité. Il jouait son rôle
dans toutes les cérémonies publiques. Parfois,
il accompagnait les processions religieuses. C’est
la domination espagnole qui introduisit cette
coutume et, il y a vingt ans encore, en 1890,
on put les voir réunis dans ce cortège qui par-
courut les rues de Bruxelles. Il y avait là
Druon, Antigon et Pallas d’Anvers, les géants
d’Ath, Samson et Goliath, ceux de Grammont,
ceux plus petits de la capitale Mieke et Jan, le
chevalier Bayard, les quatre fils Aymond, etc.
Pour rappeler l’affection des anciennes popu-
lations flamandes, nous reproduirons ici, d’après
la traduction qu’en a faite M.Teirlinck dans son
Folklore national, un charmant Reuzelied, un
des plus anciens, paraît-il :
« Celui qui dit : le géant qui vient — le géant
qui vient — en a menti! — Retourne, petit
géant, petit géant, retourne — Reuzegom !
» Holà ! mère, coupe une tartine, — une tar-
tine, — le géant est fâché ! — Retourne, petit
géant, petit géant, retourne — Reuzegom !
» Holà ! mère, verse de la meilleure bière,
— de la meilleure bière, — le géant est ici ! —
Retourne, petit géant, petit géant, retourne,
Reuzegom !
» Holà ! mère, bouche le tonneau — le ton-
neau — le géant est saoûl ! — Retourne, petit
géant, petit géant, retourne, — Reuzegom! »
Ne vous semble-t-il pas que cette naïve chan-
son introduise le bon géant dans la demeure
du peuple et que d’un geste familier et tendre,
après lui avoir ouvert toute grande la porte du
logis, elle le fasse asseoir, à la table commune,
près du foyer ami ?
Nous voyons dans la première salle six géants
sur onze que notre ville possède. Ce sont Sultan,
Sultane, Janneke, Mieke, Papa, Marna. Ces
amusantes appellations parlent d’elles-mêmes.
Voici, placée au mur, une estampe qui nous
représente le géant d’Anvers. Ce personnage
important n’a pas voulu se déplacer, sans
doute. Il s’est contenté d’envoyer son image.
« Colassus gigantens antwerpianus » inscrivit
sous l’estampe l’ironique et spirituel graveur
du XVIIe siècle. Des photographies nous rap-
pellent les traits et l’aspect farouche des géants
de Termonde (Man, Goliath, l’Indien), de Wet-
teren, de Mons, de Malines, de Nieuport, de
Nivelles et — à tous seigneurs tout honneur —
de Gayant et de sa femme, originaires de Douai.
Voici maintenant la Roue de la Fortune, de
Malines, qui date de 1615. Ces roues de la
fortune rappelaient à nos ancêtres les vicissi-
tudes de la Fortune. Huit personnages, un avo-
cat, une dame, un mendiant, une paysanne, un
arlequin, une bigotte, un chasseur, une men-
diante, sont placés obliquement sur un traîneau
qui en s’avançant la fait tourner. Au milieu,
dame Fortune, nue comme il convient à une
déesse d’humeur légère, avec simplement quel-
ques voiles qui la couvrent à peine. A côté
de la Roue, le Op Sinjoorken de Malines.
Autre palladium de la vieille cité flamande.
Ce mannequin, nous dit le catalogue, fut sculpté
en 1648, à l’occasion de l’Ommegang, par Va-
lentin Van der Lantscroon. Dans les cortèges,
il faisait suite aux géants et était berné par quatre
hommes. A la suite d’une prétendue tentative
de vol, par un Anversois, Jacques de Leeuw, lors
de la seconde sortie de la cavalcade du Jubilé
de Saint-Rombaut (1778), parut pour la der-
nière fois dans les cortèges. Les jours de visite
de la famille royale ou de l’inauguration d’un
nouveau bourgmestre, on le place dans une
lucarne de l’hôtel de ville où il applaudit joyeu-
sement.
Des géants, passons aux hommes. Voici Gille
CUISINE FLAMANDE.
de Binche, un Gille magnifique qu’on a placé
sous verre, tellement il a paru riche et précieux.
Ses plumes ont au moins un mètre de hauteur.
« C’est un honneur pour une maison binchoise,
dit M. Maurice des Ombiaux dans son beau
livre l’Ornement des Mois, de fournir un
Gille au cortège du mardi-gras. Dès le matin,
la famille réunie procède à la toilette du héros.
On entasse à grands coups de poing de la
paille fraîche dans les deux bosses. Un expert
surveille l’opération, car il y a des rembourreurs
de bosses, des professionnels qui vont comme
les barbiers, de maison en maison, prêter leurs
bons offices à ces singuliers clients. Les bosses
rebondies, le Gille chausse ses sabots, coiffe
son chapeau de plumes ; il s’attache une ceinture
de grelots et une clarine sur l’estomac. A peine
le Binchoux a-t-il reçut les grelots que la folie
les lui agite dans la tête ; il se sent tout à coup
en proie à une sorte de danse de Saint-Guy qui
ne l’abandonnera pas jusqu’au soir. Le voilà
parti, suivi d’un gamin qui lui porte les oranges
à lancer dans les rues, gambadant, gesticulant,
pirouettant sans prendre jamais un instant de
repos.
» La mascarade des Gilles remonterait à l’an-
née où Pizarre découvrit le Pérou. Pour célébrer
cette victoire, Marie de Hongrie, qui habitait
près de Binche, ordonna des réjouissances.
Puisqu’il était question d’Incas, un groupe de
courtisans imagina de les figurer en se coiffant
de chapeaux à plumes d’autruche. »
On s’étonnerait sans doute de ne pas trouver
à côté de ces personnages le Manneken-Pis,
de joyeuse mémoire. Il est là, et son histoire
nous est rapportée par l’imagerie populaire.
La section voisine nous offre des spécimens
curieux de l’ancienne habitation en Belgique.
Il s’agit d’une collection de vues et dessins
de pignons, façades, détails, comprenant un
choix de planches classées géographiquement en
allant de l’Ouest à l’Est du pays, en passant
par les diverses provinces. Le détail en serait
trop long. Mais de l’extérieur nous pénétrons
à l’intérieur. Nous voici dans une cuisine fla-
mande. Rien n’y manque, ni le vieux bahut cher
à nos ancêtres, ni le rouet auquel pendent encore
quelques débris de laines, ni le chandelier de
cuivre, ni même le parapluie qui semble oublié
par le paysan parti pour le grand voyage
éternel.