Exposition Universelle Internationale De Bruxelles 1910,
Organe Officiel De L'exposition, Vol. II
Forfatter: E. Rossel
År: 1910
Sider: 500
UDK: St.f. 061.4(100)Bryssel
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L’EXPOSITION DE BRUXELLES
333
La cuisine ardennaise n’est pas moins pitto-
resque. C’est M. Comhaire, de Liège, qui l’a
reconstituée. Aucun accessoire n’a été oublié.
On la dirait habitée de la veille. On dirait qu’elle
fleure bon le parfum de la bruyère et des
grands bois qui l’enveloppent de leurs fron-
daisons séculaires.
Tout naturellement, la vie publique, familiale
et privée nous ramène aux pittoresques cortèges
d’antan. La troisième salle de l’exposition du
Folklore contient le fameux Lumeçon de Mons
qui sert à représenter sur la Grand’Place de
cette ville, le jour de la Kermesse, la légende
populaire dite du Doudou. Cette légende, qui
rappelle celle de la Tarasque, se retrouve un
peu partout. Elle se rapporte aux exploits des
chevaliers tueurs de monstres. Elle nous vient
de l’Antiquité après avoir passé par le moyen
âge qui en fit un usage immodéré.
« A Mons, le jour de la Trinité, dit M.
Schayes, dans les Usages et croyances des
Belges, on porte dans la procession la figure
d’un dragon entouré de plusieurs hommes mon-
tés sur de petits chevaux en carton. On appelle
ces hommes du nom de Chins-chins. Après la
procession, les compagnons se rendent sur la
Grand’Place, où se livre un combat entre le
dragon et un homme habillé et armé en che-
valier. Le dragon, après avoir donné de furieux
coups de queue, finit, comme de raison, par
être terrassé. Cette fête attire une foule de
monde de la ville et des environs ; on y chante
une chanson populaire dont le refrain est :
C’est 1’ Doudou, c’est l’marna,
C’est l’ poupée saint Georges qui danse,
C’est l’ Doudou, c’est l’ mama,
C’est l’ poupée saint Georges qui va.
La tradition populaire prétend que cette fête
se célèbre à la mémoire d’un certain Gille de
Chin, seigneur de Berlaimont et chambellan du
Hainaut, qui tua en 1133 un dragon dont le
repaire se trouvait dans la forêt de Wasmes,
à une lieue et demi de Mons.
Nous remarquons encore, appendues au mur
de la même salle, une série de ces curieuses
complaintes par lesquelles le peuple exprimait
jadis l’effroi que lui causaient les grands cri-
minels et l’indignation que soulevaient leurs for-
faits dans son âme naïve.
LES GÉANTS ET LA ROUE DE LA FORTUNE DE MALINES.
Le musée de Bois-le-Duc a envoyé à l’expo-
sition une pièce curieuse, une mante ou cape
en bois gravé, avec siège et collier en fer.
Les femmes condamnées pour adultère étaient
exposées dans cette cape et transportées à tra-
vers la ville. Le travail de revêtement est curieux.
Sur cette mante singulière figurent des rats,
des crapauds, des bêtes immondes réunies les
unes aux autres par une cordelette, tandis qu’un
animal étrange, dont on ne perçoit guère que
le bec, constitue la partie supérieure de ce
bizarre instrument de torture.
Un peu plus loin nous remarquons une sta-
tuette en bois représentant l’ancien Jacquemart
de l’église de Notre-Dame de la Chapelle, puis
un mannequin équipé en soldat autrichien qui,
dit le catalogue, servit d’enseigne à l’habitation
dite du dragon à Bruxelles. Ce personnage est
très amusant avec son visage sévère et bon enfant,
son habit sur lequel se détache les armes impé-
riales. Une pipe qu’il fume avec une sorte de
ravissement nous indique qu’il n’est point si
farouche que pourrait le faire croire sa manière
de tenir une arquebuse, pas bien effrayante,
comme les hardis chevaliers du temps jadis
tenaient leurs lances.
Voici encore toute une série d’images popu-
laires. Un érudit, collectionneur avisé, M. Van
Heurck, d’Anvers, leur a consacré un article
entier. Ce n’est pas trop, assurément, si l’on
en juge par les spécimens qu’il a extrait de ses
collections. Nous retrouvons là la vieille et tant
aimée image d’Epinal ; nous pouvons y relire
la légende de Malborough, du Juif errant, de
Geneviève de Brabant. Un série d’estampes,
d’un caractère artistique véritable, illustrent les
proverbes, cette sagesse des nations qui fut
aussi celle du peuple. Certaines de ses gravures
ont été exécutées par Jean Wiericx, d’après
Pierre Breughel l’ancien.
D’autres gravures encore sont consacrées à
illustrer la fête des fous, fête célèbre entre
toutes. Faut-il, puisque l’estampe nous en rap-
pelle les détails, retracer également ses ori-
gines ?
La fête des fous était célébrée par les Romains
le 18 février. Ceux qui prenaient part à cette
burlesque cérémonie étaient vêtus en satyres et
portaient des masques à longue barbe. Ces
fêtes, qui sont donc des restes des bacchanales,
furent plusieurs fois condamnées par les
Conciles. On n’en continua pas moins à les
célébrer. A Tournai, on élisait de temps immé-
morial, un évêque des Fols. Charles VIII, roi
mort, les habitants de la ville voulurent rétablir
de France, l’interdit en 1490, mais après sa
HORRIBLE ASSASSINAT 5 PERSONNES ASSASSINÉES 1
A MAXENZEELE PRES D'ASSCHE (BRABANT)
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UNE COMPLAINTE.
mort, les habitants de la ville voulurent rétablir
cet usage respectable par son antiquité. Ils
employèrent la violence pour obliger plusieurs
ecclésiastiques à se revêtir de cette dignité.
Ne semble-t-il pas, en parcourant ces salles
où la savoureuse fantaisie des paysans et du
bas peuple est réunie, entendre raconter, par
un vieux villageois, à l’heure de la veillée, une
de ces hi toires gaillardes où la malice se mêle
si curieu ement à la naïveté ?
M. Is. Teirlinck nous rappelle l’une d’entre
elles dans son ouvrage sur le Folklore fla-
mand : « Ceci se passa dans le temps où Notre
Seigneur se promenait sur la terre. C’était la
kermesse dans un village des environs : « Maître,
demanda saint Pierre, puis-je y aller ? — Oui,
dit le Christ.» Lorsque le disciple revint, le
soir, le Seigneur lui demanda : « Tu t’es bien
amusé, Pierre ? — A merveille !... Ce ne pou-
vait être autrement, il a fait un temps charmant.
- Ils n’ont pas parlé de moi, Pierre ? — Pas
le moins du monde I Je n’ai pas entendu pro-
noncer votre nom ! » Le jour suivant, saint
l’ierre demanda une seconde fois l’autorisation
d’aller à la kermesse et le Seigneur la lui
accorda. A son retour, le soir, le disciple parut
mécontent. Et le Seigneur lui demanda: «Tu
t’es bien amusé, Pierre ? — C’était une misère I
Personne ne s’amusait !... Quel temps détestable
aussi : il n’a fait que grêler, pleuvoir, tonner I
- Et ils n’ont pas parlé de moi, Pierre ? -
Oh ! oui... je n’ai entendu que cela I Tout le
monde vous appelait !... »
Ainsi s’exprimait jadis l’âme populaire. Nous
la sentons, ressuscitée et bien vivante, dans cette
exposition du Folklore où tant de souvenirs
oubliés se rappellent à l’esprit qu’il semble que
ce soit une race disparue qui tout à coup sur-
gisse des ombres du passé pour nous redire
des choses abolies et très lointaines.