Exposition Universelle Internationale De Bruxelles 1910,
Organe Officiel De L'exposition, Vol. II
Forfatter: E. Rossel
År: 1910
Sider: 500
UDK: St.f. 061.4(100)Bryssel
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L'EXPOSITION DE BRUXELLES
LE ROYAUME DES JOUETS
« Les hommes sont de grands enfants » et
« les enfants sont déjà de petits hommes »,
singulier hasard, voilà deux phrases complémen-
taires, dites dans une même journée, à l’Expo-
sition, ce rendez-vous mondial, où se rencontrent
les extrêmes, la frivolité et le génie, les éven-
tails et les machines-outils, les guignols et les
torpilles, image vive de la vie européenne et
même universelle, en cette foire des nations qui
contient au moins un échantillon de tout ce qui
se fait de nos jours dans le monde entier ; y
compris, comme on voit, la philosophie.
N’est-il pas étrange et ne faut-il pas un rare
concours de circonstances, dans ce capharnaüm,
pour que deux pensées se rencontrent, comme au
jeu des petits papiers, et s’accordent comme si
un même profond esprit les avait dites !
Et cela précisément dans le royaume des petits,
la salle des jouets, que connaissent si bien tous
les amis de l’Exposition.
« Tu traînes plus que le petit, dit une jeune
mère à son mari qui guide le garçonnet par
la main , • allons, viens ! Tu es plus enfant que
l’enfant ! » Et cela est souvent vrai, pour un
moment, court, hélas !
Papa revoit le cercle de la famille, en sa
propre enfance, les jouets familiers qu’éclairait
la lampe, les troupeaux, l’arche de Noë, les
soldats qui s’alignaient sur la nappe ; puis, plus
grand, l’école finie, les devoirs bâclés, les toupies
ronflantes, la lantèrne magique, les bo tes de
patience, chacun retrouve là un peu de ses jeunes
journées, des souvenirs, la mémoire du papa, de
la maman disparus, de la vieille bonne, du petit
Noël, du grand saint Nicolas, de tous les clairs
anniversaires du calendrier ! Ça dure ce que ça
dure, ce souvenir, mais ça remonte au cœur, et,
un moment, ça pince !
Les jouets ont progressé, comme tout le reste ,•
il semble aux parents d’aujourd’hui, devant les
joujoux parfaits, compliqués et artistiques, que
leurs jours de jeunesse remontent à l’enfance de
l’humanité. Les chevaux à bascule avaient, au
lieu de poils, une robe peinte gris pommelé, une
crinière de carton, comme tout le corps, faite
d’une raie noire, à la couleur ; les locomotives
LES JOUETS.
marchaient au doigt et ne roulaient pas à l’élec-
tricité ni à la vapeur I On construisait soi-même,
pour les trains, des tunnels de livres, de boîtes
superposés, que sais-je, on les faisait circuler
LES JOUETS.
entre les pieds des tables, il fallait être ingénieux
pour s’amuser ! Ces petits trains-là, ces maigres
machines ne sont plus, de nos jours, que pour
les marmots de trois ans. A sept ans nos fils
sont ingénieurs, ils ont des trains sur rails, avec
tunnels en roche, gazonnés, arbori és, ils tour-
nent des rhéostats, un coup de sifflet, le train
part !
La boîte à outils de charpentier, elle aussi,
ne convient plus aux marmots. Nos garçonnets
sont industriels à l’âge de la première culotte.
La scie, le vilebrequin, le rabot ont cédé le pas
aux machines-outils, pour les petits comme pour
les grands. Le groupe électrogène qui fournit
vapeur, mouvement, électricité, fera, si l’on veut,
fonctionner mécaniquement l’atelier !
Que n’y a-t-il qui ne montre aux adultes d’au-
jourd’hui quels barbares ils étaient chez père
et mère ! Avaient-ils des torpilleurs, des cuiras-
sés, des automobiles, des aéroplanes, des dirigea-
bles, des lions, des ours, des singes en peluche,
et même, ne vous en déplaise, avaient-ils une
écuyère ? Je vous dit que tout a changé d’âge !
L’écuyère en question est ici le centre d’une
scène innocente et charmante, quelque chose
comme un incident de la vie de Miarka, la petite
chanteuse bohémienne, la joyeuse héroïne du
roman de Jean Richepin. L’ingénieuse scène qui
nous est offerte par le metteur en scène des
jouets, si l’on peut dire, a bien, elle aussi, sa
poésie et le pittoresque ne lui manque pas.
C’est la foire en quelque petite ville d’Alle-
magne. Sur la place publique, elle répand sa
gaieté faite de musique, de nouveau.é, de l’allée
et venue des voyageurs, de parents qui se visi-
tent, de diligences qui déversent leur monde au
seuil des auberges, de petites baraques d’ambu-
lants, la marchande de friandises, grand’mère
vieille et cassée, autour de laquelle se rangent
les petits enfants, le marchand de poupées, cli-
nique de bras, de jambes, de regards de verre,
pour les poupées infirmes, le moulin de chevaux
de bois, tournant, brillant, le tir aux pipes, et
mille autres choses... Tout le monde est là,
s’amuse, sourit, mange et boit ; on est venu
de toutes parts, en costumes du pays, divers et
bariolés, la fête bat son plein quand arrive la
grande attraction, le clou de la foire, le Cirque !
Vous pensez si le monde s’en donne aux yeux, si
l’on accourt curieux, intéressé. Il y en a pour
tous les âges dans le défilé.
En avant, marche le bon nègre — sans doute
avaleur de plumes et mangeur de lapins crus, —
montrant, en attendant, ses trente-deux dents très
blanches, comme il convient, exhibées dans un
large rire, en harmonie d’humeur avec sa
musique, cymbales retentissantes et bondissants
coups de grosse caisse.
Puis, derrière lui, le mélancolique Romanichel,
à la belle moustache, au teint olive, aux yeux