Exposition Universelle Internationale De Bruxelles 1910,
Organe Officiel De L'exposition, Vol. II
Forfatter: E. Rossel
År: 1910
Sider: 500
UDK: St.f. 061.4(100)Bryssel
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L’EXPOSITION DE BRUXELLES
jourd’hui que la ville de staff et de toile est
déserte, semble avoir passé sur la minuscule
agglomération. L’eau et le feu paraissent s’être
mis contre elle pour l’anéantir. Sous les con-
structions de bois enlevées sont réapparues les
UN COIN DE LA SECTION DES MACHINES.
cendres noires de la cité antérieure, si tragi-
quement détruite au mois d’août, le sol actuel
en est encore endeuillé. Le mince cours d’eau
qui traversait Bruxelles-Kermesse a pris, je ne
sais comment, lui aussi, une tournure impres-
sionnante. Bien qu’à peu près sec, son lit, si
l’on peut dire, est si bien encombré d’épaves
que le ruisselet semble être pour quelque chose
dans la fin de la ville morte, comme si c’était lui
qui l’avait ravagée. On le regarde avec étonne-
ment et ironie. Son fond et ses bords encombrés
des objets les plus bizarres semblent porter les
traces d’une inondation ! Et laquelle ! Elle aurait
noyé des personnes à en croire la présence de
ces nombreuses bottines qui gisent dans la boue !
Et cet élégant soulier de femme rempli d’une
vase infecte ! Des familles entières auraient péri
si nous nous en référons à la présence de ce
sommier qui est demeuré de travers sur le bord
du courant. Et des loques, des linges, des chaus-
settes, des chiens morts, des boîtes à sardines et
des papiers flasques ! Non jamais nous ne vîmes
de ruisselet aussi immonde, auprès duquel la
Senne est une rivière fleurie !
Bruxelles-Kermesse a vu finir ses jours avec
une population, d’ailleurs étrange, dans ses
« murailles » de bois. Tout s’en est allé aux
chants des ouvriers ! Là, le travail de démolition
a ressemblé à la folie d’une classe de pension-
naires à qui l’on offrirait le sac d’une vi.le pour
se distraire ! L’un voit ici une toile peinte qui
est à sa convenance et il la roule après l’avoir
arrachée ; d’autres aperçoivent le panneau d’un
fond de maison en planches resté debout, en
palissade élevée. Le groupe s’élance à l’assaut et
la destruction de cette pièce ressemble à un
concours de gymnastique d’escalade ! Tout à
coup, des cris ! Quoi, on égorge ? Des rats !
des rats ! Les pauvres animaux sont capturés
sous des vestes, sous des casquettes : que voulez-
vous ? Flaubert nous raconte que les Cartha-
ginois crucifiaient, pour se distraire, des lions !
Mais nos braves ouvriers n’ont que des rats !
Par la patte ou par la queue ils les clouent à
des poteaux, avec l’inconscience du peuple rude
envers la souffrance animale, et coupent les
corps en travers avec leur couteau. Ces humbles
martyrs au pilori, pour quelques bouts de pain
ou de chandelle, c’est d’un goût plutôt navrant :
mais je vous assure que Bruxelles-Kermesse,
avec son sol calciné, son fleuve tragique et ses
masures en ruines, n’est plus du tout le lieu
d’élégance que les Bruxellois ont connu et res-
semble plutôt, sous la pluie et le vent, à quelque
cité fin du monde, abandonnée et maudite. Ajou-
tez-y le spectacle des défuntes montagnes russes,
qui dressent sur l’horizon leurs ferrailles enche-
vêtrées comme des filets mêlés, tendus sur des
mâts, et hautes comme les barrages que les
indigènes des fleuves vierges de l’Afrique dres-
sent au-dessus des eaux comme des ponts pour y
suspendre leurs nasses à prendre le poisson ;
c’est ce qui reste de l’incendie des joyeuses
montagnes ! Puis ajoutez, plus près de nous,
et tout d’une venue avec Bruxelles-Kermesse,
l’immense quadrilatère où s'étend la vue sur les
restes des sections incendiées, cendres, terre cal-
CE QUI RESTE DES SECTIONS ÉTRANGÈRES.
cmée et ferrailles tordues ! Bruxelles-Kermesse
est devenu un coin sinistre, l’ancienne petite
cité de la joie !
*
* *
Allons voir ailleurs comment une Exposition
s’en va, brin à brin, c’est-à-dire planche à
planche, comme elle est venue. Partout sur notre
route, dans les jardins, les allées sont trans-
formées en chantiers de gigantesques bobines,
comme on en voit dans les rues de la ville
quand on pose des câbles électriques nouveaux.
Elles sont ici par centaines, les immenses bo-
bines, ternes et sales, toutes boueuses, tirées
d’on ne sait où et les hommes, minuscules auprès
de leurs larges disques, extraient du sol, à trac-
tion rythmique, les interminables câbles qui ont
distribué l’électricité, force et lumière, à toutes
les installations, à tous les établissements, aux
fleurs lumineuses des parterres, le soir. Les
ouvriers mouillés, gelés, ont installé à proxi-
mité de leurs travaux des poêles de fortune,
en plein vent, avec une buse qui se dresse le
long de hauts tuteurs ! On se chauffe les mains,
on fait chauffer du café. De plus primitives
installations sont composées d’un sceau percé
où flambe du bois ! Oh ! le bois ne manque pas !
Dans ce désarroi, il est des êtres bien mal-
heureux ! Devinez qui ? Pelotonnés au seuil des
petits restaurants, des anciens débits de cigares
plus ou moins luxueux, fidèles à leurs anciennes
habitations qui ne sont plus que des masures
branlantes, aux fenêtres arrachées, sans portes
et traversées de courants d’air, ces êtres malheu-
reux ce sont les pauvres chats, les lamentables
frileux qui subissent là toutes les rigueurs de
la saison. Que font-ils.? Buffon nous assure
que le chat connaît la maison où il a vécu heu-
reux beaucoup plus qu’il ne connaît son maître.
Devons-nous trouver là l’explication de leur obs-
tination ? Que vont-ils devenir ? Le bois de la
Cambre est proche, peut-être feront-ils un retour
à la nature dans cette simili forêt et verrons-
nous celle-ci, l’été prochain, peuplée d’une nou-
velle faune I
La section anglaise a roulé ses tapis ; elle
roule ses caisses avec ardeur sur les camions,
l’Angleterre va repasser l’eau avec sa fortune ;
on a démonté les herses d’incendie qui couraient
en tuyauterie aménagée dans les vélums des