Exposition Universelle Internationale De Bruxelles 1910
Organe Officiel De L'exposition, Vo.l 1
Forfatter: E. Rossel
År: 1910
Sted: Bruxelles
Sider: 452
UDK: St.f. 061.4(100)Bryssel
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L’EXPOSITION DE BRUXELLES
l37
qu’il avait rempli une carrière féconde, il voulait
dire aussi qu’il laissait une œuvre. Et, de fait,
parmi les peintres qui se nimbèrent de l’auréole de
Rubens, nul mieux que Gaspard de Craeyer n’eut
la beauté dans la conception et l’émotion dans
l’expression qui caractérisent les grands artistes.
Certes, il n’a pas la fougue de Rubens, ni l’ar-
deur de son génie, ni non plus la richesse de son
imagination. Son talent est plus modeste, son ins-
piration est plus tempérée, mais combien elle est
séduisante dans sa grâce onctueuse! Il possède à
un très haut degré le sentiment religieux, non pas
celui qu’un mysticisme inspire, ou encore celui
que de puissants artistes ont élevé jusqu’au sublime;
il est évangélique et doux,il parle aux humbles et va
au cœur plutôt, qu’à l’esprit. Ses Christs ont des
extases d’une infinie ten-
dresse {Le Sauveur du
Monde, Musée de Lille);
ils implorent, leurs yeux
levés au ciel, une indul-
gence et un pardon, l’oubli
d’une offense ou le salut
d’une humanité coupable.
Son Saint Biaise (du Musée
de Gand)aperçoit, au milieu
de l’horreur de son sup-
plice, un ange lui tendant
la palme, et son visage s’il-
lumine d’une céleste béati-
tude, tandis qu’à ses pieds
une pieuse femme étanche
avec amour le sang de ses
blessures et qu’une autre,
les yeux levés vers lui, sem-
ble participer à la douceur
de son extase. Dans la
Pêche Miraculeuse (Musée
de Bruxelles), Jésus a dans
les yeux et dans le geste la
persuasion évangélique qui
séduit les apôtres, avides
peut-être de ramasser le
butin magnifique étalé de-
vant eux, mais gagnés à
coup sûr par une éloquence
surhumaine à un idéal
d’adoration et de foi. De
saints évêques prient, age-
nouillés, avec de la ferveur
dans le regard, des Christs
illuminés implorent, de
saintes femmes pleurent, et
c’est toute l’œuvre de dou-
ceur et d’onction de Gas-
pard de Craeyer, si profon-
dément originale et émou-
vante, malgré les traces
qu’y a laissées l’étude et
l’admiration de Rubens,
le maître souverain et tyrannique.
Deux peintres d’origine hollandaise, nés tous
deux à Bois-le-Duc, vinrent à Anvers fréquenter
l’atelier de Rubens. L’un est Abraham Van Die-
penbeek (iSgô-iôyS), peintre habile et fécond,
dont les musées du Louvre, de Berlin et de Vienne,
possèdent des œuvres; l’autre est ce Théodore
Van Thulden (1606-1676) qui fut le collaborateur
de Jordaens dans la décoration de la maison du
Bois, à La Haye. Tous deux, ils continuèrent la
tradition glorieuse de Rubens. Leur œuvre se
reflète dans la sienne, comme l’œuvre de l’élève
dans celle du maître, avec de l’élégance et de la
virtuosité peut-être, mais sans sa dominatrice
puissance.
Abraham Janssens (iSyS-iöS^ procède de Jean
Snellincx, dont il fut l’élève. Ses conceptions sont
froides en général, son coloris est terne. Il forma
deux peintrès : Gérard Segers (i5gi-i65i) et
Théodore Rombouts (tSgy-iöSy) qui, tous deux,
à leur tour, subirent l’influence du Caravage.
Eux aussi sont impressionnés par Rubens, bien
que Rombouts réussisse à garder sa personnalité.
Erasme Quellyn (1607-1678) continue égale-
ment la tradition rubénienne. Et toute une dynas-
tie de peintres de ce nom marche sur les traces
du maître. Corneille Schut (iSgy-iöSS) a laissé
dans les églises d’Anvers de grandes compositions,
remarquables par leur ampleur et leur conception
décorative. Lucas Franchoys (1616-1681), Gérard
Douffet (I5g4-I66o) produisent aussi des œuvres
intéressantes.
Corneille de Vos est un des grands portraitistes
CORNEILLE DE Vos — La FAMILLE DE L’ARTISTE
flamands. Il naquit à Hulst en i58q et mourut à
Anvers en i65r. Il fut l’ami de Snyders, de Rubens
et deVan Dyck. Comme peintre de la physionomie
humaine il est à peine inférieur à ces deux grands
artistes.
On peut apprécier son talent à Bruxelles et à
Anvers, dans ces tableaux où une famille est
groupée autour de son chef, où toutes les carac-
téristiques d’une race se révèlent dans les traits du
visage, dans les attitudes des personnages. Ce
qu’il y a dans ces visages graves, dans ces grands
yeux profonds et clairs, c’est l’expression d’une
âme, celle de ces Flamands pensifs et solennels,
gardant avec amour leurs mœurs familiales. La
femme participe à la gravité de l’époux et les deux
ou trois petits- enfants qui jouent à leurs pieds
montrent, dans l’expression sérieuse de leur physio-
nomie l’hérédité des vertus ancestrales. On connaît
le chef-d’œuvre de Corneille de Vos, qui décore le
Musée d’Anvers, le portrait du messager de la cor-
poration de Saint-Luc, Abraham Grapheus. Ce
portrait est un caractère qui s’exprime. Sur cette
face bourrue toute une psychologie se détaille. Ce
n’est point là la reproduction de quelques traits du
visage par laquelle une ressemblance est atteinte,
mais la vie même d'une race tout entière qui passe
comme une ombre fugitive sur ces visages habitués
à souffrir le travail, la douleur et la dureté des
heures.
David Teniers le jeune est le chef de cette
école de petits maîtres pour qui le Monde fut
vraiment cette comédie en cent actes divers dont
nous parle le fabuliste. Ils jetèrent sur les hommes
et les choses qui les entou-
raient leurs regards clairs
et émerveillés, et ils décou-
vrirent des beautés éparses
dont nul n’avait eu avant
eux l’intuition. Art secon-
daire, peut-être, parce qu’il
ne rechercha pas les com-
positions grandioses, parce
qu’il ne tenta pas de s’élever
aux sublimités mystiques
ou humaines, art bien puis-
sant cependant, puisqu’il
est fait de la vie elle-même,
grouillante, animée et fris-
sonnante, répandue autour
de nous.
David Teniers le jeune
fut grand parmi ces petits
maîtres, et ce n’est pas là
un mince titre de gloire.
Ce peintre naquit à Anvers
en 1610. Son père était un
artiste lui-même, non sans
valeur d’ailleurs. C'était
David Teniers 1er ou le
Vieux, le premier de la
dynastie de cette famille
qui compta parmi ses mem-
bres des peintres remarqua-
bles. Rubens guida les pre-
mières études du jeune
homme. Il semble l’avoir
entouré d’une affection par-
ticulière. Nous savons, en
tous cas, que le maître fut
son témoin lorsqu’il épousa
une des filles de Brueghel
de Velours.
David Teniers fut nom-
mé peintre particulier de
l’archiduc Léopold-Guil-
Jaume et conservateur de sa
galerie de tableaux. Il mou-
rut à Bruxelles en i6go.
David Teniers mena une vie de gentilhomme,
fortuné. Ses goûts aristocratiques se révèlent dans
certains tableaux où, non sans une certaine
mignardise, il se peint lui et sa société favo-
rite se livrant aux plaisirs de la musique et du
chant. Mais ce n’est pas dans ces œuvres assez
rares d’ailleurs qu’il faut juger l’artiste. Il est par-
tout où la vie se révèle, dans les tavernes fla-
mandes où de braves gens sont attablés, mangeant,
buvant et discutant, dans les kermesses surtout où
la sarabande se déroule à l’infini, où parmi les
animaux de la basse-cour le peuple des paysans se
livre à sa joie désordonnée. Un ménétrier monté
sur un tonneau mène cette ronde folle, qui parfois
tournoie gravement, accomplissant comme un
rite l’acte de la danse, tandis que, descendu d’un