Exposition Universelle Internationale De Bruxelles 1910
Organe Officiel De L'exposition, Vo.l 1
Forfatter: E. Rossel
År: 1910
Sted: Bruxelles
Sider: 452
UDK: St.f. 061.4(100)Bryssel
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L’EXPOSITION DE BRUXELLES
ment originales d’Ettore Tito, de Selvatico et de
Scattola.
La France projette quelques lumières brillantes.
C’est Besnard, le décorateur moderniste, qui em-
prunte ses allégories gracieuses à des entités scienti-
fiques et philosophiques. Sa Pensée, page d’un livre
puissant qui s’inscrira sous la coupole du Petit
Palais à Paris, figure un jeune homme suivant
dans les nuages un chemin hasardeux entre la
vieillesse trop prudente, sans cesse craintive, et la
jeunesse trop confiante. Sa Matière se symbolise
par un grand corps devenu inerte lorsque la Pensée
a fui loin de lui vers les hauteurs rosées de l’em-
pyrée. M. René Piot, décorateur lui aussi, nous
initie dans ses Idoles et son Fden à un art singulier
où revivent les inspirations chères à Gauguin,
tandis que M. Caro-Delvaille étale sur ses toiles
l’opulence de ses chairs en fleurs de femmes
(Sommeil fleuri), tandis que M. Cottet fait se
dérouler sous ses cieux lourds de Bretagne, sur
ses mers verdâtres, auprès de ses toiles de barques
rouges comme des
crépuscules de sang,
la douleur des or-
phelins et des veu-
ves, victimes de la
mer, ou le rêve béat
de ses Bretonnes
immobiles et rési-
gnées.
L’art anglais est
représenté cette an-
née par M. Austen
Brown, dont le Ca-
lypso caractérise la
manière poétique;
parM. Lavery,dont
la Dame en noir ap-
paraît comme une
mystérieuse figure
de passion et de
charme; par M.
Grosvenor Thomas,
dont les paysages
transparents et frais
rappellent la dou-
ceur des toiles de
Gainsborough; par
ce prodigieux
Brangwyn qui,dans
ses dessins et ses
eaux-fortes, évoque
un peuple de tra-
vailleurs gigantes-
ques occupé à des
œuvres surhumai-
Jef Leempoels — Jeune dame a sa toilette
nes, des aspects de cathédrales, de temples, d’ate-
liers, sombres, hallucinés et confus.
Mais la grâce et la douceur du sentiment latin
se retrouvent chez les Italiens Ettore Tito, Scattola
et Selvatico. C'Automne de Tito nous montre une
gardeuse de brebis, animée 'd'un mouvement gra-
cieux, descendant vers la vallée des sommets neigeux
dont les teintes blanches contrastent avec la
verdeur des prés et la bigarrure élégante des vête-
ments de la paysanne. M. Lino Selvatico répand
sur ses visages de femme une mélancolie un peu
maladive, mais d’un charme puissant. Amici (les
amis), c’est une fillette aux traits fins, au teint
douloureusement pâle, qui serre dans ses bras le
chien ami, confiant et fidèle; Lei, c’est la femme
aux yeux rougis de pleurs, au visage ravagé par la
passion, mais délicieusement mélancolique et
tendre; une morbidesse, une distinction raffinée
caractérisent toutes les œuvres de Selvatico.
Ainsi nos hôtes artistes se présentent en face des
nôtres, divers par les tendances, divers par l’inspi-
ration et le métier. Nous ne savons cependant si,
devant ces noms presque universellement connus,
nos artistes doivent s’écarter avec une trop farouche
modestie. Les Claus, les Fabry, les Montald, les
Gilsoul, les Frédéric se sont affirmés à l’étranger;
leur apparition aux expositions lointaines fut
signalée par des succès. Le voyageur qui parcourt
les musées d’Allemagne, d’Angleterre, de France
et d’Italie les retrouve et les salue à son passage.
Ici, ils font aux artistes étrangers un cortège
de talent et de gloire. Moins divers peut-être,
moins orientés vers un idéalisme parfois trop litté-
raire, ils expriment, avec une clarté vigoureuse,
l’âme du sol natal et ses splendeurs, et certains
d’entre eux ne dédaignent pas d’être élégants,
subtils et précieux.
M. Emile Claus, qui voit la nature et ses
diverses représentations dans la lumière, comme à
travers un prisme merveilleux où toutes les choses
miroitent et s’illuminent, a un délicieux paysage
baigné de clarté et de couleur, Fin septembre. Et
autour du maître d’Afsné, nous retrouvons les
peintres que guida sa vision et qui en conservent
les reflets : M. Frans Gaillard, son rutilant Matin
clair et son emphatique Salut au soleil, Mlle Jenny
Montigny et sa Matinée d’octobre, sa Maisonnette
en été, M. Georges Morren et son Perron bleu.
M. Théo Van Rysselberghe nous donne en
points de blancheur et d’azur de puissantes
impressions de Soleil couchant et de nuages.
M. Ferdinand Willaert, fidèle aux beautés de sa
ville natale, nous évoque les quais de Gand aux
eaux dormantes mais si gaiment lumineuses sous
le reflet des maisons aux gammes chantantes de
couleur, et sous la neige encore la ville mélanco-
lique conserve la richesse cuivrée de ses teintes.
M. Degouves de Nuncques, abandonnant ses
visions de soleil, nous donne dans son Chaland
une vigoureuse impression d’hiver.
M. Gilsoul expose au Salon de Printemps une
œuvre de premier ordre qui semble marquer une
hardiesse et une nouvelle tendance de son talent. Il
a peint le Bassin des pêcheurs à l’heure indécise où
les ombres de la nuit luttent contre les clartés hési-
tantes du soir. Déjà les maisons des quais, teintes
des joyeuses bigarrures flamandes, sont éclairées à
l’intérieur par la lumière des lampes, et ces fugi-
tives et artificielles lueurs jettent sur les habitations
la gaieté de leurs couleurs. La fumée d’un train
raie de vapeurs blanches ce bariolage pittoresque.
Au-dessus des toits, le soleil, en s’éloignant, a
laissé la trace rouge de ses rayons. Une clarté can-
dide, ineffablement douce, indique encore la pré-
sence du jour qui s’en va comme à regret. Sur le
bassin, la nuit baigne les choses de ses ombres;
les eaux somnolent déjà dans la paix du soir. Les
voiles des barques immobiles ressemblent aux ailes
de grands oiseaux endormis. Dans cette gradation
de sensation, de couleur et de vie qui va du soleil
lumineux à la nuit assoupie, M. Victor Gilsoul a
mis toute sa maîtrise. C’est une page magnifique
d’un artiste habile à noter avec une précision puis-
sante les aspects les plus divers de la nature.
M. A. Heymans voit d’un œil de poète autant
que de peintre la nature déployée autour de lui.
On dirait qu’il s’ef-
force de la saisir
dans son intimité,
aux heures incer-
taines où l’aurore,
le crépuscule ou la
nuit étoilée l’ornent
de beautés nouvelles
et insoupçonnées. Il
la voit, timide et
presque pudique,
sous la première ca-
resse du jour nais-
sant, lorsque les
feuillages verts des
arbres et les hautes
herbes des marais
sont encore recou-
verts d’un voile
blanc de vapeurs,
tissu merveilleux
dont la nature se
pare comme une
coquette à son ré-
veil. De vagues for-
mes de femmes tra-
versent cette atmo-
sphère toute perlée
de verte rosée, et
c’est là son tableau
célèbre des Bai-
gneuses. La nuitn’a
pas moins de char-
me, soit que les
étoiles l’illuminent,
soit que l’orage fasse ruisseler sur les routes des
torrents de pluie. Qu’une maison s’ouvre alors à
l’appel du charretier perdu dans les ténèbres et
qu’une faible lumière, tenue par une main secou-
rable, paraisse au seuil, et le paysage humide
s’éclaire alors de clartés roses et fleuries (Une
nuit d’orage). M. Heymans se plaît à nous
rendre cette impression de la nuit rose, char-
mante sous la timide clarté des feux célestes,
dans sa Rentrée de troupeaux, dans son Berger.
Attentif à saisir les aspects fugitifs de la nature,
à la surprendre comme une beauté endormie,
incapable de voiler ses charmes, il découvre les
splendeurs qu’il épie : les bois humides, sur qui
traînent encore les vapeurs aqueuses montant
des eaux qui ruissellent, se revêtent, sous son pin-
ceau, d’un manteau de blancheur et de verdure
qu’on dirait tissé par la main des fées, et ce sont
les Fonds de Bastogne. M. A. Heymans a une
vision de la nature luxuriante et fleurie qui n’ap-
partient qu’à lui.
Dans la salle où M. Besnard expose ses grandes